Madagascar: « Que la liberté soit la règle et la garde à vue l'exception »

L'atelier organisé par la Commission nationale malgache pour la défense des droits de l'homme, le 19 septembre 2000, sur la problématique de la garde à vue dans la Grande île, vise à humaniser ce système judiciaire, « en tenant compte des impératifs géographique, culturel, économique et social du pays » (lire précédentes Notes). Plus exactement, précisent les participants, il ne s'agit pas d'une réorganisation générale de la Justice, mais plutôt d'un aménagement des éléments déjà existants dans le système.

Il est ici surtout question de la « moralisation de la profession ». A commencer par les conditions professionnelles, matérielles et psychologiques dans lesquelles les fonctionnaires de la Police judiciaire (PJ) doivent préserver leur intégrité, leur impartialité et leur dignité. « Ils doivent bénéficier de soutiens de la part de la communauté dans laquelle ils exercent », pour qu'ils puissent disposer de nouveaux matériels ou entretenir les équipements qui existent déjà.

L'instauration d'un Plan local de sécurité constitue un premier pas à encourager. C'est par celui-ci que « les autorités locales oeuvrent ensemble avec la gendarmerie, en collectant des fonds pour celle-ci ». En outre, l'officier de police judiciaire (gendarme ou policier) doit avoir droit à « une juste rémunération ». Cependant, certains paramètres doivent entrer en ligne de compte, tels l'importance des risques courus par l'OPJ, sa responsabilité ainsi que les irrégularités d'horaires de son travail.

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« Ce sera déjà un moyen pour combattre la corruption à ce niveau. » Comme le but est de le motiver, les participants à l'atelier proposent de faire adopter dans la législation malgache, le système français qui consiste, pour les magistrats du ministère public, à noter le comportement de l'OPJ. En parallèle, le contrôle des officiers supérieurs de la police judiciaire (OSPJ) doit être régulier, sur pièce et sur place. Une bonne relation entre l'OSPJ et l'OPJ permet de déceler un éventuel dysfonctionnement de la Justice et d'y remédier.

Si, dans le cadre de ce contrôle, le supérieur hiérarchique est informé d'actes attentatoires aux droits du gardé à vue, il doit prendre les mesures nécessaires pour faire traduire le responsable en justice. La moralisation de la profession suppose aussi sa connaissance parfaite. Des formations approfondies sont indispensables avant et pendant l'exercice de la fonction. « La devise de l'enquêteur pourrait être : diligence, dans le respect de la loi et de la dignité humaine ». Ainsi l'opportunité de placer une personne en garde à vue devrait être consciencieusement examinée pour que la liberté soit la règle et la garde à vue l'exception.

Si la PJ se voit assigner « des règles de déontologie qui tiennent réellement compte des droits de l'homme », le système pénal malgache fera une avancée dans le respect de libertés publiques. Les participants à l'atelier du 19 septembre 2000, soulignent, par ailleurs, que des précisions sont à apporter en ce qui concerne les motifs et la durée de la garde à vue, ainsi que le traitement des victimes de garde à vue arbitraire. La législation de 1997 motive la décision de la garde à vue par « la nécessité de l'enquête ». Cette notion devrait être expressément définit dans le texte. En revanche, le délai de quarante-huit heures parait « raisonnable ».

Mais si ce délai est épuisé alors que l'enquête n'est pas close, le dossier devrait être transmis au Parquet. Il incombe au ministère public de « faire bon usage » de la procédure d'information sommaire qui permet de compléter l'enquête initiale. Le législateur devrait également aménager un système de garantie et de recours plus accessible aux justiciables. « Les ruraux pourront, par exemple, déposer des plaintes auprès du maire quand le tribunal est loin. » Comme la détention préventive, les règles minimes pourraient être applicables à l'amélioration des conditions humaines en matière de garde à vue.

Un minimum d'infrastructures sanitaires (lits, bancs...) est nécessaire à l'intérieur des chambres de sûreté. Enfin, la ratification par Madagascar des textes internationaux pour la protection de l'individu serait bénéfique. Notamment la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants , adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies, le 9 décembre 1975; ou les Dispositions visant l'application effective de l'ensemble des règles minima pour le traitement des détenus , approuvées par la XXIe session du Conseil économique et social, le 25 mai 1984.

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