Les élections générales gabonaises ont lieu ce 26 août 2023. Les ONG Reporters sans frontières (RSF) et Tournons la page (TLP) s'inquiètent du respect des libertés au Gabon, notamment celle de la presse, avant ce triple scrutin. Laurence Ndong de TLP pointe également l'absence « des observateurs extérieurs, de l'Union africaine, de l'Union européenne, ou de pays tiers, ou d'organisations internationales », ce samedi.
Les élections générales au Gabon ont lieu ce 26 août 2023 : 846 000 électeurs sont attendus aux urnes pour la présidentielle, les législatives et les locales.
Mais l'inquiétude monte quant à la transparence du vote. Selon Reporters sans frontières (RSF), les autorités ont refusé toutes les demandes d'accréditation de journalistes étrangers désirant venir dans le pays couvrir le scrutin.
Des médias comme RFI, Le Monde, Jeune Afrique, ou encore Cameroun Tribune et Cameroun Actuel ont fait des demandes, sans obtenir d'autorisations. Certains journalistes ont même été refoulés en arrivant à Libreville.
« Une atteinte au pluralisme de l'information »
Des « décisions absurdes et une atteinte au pluralisme de l'information », selon RSF. Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique subsaharienne de l'organisation, s'insurge : « Il est totalement anachronique pour nous de priver les médias étrangers de la possibilité de couvrir un moment aussi important de la vie démocratique d'un pays où le besoin d'informations plurielles est crucial. »
Il poursuit, au micro de Sébastien Nemeth : « Les autorités disent que ce sont des élections ouvertes et démocratiques, mais pourquoi elles priveraient des représentants de médias internationaux de pouvoir entrer dans le pays alors ? C'est une fermeture que nous dénonçons et une fermeture inacceptable ».
RSF précise avoir demandé aux autorités de répondre à ce problème. « C'est également un très mauvais signal que les autorités envoient en direction d'une couverture indépendante, en direction de la transparence, en direction également du pluralisme de l'information », ajoute M. Marong.
Sadibou Marong conclut : « La présence de médias de tout horizon, ça devrait pouvoir permettre à tous les bords politiques de pouvoir se prononcer et de donner la parole à tout le monde. Mais en l'espèce, ce n'est pas le cas, les autorités ne sont pas très ouvertes. On a l'impression que les autorités gabonaises, actuellement, considèrent que certains médias les "empêchent de tourner en rond", et c'est la raison pour laquelle elles ont pris cette décision-là qui ne se justifie pas dans ce contexte. »
« Des violations du code électoral et de la Constitution »
De son côté, l'organisation de défense des droits humains Tournons la page a sorti un rapport sur la restriction de l'espace civique dans le pays depuis le dernier scrutin en 2016.
En sept ans, l'ONG a compté au moins 864 arrestations, 12 manifestations interdites ou réprimées, 13 journaux suspendus et 34 jours de coupure internet, le tout en violation des textes internationaux ratifiés par le pays.
Pour Laurence Ndong, membre de Tournons la page Europe, cette situation suscite de l'inquiétude dans le contexte électoral actuel. « Le Gabon a un bloc de constitutionnalité qui est impeccable, en ce sens que le Gabon a ratifié tous les instruments juridiques internationaux de défense des droits de l'homme, débute-t-il au micro de Sébastien Nemeth. Ce qui pose problème, c'est leur mise en application. Le Gabon ne se prive pas d'avoir dans ses textes des dispositions liberticides. Il y a une violation au niveau de la liberté de la presse, d'expression, la liberté de manifester, la liberté d'association. On voit que c'est à l'approche d'une élection comme celle qui va avoir lieu le 26 août. On craint que ces échéances soient de nouveau le théâtre de violences et de violations des droits humains ».
Laurence Ndong enchaîne : « Ce rapport vient aussi pour tirer la sonnette d'alarme et dire : on ne peut pas continuer. Depuis le lancement du processus électoral, il y a eu énormément de violations du code électoral et de la Constitution. Autre élément inquiétant, c'est le refus des observateurs extérieurs, de l'Union africaine, de l'Union européenne, ou de pays tiers, ou d'organisations internationales. Mieux, nous avons appris que même la presse internationale n'est pas admise au Gabon pendant la période électorale. Donc c'est vraiment une élection à huis clos. Pourquoi refuser à ce point que l'élection soit observée ? »
Sollicitées pour réagir à ce rapport, les autorités gabonaises n'ont pas répondu aux demandes de RFI.