Si dans la plupart des localités on cultive la terre, le village de Notto Gouye Diama (région de Thiès) est le lieu où toute cette production est exposée pour la vente. C'est pourquoi, Notto est devenu un marché international et ses produits s'exportent partout au Sénégal et hors du territoire national.
Sur les pistes, les voies carrossables ainsi que sur la chaussée, une multitude de charrettes chargées de légumes rallient le marché de Notto Gouye Diama. Dans cette localité de la région de Thiès se trouve le plus grand marché de légumes de la zone des Niayes. La plupart des agriculteurs des villages environnants et de la sous-région s'y donnent quotidiennement rendez-vous. « Nous disposons d'un grand marché international à Notto puisque l'ensemble de la production de la zone des Niayes, en provenance de Mboro, Diogo, Fass Boye, Diender, est vendue ici », explique Ibra Ndiaye, fils du chef de village Mor Khady Ndiaye. Le marché en tant que tel est situé dans un espace bien aménagé.
À l'intérieur de deux hangars, le marchandage entre vendeurs et acheteurs se déroule dans une bonne ambiance. Sur les étals sont exposés des amas de gombo, de poivron, de tomate et d'autres variétés de légumes. « J'habite le village de Sao, c'est à peine un kilomètre d'ici. Chaque jour, je viens vendre à Notto », dit Kiné, une commerçante qui propose du poivron. Non loin d'elle, deux commerçantes en provenance de Gossas, dans la région de Fatick, marchandent des sacs de piments. Elles semblent avoir trouvé un accord avec le vendeur. « Le sac de piment est à 37 000 FCfa maintenant », renseigne Abdou, le vendeur qui compte en même temps ses liasses d'argent. En effet, les acheteurs viennent de partout au Sénégal. Notamment de Dakar, Kaolack, Touba, Ziguinchor, Tambacounda ou encore de la Gambie.
Dans la partie réservée aux véhicules, un minicar à destination du Sud du pays est en train d'être rempli de caisses de tomates et d'autres légumes verts. « Ces caisses de poivrons doivent aller jusqu'à Bissau », renseigne l'un des chargeurs, le visage en sueur. Ce véhicule passera par différentes localités notamment la Gambie, Croisement Diaroumé, Bignona et Ziguinchor. « Plusieurs commerçants qui connaissent Notto font des commandes que nous leur livrons à partir d'ici. Certains peuvent venir jusqu'ici et d'autres m'envoient la commande », fait savoir Oumar qui gère habituellement les chargements de la zone Sud. Pendant ce temps, le jeune Malien, Cheikh, est perché sur un camion d'où l'on décharge de temps à autre des sacs de patates douces. Mais apparemment, il ne reste que quelques sacs à décharger. « En venant, on charge entre 600 et 650 sacs de 75 kg dans le camion et une fois ici, on écoule facilement la production », renseigne le jeune Malien qui, à force de fréquenter le marché de Notto, a maîtrisé quelques expressions en wolof.
Ce marché ne profite pas uniquement aux vendeurs. Plusieurs jeunes aident les commerçants à charger ou à décharger leurs marchandises. Mor Faye, un jeune originaire de Touba, est l'un d'eux. Assis sur un pousse-pousse, il fréquente les lieux depuis quelques années. « J'y viens pour travailler, mais en réalité je suis cuisinier dans un des restaurants de l'Université de Dakar. À cette période de l'année, le campus universitaire a fermé ses portes et chaque fois je viens ici », souligne le jeune homme. Avec quelques semaines de travail à Notto, Mor peut empocher 250 à 300 000 FCfa.
La bénédiction de Mame Cheikh Ibrahima Fall
La notoriété de ce marché n'est plus à démontrer dans la zone des Niayes et au Sénégal. Modou Anta Ndiaye habite Notto, mais il croit connaître l'origine de ce succès de son village aux dépens d'autres localités telles que Mboro, Diogo, Fass Boye, etc. Selon lui, le fondateur du village, Mame Djibril Farimata Ndiaye était ami avec Mame Cheikh Ibra Fall. À l'occasion du séjour de ce dernier dans le village, il pria Dieu pour qu'il fasse de Notto, une localité célèbre et une terre bénie. « Aujourd'hui, quand vous voyez tout ce monde ici, vous comprenez que ce voeu est exaucé », fait remarquer Modou, lui-même devenu disciple de Cheikh Ibrahima Fall, avec ses dreadlocks. Zone agricole par excellence, Notto est devenu, au fur du temps, un melting-pot avec une population composée de Wolofs, Peuls, Sérères, Bambaras, Mandingues, etc. « La plupart travaillent et habitent dans le village et nous vivons en parfaite harmonie », renseigne Ibra Ndiaye.
Outre le commerce qui est l'activité phare de la localité, Notto est une zone agricole. Mais actuellement, les agriculteurs vivent des moments difficiles. Certains comme Modou Anta Ndiaye travaillaient en temps plein dans les champs. Aujourd'hui, il a préféré jeter son dévolu sur le marché où il achète des légumes pour les revendre. « J'ai quitté les champs parce qu'à un moment donné, il faut se rendre compte qu'on travaille pour les autres. Une fois la récolte, ce sont les commerçants qui déterminent le prix et pas les paysans. C'est frustrant », déplore le disciple « Baye Fall ». Ibra Ndiaye se dit « incapable » d'énumérer toutes les difficultés que rencontrent les paysans de Notto. Il pointe du doigt l'absence de semences et d'engrais alors que la saison des pluies s'installe petit à petit. « On n'a pas d'eau. Il faut construire un mini-forage ou creuser un puits pour espérer avoir de l'eau », dit-il.