Aux yeux des citoyens, la France et les précédents régimes du Burkina Faso sont les responsables majeurs de la crise sécuritaire, en dehors des groupes terroristes.
Key findings
- ▪ Le crime et l'insécurité sont les plus importants problèmes auxquels le pays fait face et dont le gouvernement devrait s'attaquer, selon les citoyens burkinabè.
- ▪ Plus des trois quarts (77%) des Burkinabè disent qu'ils se sont sentis en insécurité dans leur quartier au moins une fois pendant l'année écoulée, et les deux tiers (66%) déclarent avoir craint d'être victimes de crime à domicile. o La peur d'insécurité au quartier a augmenté de 32 points de pourcentage depuis 2012, pendant que la crainte d'être victime d'un crime chez soi a doublé.
- ▪ Aux yeux des Burkinabè, la France (45%) et les précédents régimes du Burkina Faso (31%) sont les responsables majeurs de la crise sécuritaire, hormis les groupes armés terroristes.
- ▪ La majorité (76%) des citoyens font « beaucoup » (54%) ou « partiellement » (22%) confiance aux forces de défense.
- ▪ Deux tiers (66%) des citoyens pensent qu'il est légitime que l'armée prenne le contrôle du pays quand les gouvernants abusent du pouvoir au nom de leurs propres intérêts.
- ▪ De larges majorités estiment que les Forces de Défense et de Sécurité (78%) et les Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) (73%) sont « beaucoup utiles » dans la lutte pour recouvrir l'intégrité territoriale et l'unité nationale du Burkina Faso.
- ▪ Cependant, l'écrasante majorité (83%) des Burkinabè soutiennent que les militaires qui sont au pouvoir devraient se concentrer entièrement sur la lutte contre l'insécurité au lieu de faire aussi de la politique.
En raison de la relative stabilité qui préexistait au Burkina Faso avant 2014, le pays attirait moins d'attention que ses voisins dans les débats internationaux et régionaux sur la sécurité. Aujourd'hui, devenu le théâtre de nombreuses attaques terroristes, le pays des hommes intègres est au coeur de l'actualité, car sa situation sécuritaire est devenue inquiétante (Loada & Romaniuk, 2014 ; Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires, 2023).
En huit années, les attaques djihadistes au Burkina Faso ont fait plus de 10.000 morts civils et militaires et plus de 2 millions de déplacés (Africanews, 2023). Pour faire face à cette crise sécuritaire, les dirigeants ont été obligés de réorienter leurs politiques gouvernementales. Les allocations budgétaires au profit des ministères en charge de la défense et de la sécurité ont été revues à la hausse, le maillage sécuritaire du territoire a été renforcé, l'effectif des unités de défense déjà existantes a été augmenté et doté en matériels de sécurité appropriés (Samboe, 2018 ; Nations Unies, 2018).
Omniprésente dans la sphère politique depuis le premier coup d'État du 3 janvier 1966, l'armée burkinabè s'est de nouveau illustrée en menant deux coups d'États successifs en huit mois en 2022. Le motif principal évoqué est l'incapacité des précédents régimes à contenir les incursions terroristes.
Ce travail s'intéresse aux préoccupations sécuritaires ainsi qu'aux perceptions des citoyens sur le rôle des différents acteurs de la crise. Il ressort de la plus récente enquête nationale d'Afrobarometer que la question sécuritaire est la plus préoccupante pour les Burkinabè, dont la majorité se sont sentis en insécurité dans leur quartier ou leur domicile pendant les 12 derniers mois qui ont précédé la collecte de données.
A peu près la moitié des citoyens imputent la responsabilité de la crise sécuritaire (en dehors des groupes terroristes) à la France, et beaucoup estiment que cette responsabilité incombe aux précédents régimes du Burkina Faso.
Les Burkinabè font confiance aux Forces de Défense et de Sécurité et pensent qu'il est légitime qu'elles prennent le contrôle du pays quand les gouvernants abusent du pouvoir au nom de leurs propres intérêts. Mais bien qu'ils soient conscients de l'utilité de l'armée dans la restauration de la sécurité, les citoyens souhaitent que les militaires qui sont au pouvoir se concentrent uniquement sur la lutte contre l'insécurité au lieu de faire aussi de la politique.
Styve Ramde Styve Firmin Ramde est researcher atà l'Institut pour la Gouvernance et le Développement