Afrique: Elargissement annoncé des Brics - La difficile équation des critères !

analyse

C'est, en principe, aujourd'hui, 24 août 2023, que les lampions s'éteignent sur le sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) dans le quartier Sandton au Nord de Johannesburg en Afrique du Sud.

En attendant les conclusions de ce sommet qui, aux dires de l'hôte, Cyril Ramaphosa, « est particulièrement important, car il se tient à un moment où le monde est confronté à des défis fondamentaux qui vont déterminer l'évolution des évènements internationaux pour les années à venir », le dossier principal au menu des échanges et qui pourrait d'ailleurs transformer fondamentalement l'avenir des BRICS, a été l'élargissement de la coalition.

En effet, pas moins d'une quarantaine de pays désireux d'adhérer à l'organisation, frappent à sa porte dont 22 ont déjà formellement fait la requête. Et ces aspirants ne sont pas les moindres. En effet, l'on y dénombre des pays comme l'Iran, l'Arabie Saoudite, l'Argentine, l'Algérie, l'Egypte, le Nigeria pour ne citer que ceux-là. La problématique pour les pays membres-fondateurs des BRICS, était donc de trouver les critères pour admettre les candidats les plus intéressants et éloigner les trouble-fêtes.

Le critère russe ne fait pas l'unanimité

Et le moins que l'on puisse dire, ce pari était très loin d'être gagné d'avance ; les positions n'étant pas les mêmes, même si a priori, elles n'étaient pas irréconciliables. L'on sait, en effet, que la Russie mettait en avant la position des pays candidats par rapport à la guerre qu'elle mène en Ukraine en proposant le critère que ces pays n'aient pas condamné son intervention militaire en Ukraine.

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Et l'on comprend cette posture russe qui ne voudrait pas s'accommoder de la présence des alliés des Occidentaux dans les BRICS où elle joue le rôle vedette au point de mettre en péril les seules soupapes qui lui permettent de tenir face aux sanctions que lui imposent ses adversaires que sont les USA et l'Union européenne. Mais ce critère russe ne fait pas l'unanimité car l'Afrique du Sud a nettement répondu à cela en disant ceci : « Je ne pense pas que nous participerions à une organisation qui serait pro ceci ou anti cela » au risque de « se faire des ennemis ».

L'Inde et le Brésil, eux, se montrent plus regardants sur le processus même d'adhésion. Les deux nations émergentes souhaitent que les pays demandeurs passent d'abord par le statut d'observateurs ou de partenaires avant d'obtenir la qualité de membres.

Mais derrière cette question procédurale, se dissimulent sans doute des préoccupations d'ordre politique et économique : l'Inde et le Brésil ont des inquiétudes pour leur influence, notamment en ce qui concerne les alliés de la Chine qui a un PIB deux fois supérieur à celui des quatre autres pays des BRICS réunis, mettant en avant ainsi la possible domination de Pékin au sein du groupe.

La Chine, elle, comme il fallait s'y attendre, est partisane de l'élargissement du groupe. Car, au-delà de l'ouverture de nouveaux marchés et de sources d'approvisionnement pour sa florissante industrie, ce dont il est question pour le pays de Mao Tsé Tong, c'est l'élargissement de sa sphère d'influence dans le monde.

On peut féliciter le pays de Cyril Ramaphosa pour avoir réussi le pari de l'organisation

Cela dit, en attendant de voir dans le communiqué final comment les Chefs d'Etat, en l'absence du président Poutine qui n'a pu faire le déplacement en raison des risques liés au mandat d'arrêt international émis à son encontre par la Cour pénale internationale (CPI), ont pu trouver des critères convergents, l'on ne peut manquer de saluer l'engouement pour les BRICS, qui a pour effet de compliquer la tâche dans le choix des critères d'adhésion des nouveaux membres par ces puissances émergentes qui rêvent d'un nouvel ordre mondial.

Ce vif intérêt est en partie ravivé, selon certains analystes internationaux qui estiment que « depuis l'invasion russe de l'Ukraine, il y a de fortes tensions géopolitiques mondiales et cela rend très anxieux les pays du Sud. Beaucoup aspirent à plus de prévisibilité et ils ne peuvent la trouver qu'en mettant en commun leurs poids et influence dans le monde ». Quelles que soient les conclusions du sommet, ce soir à Johannesburg, cela constitue en soi une victoire pour les BRICS auxquels l'on peut tresser des lauriers pour avoir non seulement déclenché le noble combat pour inverser l'ordre mondial fait de l'hégémonie des Etats-Unis à travers la toute-puissance de sa monnaie qu'est le dollar et de celle des institutions de Bretton Woods et aller vers un autre monde plus équilibré.

Mais aussi suscité l'espoir pour les pays en voie de développement. Toute la question est de savoir si les pays qui sont dans le viseur des BRICS, se laisseront conduire à l'abattoir comme un mouton de la Tabaski. L'on peut déjà légitimement en douter avec les manoeuvres d'infiltration du groupe par certains pays du G8 qui, en réalité, constituent la cible des BRICS. L'on sait, par exemple, que le président français, Emmanuel Macron, avait exprimé le besoin de participer au sommet en tant qu'observateur.

Il faut donc s'attendre à des actions souterraines pour saborder ce regroupement parmi lesquelles, l'on comptera nécessairement une nouvelle ruée vers les pays pauvres, notamment africains avec de nouvelles promesses de financement quand ce ne sont pas des tentatives de déstabilisation politique orchestrées depuis l'étranger pour servir les intérêts économiques et géostratégiques des grandes puissances occidentales. En attendant, l'on peut féliciter le pays de Cyril Ramaphosa pour avoir réussi le pari de l'organisation de ce sommet qui s'annonçait avec beaucoup de difficultés liées au contexte mondial.

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