Madagascar: Les souverains du Nord-Ouest face à Gallieni

A partir des rapports que les autorités coloniales locales dans le Nord-Ouest de Madagascar lui envoient, le général Gallieni imagine, « dans son intime conviction», le comportement de l'ensemble des peuples antankarana et sakalava. Aux mois de juin et de juillet 1898, le gouverneur général réalise une tournée dans cette partie de l'ile. Arrivé à Mahajanga, il signe et promulgue, le 13 juin 1898, les instructions relatives aux mesures à prendre pour favoriser l'accroissement de la population de l'Imerina, car, estime-t-il, « la race hova paraît être la seule capable de fournir, dans l'avenir, une population et une main-d'œuvre suffisante ».

Se référant à l'histoire et aux conditions actuelles de Madagascar, Joseph Gallieni constate que, de tous les habitants de la Grande ile, ce sont les races du Plateau central, « surtout les Hovas », qui montrent « le plus d'aptitudes pour le travail de la terre, pour le commerce, pour l'industrie, qui sont les mieux préparés, en un mot, pour nous fournir, plus tard, cette main-d'œuvre qui, actuellement, nous fait défaut ici »...

Cette prise de position est suivie de toutes les dispositions à prendre pour développer l'accroissement de « la race hova » : mesures légales, administratives, hygiéniques et médicales, fiscales. Et le général Gallieni de terminer : « Ces dispositions s'appliquent exclusivement à l'Emyrne. Elles pourront, je n'en doute pas, être mises également et intégralement en pratique dans le Betsileo.

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Quant aux autres provinces, les observations des administrateurs qui les dirigent pourront seules me renseigner sur les conditions dans lesquelles elles seront susceptibles d'y être appliquées. » Après Mahajanga, le général Gallieni débarque à Nosy Be, où il s'imagine que l'ensemble des peuples antankarana et sakalava se ressemble. Dans la matinée du 8 juillet 1898, il reçoit « avec un certain apparat », dans la résidence de l'administrateur, Tsialana II, roi des Antankarana, Tsiaraso Ier, roi des Sakalava bemazava, Binao, reine des Sakalava bemihisatra et Bibiasso, reine des Sakalava de Maintirano.

La compagnie de débarquement de La Pérouse forme une double haie à l'entrée de la Résidence. Le premier roi introduit est Tsialana II, « le plus grand chef de la côte Nord-Ouest ». Son autorité s'étend du Sambirano à la province de Diego-Suarez, et il réside à Ambatoaranana, sur la Grande terre. Il s'avance lentement, solennellement même, entre ses deux ministres, et suivi d'une escorte nombreuse. « De haute stature, l'oeil vif, la physionomie intelligente, il avait presque le grand air.

Ce roi des Antankarana..., était toujours pour la cause de la France. La tranquillité était rétablie dans le pays sur lequel il régnait (...) l'ordre, la tranquillité et la rentrée exacte de l'impôt étaient satisfaisants. » Joseph Gallieni lui exprime son contentement en lui annonçant qu'il va augmenter son autorité et le charger lui-même de la perception de l'impôt avec remise du dixième. Entre ensuite Tsiaraso Ier, roi des Sakalava de la Grande terre, lequel réside à Ankify.

Vêtu d'une longue robe carmin, malgré le poignard passé à sa ceinture et encore quelque vivacité dans son regard, « il a plutôt l'air mou et efféminé », précise le secrétaire français. « D'ailleurs son escorte est surtout constitué de jeunes femmes et de jeunes filles... à l'air effronté. » Pour les autorités coloniales, son administration se ressent de l'apathie qui se lit sur son visage.

Le gouverneur général lui annonce alors que, s'il ne met pas plus d'énergie et d'empressement à faire exécuter les ordres qui lui ont été donnés, il le remplacerait. Puis, c'est le tour de la reine Binao qui réside à Ampasimena et règne sur un groupe assez important de Sakalava de la Grande terre. Suivie d'un important cortège, « où les vieillards dominaient », elle s'avance avec sa soeur Kavy. « Les événements politiques successifs des années passées ne semblaient pas trop déprimer le moral ni même le physique de la reine.» Gallieni lui exprime sa satisfaction de voir que tout va bien sur ses terres et que la sécurité y est complète.

Il la charge aussi de faire percevoir l'impôt à l'avenir et lui recommande « de veiller à ce que les colons français trouvaient auprès des indigènes l'aide et l'assistance qui leur étaient nécessaires pour le succès de leurs entreprises ». Ce défilé princier est fermé par la reine Bibiasso, exilée à Nosy Be, depuis une dizaine de mois. Le Général annonce à la reine de Maintirano que, sur la demande de l'officier qui commande le cercle, elle peut rentrer en possession de son royaume et rejoindre ses dévoués Sakalava, « devenus maintenant sujets dévoués de la France ».

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