Ils refusent de fléchir face à la pression pour imposer des nominés politiques à l'Ordre des dentistes. Depuis l'amendement apporté à la «Dental Council Act» à travers le «Finance Bill», sans consultation avec les principaux concernés, le Dr Sailesh Bissumbhur et son équipe cherchent par tous les moyens à faire entendre leur voix...
La décision est prise, vous allez engager une action en justice concernant l'amendement apporté à la «Dental Council Act». De quoi s'agit-il ?
Cela concerne l'ajout de trois nouveaux nominés politiques - du State Law Office, du ministère des Finances et du bureau du Premier ministre - à notre conseil d'administration. Nous comptons actuellement 11 membres, sept dentistes élus par leurs confrères, trois membres politiques nommés et un représentant du ministère de la Santé. Bientôt, nous serons sept élus, six membres nommés et un représentant de la Santé. Nous ne pouvons pas fonctionner avec un conseil où sept élus s'opposent à sept nominés. À noter que deux des sept élus sont également des dentistes du secteur public. Donc, au final, nous serons cinq dentistes du privé contre neuf autres personnes rattachées directement ou indirectement à l'État, au conseil.
Pourquoi une mesure aussi radicale ?
Nous avons décidé de porter notre cas devant la justice et sommes en pourparlers avec nos avocats, car il est impossible de discuter et de négocier avec le ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal. Nous avons eu une réunion avec lui le 4 août, mais il est resté ferme dans sa position, tout en reconnaissant, cependant, l'injustice de cet amendement. Ce qui est contradictoire... Depuis, nous lui avons envoyé une lettre pour lui signifier notre décision d'objecter à ces amendements. Plus de dix jours se sont écoulés, et nous n'avons toujours pas reçu de réponse à notre demande de rencontre. Nous n'avons pas d'autre choix que de recourir à la justice.
Quels sont les risques auxquels vous êtes confrontés avec l'ajout de trois nominés politiques au sein de votre conseil d'administration ?
Tout d'abord, nous n'aurons plus d'indépendance. Nous, les dentistes, n'aurons plus le dernier mot dans les décisions prises pour notre profession. Ensuite, il faut prendre en compte l'aspect financier lié à la venue de ces trois nouveaux membres. On nous a accordé une augmentation financière (NldR, grant), mais il faudra maintenant allouer des fonds pour ces trois nouvelles personnes. À quoi cela nous aura-t-il servi alors ? De plus, ces membres nommés ne sont pas des dentistes, et nous craignons qu'ils aient des préjugés en ce qui concerne les questions dentaires ou qu'ils soient influencés dans leur prise de décision.
L'opposition parle de «state capture». Est-ce une situation qui vous inquiète ?
Justement, c'est ce que nous répétons depuis le début. Le pouvoir veut tout contrôler. Il cherche à placer ses «dimounn» dans tous les conseils. C'est dangereux. Nous ne pouvons pas fonctionner librement dans de telles circonstances.
Qu'en est-il du délai de 30 jours imposé pour la demande d'enregistrement des dentistes étrangers ? Quelle sera la procédure à suivre ?
Nous allons également contester cela devant les tribunaux. Il est irréaliste de nous demander de vérifier les demandes d'enregistrement des dentistes étrangers en seulement trente jours, alors que la procédure normale prend au moins deux à trois mois. Par exemple, il faut obtenir leur «certificate of good standing», ce qui ne peut pas être obtenu du jour au lendemain. Ces procédés ne dépendent pas uniquement de nous, car ils nécessitent également des vérifications auprès des universités et des conseils des dentistes à l'étranger. La falsification de documents est un risque que nous ne pouvons pas prendre.
Avez-vous déjà reçu des demandes depuis que cet amendement est entré en vigueur ? Comment cela se déroule-t-il concrètement ?
Depuis sa mise en oeuvre le 1er août, nous n'avons pas encore reçu de demandes. Néanmoins, nous sommes conscients que c'est une démarche qui prend du temps et qui doit être réalisée avec beaucoup de rigueur. Il s'agit de la santé des Mauriciens.
Xavier-luc duval dénonce également cette «énormité»...
Lors d'une conférence de presse, le 12 août, le leader de l'opposition a également abordé ce sujet. «Lors de mon discours sur le Finance Bill, j'ai souligné cette absurdité, totalement inacceptable, cette énormité selon laquelle le gouvernement exerce désormais un contrôle total sur le Dental Council et le Medical Council. J'en avais parlé dans ce discours et je félicite le président du Dental Council qui s'efforce de la dénoncer malgré toutes les pressions.»
Xavier-Luc Duval a ajouté que l'Ordre des dentistes et celui des médecins accomplissent de nombreuses tâches, notamment l'enregistrement des dentistes/médecins, mais se penchent également principalement sur les plaintes pour négligence médicale, qu'elles proviennent du secteur privé ou public. «Si cela concerne le secteur privé, c'est le Dental Council ou le Medical Council qui radie le coupable, et si cela concerne le secteur public, les conseils envoient des recommandations à la Public Service Commission (PSC). Avec ce changement, neuf membres sur 14 seront des membres nommés à l'Ordre des dentistes, ce qui signifie que le ministre aura un contrôle total sur les décisions.»
En ce qui concerne l'Ordre des médecins, Kailesh Jagutpal a le contrôle sur 17 membres sur 23 qui sont des nominés au sein de son conseil d'administration. «Aujourd'hui, Jagutpal peut faire ce qu'il veut. Que ce soit en ce qui concerne l'enregistrement des médecins et des dentistes, y compris les étrangers, ainsi que les mesures disciplinaires qui seront prises.»