Ile Maurice: Extradition de Nono - Yes yes au show

Ils étaient bien décidés à l'extrader. Jérémy Désiré Décidé, condamné à sept ans de prison - aux côtés de Jean Hubert Célerine, alias Franklin - pour son implication dans un trafic de cannabis destiné à alimenter Maurice, a ainsi été «expédié» vers La Réunion vendredi.

Cette opération, planifiée par les autorités mauriciennes depuis plusieurs jours, s'est déroulée de manière minutieuse, sous la surveillance d'une escorte composée de plusieurs unités de police, veillant au transfert du prévenu dans les meilleures conditions possibles et surtout pour éviter tout incident.

Plusieurs réunions ont eu lieu depuis la semaine dernière pour finaliser le départ de Nono. Finalement, il a pu quitter le pays à bord d'un vol régulier d'Air Mauritius à 15 h 20 avant-hier. Un procureur de La Réunion et deux gendarmes sont arrivés vers midi et sont restés à l'immigration en attendant l'heure de départ. Il fallait s'assurer que le procédé soit en conformité avec l'Extradition Act de 2017.

Nono a dès lors quitté la prison de Beau-Bassin à bord d'un véhicule de la Special Supporting Unit (SSU), sirène hurlante. Le convoi guidé par un motard qui ouvrait la voie a quitté le centre pénitentiaire à 11 h 10, direction Plaisance. En route, le fourgon est suivi de près par d'autres véhicules de police, notamment ceux de la Special Mobile Force et des officiers du Scene of Crime Office (SOCO). Les journalistes étaient collés à leurs basques, enfin roues.

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Trente-cinq minutes plus tard, soit à 11 h 45, un Nono menotté débarque à l'aéroport, comme la star d'un film mafieux. Si dans un premier temps on s'attendait à ce qu'il soit conduit au poste de police pour la suite de l'opération, il est finalement resté dans le véhicule de la SSU, garé dans la cour du quartier général. Les officiers de la SSU, dûment encagoulés, l'ont surveillé pendant deux heures sans qu'il ne bouge.

Nono recevra son déjeuner sur place et n'était pas autorisé à sortir du véhicule blindé. Oui, mais s'il a une envie pressante ? «Il y a des toilettes à l'extérieur, le véhicule peut simplement faire un tour et l'amener directement là-bas. Il ne sortira pas», répliquent des policiers avec tout le sérieux et la solennité que requiert l'opération. On aura beau essayer de l'apercevoir, mais les «no,no» de la police sont sans appel.

Entre-temps, l'équipe dirigée par le Deputy Commissioner of Police (DCP) Choolun Bhojoo finalise 'l'itinéraire' de Jérémy Désiré Décidé. Si, dans un premier temps, il était prévu qu'il soit conduit directement sur le tarmac, le plan a été modifié. Finalement, Nono passera par le hall d'enregistrement, empruntant ainsi le même chemin que tous les passagers. Pourquoi ? Est-ce pour faire le show ? «Dans un souci de transparence», dit-on. En tout cas, les photographes du SOCO n'ont pas manqué d'immortaliser les moindres mouvements de Nono. Ces photos devront être ajoutées à son dossier en tant qu'«exhibits». Fait notable : même la MBC, qui d'habitude ne couvre pas les comparutions de Nono au tribunal, était présente pour suivre toute l'opération

À 13 h 30, une équipe quitte le siège pour procéder à l'enregistrement des bagages de Nono. Un officier de la SSU tend alors un sac noir à son collègue le seul bagage que Nono emportera avec lui. À partir de 13 h 45, les choses s'accélèrent. Une première équipe se rend à l'aéroport. Il s'agit du motard et des policiers qui seront postés à l'entrée du hall d'enregistrement.

À 14 heures tapantes, Nono quitte le poste de police de l'aéroport. À son arrivée, l'étape finale de son transfert est enclenchée. Tous les policiers sont en position et Nono sort finalement du véhicule de la SSU. Tête baissée, visage fermé, il évite les regards. Malgré son crâne fraîchement rasé, une barbe docile, il a l'air résigné. La dernière fois qu'on l'a vu courir, c'était sous la pluie, le 14 février, alors qu'il se rendait au siège de la commission anticorruption aux côtés de son avocat, Me Sanjeev Moloye...

Retour au présent, à l'aéroport. Nono, les mains «meno-no-ttées», est rapidement conduit jusqu'au hall d'enregistrement. Son passage éclair devant la longue file d'attente des passagers devant les comptoirs de l'immigration ne passe pas inaperçu. Une atmosphère tendue qui n'a duré que quelques minutes, car Nono a rapidement franchi la porte pour se retrouver de l'autre côté de l'aéroport, pour prendre la direction du tarmac. Un couple indien, soucieux, nous demande alors s'il s'agit d'une attaque terroriste. «Que se passe-t-il ici ? Qui est-il ?» Un prisonnier qui est extradé, rassure-ton. Le soulagement cède alors la place à l'étonnement. «Oh, really..»

Cette mission sous haute tension aura duré plus de quatre heures. Il faut reconnaître qu'elle a été menée de manière très professionnelle par l'équipe du DCP Bhojoo, les étapes étant réglées comme du papier à musique. Nono a-t-il pu en écouter dans l'avion ? Avait-il droit à un siège côté hublot pour dire au revoir à son île ? Ça, c'est encore une autre histoire...

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