Congo-Kinshasa: Dysfonctionnement de la Magistrature, RDC - Professeur Emérite Gérard Balanda Mikuin Leliel félicite l'étude de Me Kalala Muena Mpala

Préface

Il y a quelques années seulement depuis que l'occasion m'a été donnée de faire connaissance du confrère KALALA MUENA MPALA, c'était bien avant notre admission au Barreau près la Cour Suprême de Justice.

En effet, la présence de nombreux Avocats de barreaux différents qui vivent dans la mégapole qu'est la ville de Kinshasa, ne facilite pas d'avoir des rapports en dehors de ceux d'ordre professionnel.

Je me souviens si ma mémoire est bonne, avoir rencontré pour la première fois ce confrère dans l'enceinte de la Cour d'Appel de Kinshasa/Matete où nous étions venus accomplir quelques devoirs professionnels.

Le retard à leurs offices des personnes dont lui et moi avions besoin, nous a donné l'occasion de nous approcher et d'échanger quelques propos.

De mon interlocuteur, mon premier étonnement fut de constater un intérêt et une connaissance approfondie de la musique congolaise et de l'environnement culturel des artistes et acteurs dans ce domaine.

En enchaînant d'apprendre qu'il avait fait son mémoire de licence à la faculté de droit de l'université de Kinshasa sur la musique congolaise, mon étonnement doublé de surprise, atteignait des limites sans bornes.

La conversation évolua vers le droit et les auteurs de nationalité congolaise qui commençaient à se démarquer en s'engageant dans l'effort de publications d'ouvrages dont les nouveaux titres étaient de plus en plus annoncés aux affiches des Cours et Tribunaux de la ville de Kinshasa.

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Ce fut avec plaisir le jour où, me trouvant pour une audience au siège de l'Ordre National des Avocats de la RDC, un confrère qui s'y trouvait cet après-midi-là, vint me tendre un document en précisant que c'était de la part de Maître KALALA MUENA MPALA dont le caractère de débateur m'était de plus en plus révélé lors de nos rencontres toujours fortuites aux parvis des juridictions de Kinshasa. Après un coup d'oeil rapide sur la couverture du document qui m'était remis, je fus étonné de voir mon nom remplacer à l'encre rouge, celui du premier avocat général de la république NKATA BAYOKO qui était déjà saisi sur la couverture indiquant l'auteur de la préface de l'étude de l'ouvrage intitulé « Quel avocat devant la Cour Constitutionnelle en toutes ses compétences ».

L'intérêt de l'étude consistait ainsi dans mon esprit, à préciser la catégorie d'avocats habilités par la loi, à exercer, c'est-à-dire, plaider et conclure devant la Cour Constitutionnelle car en effet, en RDC, c'est seulement en Avril 2016 que la Cour Constitutionnelle dont la création était annoncée déjà dans la loi fondamentale (condition) congolaise de 1960, a été installée.

Il était ainsi indirectement entendu que la catégorie d'avocats autorisés à exercer devant la Cour Suprême de Justice qui a été créée et fonctionne depuis 1968 ne pouvait plus se poser actuellement ; or, c'est aussi la question que soulève le confrère KALALA MUENA MPALA dans son étude.

La pratique et l'interprétation communément consacrées et admises jusque-là soutiennent que, tout Avocat inscrit auprès de Barreaux institués auprès des Cours d'Appel, était donc autorisé à exercer aussi devant la Cour Suprême de Justice, sauf en matière de cassation ; cette matière serait-elle seulement, réservée ou le monopole des avocats inscrits au tableau de cette juridiction comme d'aucuns le pensaient jusque-là ?

Le Confrère KALALA MUENA MPALA jette un pavé dans la marre en défendant et démontrant le monopole général des Avocats au Barreau près la Cour Suprême de Justice à partir de l'exégèse des dispositions de l'ordonnance-loi 068/247 du 10 Juillet 1968 portant organisation du Barreau, du corps des défenseurs judiciaires et représentation de l'assistance des parties devant les juridictions avec celles de l'ordonnance-loi 179/028 du 28 Septembre 1979 portant organisation du barreau, du corps des mandataires de l'Etat qui est actuellement en vigueur.

L'auteur rapporte également les dispositions des ordonnances-lois susmentionnées avec celles de l'article 96 alinéa 3 du RIC qu'il cite dans son épigramme selon « chaque Avocat relevant d'un Barreau installé au (Zaïre) Congo est tenu de choisir un domaine de la science du droit et de traiter un sujet de recherche... ».

A l'exclusion des Défenseurs judiciaires, seuls les avocats ayant prêté serment devant les Cours d'Appel sont autorisés à exercer en toutes leurs matières devant cette juridiction spécialisée ; le monopole ne leur serait pas seulement réservé en matière de cassation.

Telle est le point de vue, mieux, la thèse que soutient le confrère KALALA MUENA MPALA.

Ce point de vue est un éclairage important mais, il bouleverse l'entendement généralement admis et consacré jusqu'à présent.

Ce qui est dit concernant les Avocats de la Cour Suprême et l'étendue des matières admises et réservées à leur compétence, heurte, les intérêts des Avocats admis uniquement aux barreaux installés près des Cours d'Appels. En effet, cette catégorie d'Avocats devrait être écartée à l'avenir de prestations auprès de la Cour de Cassation, du Conseil d'Etat et de la Cour Constitutionnelle.

Nous sommes contraints de partager le nouveau point de vue que présente l'étude de ce confrère.

Nous sommes, toutefois, d'avis que, la nouvelle interprétation des textes qui exclue le ministère des avocats auprès de Cours d'Appel de l'exercice devant la Cour de Cassation, devant le Conseil d'Etat, et la Cour Constitutionnelle, conformément aux conclusions de l'analyse judicieuse et pointilleuse faite dans l'étude du confrère KALALA MUENA MPALA devra et mérite d'être portée à la connaissance des Avocats de tous les barreaux de la RDC.

Pour ce faire, une concertation entre le Bâtonnier National agissant après délibérations et muni d'un mandat du Conseil National de l'Ordre, avec le bureau du Conseil Supérieur de la Magistrature s'avèrerait utile.

Ensemble, les membres des instances administratives des Barreaux et de la justice congolaise pourront à cette occasion, élaborer une décision dont le contenu devra être porté à la connaissance des magistrats (tous) et des Avocats (tous) de la RDC.

Je tiens, cependant, à évoquer le privilège que la loi organique portant statut des magistrats du 10 Octobre 2006 semble conférer aux anciens magistrats de la Cour Suprême et du Parquet Général de la République, le privilège d'accéder directement au Barreau de la Cour Suprême de Justice, c'est-à-dire, sans passer par un des barreaux près les Cours d'Appel qui constitue le point de départ de la computation du délai d'inscription à un tableau.

La philosophie qui est à la base de ce privilège en faveur de ces hauts magistrats se fonde sur l'idée selon laquelle, étant associés en toutes matières au travail dévolu à la Cour Suprême de Justice, ils peuvent être considérés comme justifiant de connaissances suffisantes de la procédure de cassation et de toutes les matières relevant de la compétence de cette juridiction.

L'institution barreau des Avocats est régie par des dispositions légales propres si bien que, le Conseil de l'Ordre du Barreau de la Cour Suprême, n'accepte pas de prendre en considération les dispositions légales étrangères à celles applicables aux barreaux. C'est ainsi que, la condition d'ancienneté d'inscription aux tableaux des Avocats près les Cours d'Appel, condition requise pour accéder au barreau près la Cour Suprême de Justice leur accordant le privilège sus rappelé, n'est pas pris en considération.

En revanche, les Barreaux institués près les Cours d'Appel accordent aux anciens magistrats, les dispositions de l'ordonnance loi 79/028 du 28 Septembre 1979 portant organisation du barreau, du corps des Défenseurs judiciaires et des Mandataires de l'Etat, le bénéfice de l'exigence du stage auquel les avocats sont soumis.

La matière étant régie par des dispositions concernant le même domaine, il s'avère logique que les Conseils de l'Ordre de Barreaux près les Cours d4Appel respectent l'exception de dispense de stage prévu en faveur des anciens magistrats.

Notre argumentation se fonde sur l'entendement qu'il échet d'avoir des termes ou des titres « dispositions générales » ou « communes » qui figurent au début de tous les textes régissant des juridictions, à savoir la Cour de Cassation, le Conseil d'Etat et la Cour Constitutionnelle.

L'accès de ces trois juridictions doit, désormais, être réservé aux anciens avocats du barreau près la Cour Suprême de Justice lesquels Avocats, au regard de l'article 111 de la loi du barreau, sont également admis à exercer au Conseil d'Etat en toutes leurs matières et enfin, aux Avocats à la Cour de Cassation et au Conseil d'Etat, à la Cour Constitutionnelle d'agir.[1]

Nous profitons de cette occasion pour signaler quelques anomalies qui se constatent devant les Tribunaux de Grande Instance et les Cours d'Appel concernant la représentation des parties.

Les barreaux étant institués auprès des Cours d'Appel, seuls les avocats admis et qui y ont prêté serment sont autorisés d'une part à exercer auprès de la Cour d'Appel qui y a reçu leur serment et d'autre part, auprès du Tribunal de Grande Instance et Tribunal de Paix du ressort de la Cour d'Appel dont il est question sauf toutefois si l'avocat a aussi prêté serment donc, a été en même temps inscrit au tableau d'une autre Cour d'Appel où il se présente et y a installé un autre cabinet (art. 51).

Nous tenons enfin à relever ce qui se passe aussi souvent lorsqu'un avocat déclare retirer sa comparution en faveur du client toujours qu'il présente.

L'Avocat comparaît toujours à une audience en faveur du client qu'il représente à une audience en faveur de la partie qu'il a choisi.

Si l'avocat déclare retirer sa comparution, il ne peut le faire qu'avec l'accord préalable du client qui, ayant été ainsi prévenu, peut se choisir un autre avocat pour le défendre et le représenter à l'audience.

Conscient du boulevard de la situation et des intérêts des avocats qui se verront écartés du prétoire du Conseil d'Etat et celui de la Cour Constitutionnelle que certains avocats fréquentaient sans doute déjà ou espèrent fréquenter, nous réitérons qu'une telle mesure devrait émaner en attendant l'intervention du législateur, d'une haute instance réunissant les hauts représentants du Conseil Supérieur de la Magistrature et ceux des barreaux en l'occurrence, le Conseil National de l'Ordre.

Le mérite de l'étude de l'analyse faite par ce confrère forcent l'admiration de tous concernant spécialement la représentation des parties devant la cour de Cassation et le Conseil d'Etat en toutes matières ainsi que devant la Cour Constitutionnelle et les Cours d'Appel ainsi que de leurs ressorts respectifs.

Fait à Kinshasa, le premier jour du mois d'Avril 2023

Gérard BALANDA MIKUIN LELIEL

Professeur Emérite

Premier Président Emérite et Honoraire de la Cour Suprême de Justice

Avocat au Barreau près la Cour Suprême de Justice (Footnotes)

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