Afrique: BRICS - Ordre et désordre mondial

analyse

Le centre du pouvoir mondial a déjà basculé. La fin de l'hégémonie des États-Unis, du dollar et du reste du G7 ne relève plus du fantasme ; elle est en marche. Le XVe sommet du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), qui s'est ouvert ce mardi 22 août à Johannesburg et s'est achevé hier, atteste que l'Est a pris le dessus sur l'Ouest, que les prises de position contre la dédollarisation sont monnaie courante. Mais est-ce un nouveau pacte au détriment des droits humains ?

Ramaphosa, Lula, Modi, Xi Jinping et Poutine (présent virtuellement) ont mis, cette semaine, de côté leurs différences pour affirmer à l'unisson : «Le développement n'est plus un privilège !»

Pour Ramaphosa, le BRICS pourrait mettre les intérêts de l'Afrique en avant, avant de rompre avec l'ère post-coloniale et néo-coloniale, grâce à un nouveau système financier international. «Les systèmes financiers et de paiement mondiaux sont de plus en plus utilisés comme des instruments de contestation géopolitique. La reprise économique mondiale repose sur des systèmes de paiement mondiaux prévisibles et le bon fonctionnement des systèmes bancaires, des chaînes d'approvisionnement, du commerce, du tourisme ainsi que des flux financiers», a insisté Ramaphosa. Poutine, en guerre contre l'Occident, a poussé le bouchon de la révolte anti-occidentale un peu plus loin : «Il faut en finir avec le néocolonialisme en cours et les pays qui promeuvent leur propre hégémonie.» Selon lui, la Russie demeure ouverte au «vrai» dialogue pour trouver une résolution à la guerre en Ukraine.

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Lula, qui marque un retour triomphal sur la scène mondiale, après le règne autocratique de Bolsonaro, mène sans doute le combat de sa vie : «Les pays du BRICS sont prêts à unir leurs efforts pour rechercher un cessez-le-feu immédiat en Ukraine. Tous méritent de vivre en paix.» Pour l'homme fort du Brésil, «la nécessité est de décoloniser nos économies et de porter une plus grande attention à la crise climatique».

Modi a mis en veilleuse ses relations intimes avec les États-Unis et la France pour encourager l'expansion du BRICS. Il a maximisé les «succès» du groupe durant ces 15 dernières années, notamment la Nouvelle banque de développement, une banque multilatérale de développement travaillant avec les marchés émergents, de même que le «filet de sécurité financière», qui agit comme un mécanisme de liquidité pour soutenir les pays du BRICS en difficulté avec les paiements.

Xi Jinping an mis l'accent sur l'importance de la stabilité et de la certitude, et a souligné la nécessité d'approfondir la coopération pour favoriser la croissance. Le président de la Chine a critiqué la nouvelle «mentalité de guerre froide à travers le monde». Selon lui, «les pays devraient respecter toutes les voies de modernisation». Comme ses homologues, il a martelé que le groupe BRICS devrait rester uni et jouer également un rôle clé dans la stabilisation du monde. En changeant de paradigme; où l'accent est moins mis sur la démocratie telle que définie jusqu'ici et les droits universels.

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Faits et chiffres. Le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud sont les cinq principales économies émergentes du monde.

Les pays du G7 et les pays du BRICS représentent 11 des 12 plus grandes économies du monde (avec la Corée du Sud).

La Chine et l'Inde ont les plus grandes populations parmi les pays du BRICS, avec environ 1,4 milliard d'habitants chacun. En revanche, les trois autres pays ont une population totale d'un peu plus de 400 millions de personnes. De plus, la Russie, la Chine, le Brésil et l'Inde figurent parmi les sept plus grands pays du monde en termes de superficie, tandis que l'Afrique du Sud se classe 25e. De même, bien que les quatre pays d'origine du BRICS figurent parmi les 12 plus grandes économies du monde en termes de PIB, l'Afrique du Sud se situe en dehors des 40 premiers et n'est que la troisième plus grande d'Afrique.

Malgré cela, l'économie de l'Afrique du Sud est considérée comme la plus diversifiée et avancée en Afrique, et sa position en tant que l'un des pays les plus politiquement stables de la région est considérée comme la raison de son inclusion au BRICS. Les variations de taille, de développement humain et de systèmes politiques signifient que les structures économiques de ces cinq pays diffèrent également grandement. Par exemple, les cinq pays ont des économies diversifiées, mais celle de la Chine repose en grande partie sur ses industries manufacturières, tandis que celle de la Russie dépend davantage de son secteur énergétique et celle du Brésil, des matières premières.

À n'en point douter : les relations entre les pays du BRICS ne sont pas toujours harmonieuses. Il y a souvent des conflits d'intérêts, notamment en Asie. Certains analystes russes considèrent les ambitions de la Chine en Asie centrale comme une tentative de supplanter l'influence de la Russie dans la région, tandis que les différends frontaliers entre l'Inde et la Chine ont créé des problèmes persistants (parfois violents) entre les deux voisins. Néanmoins, bien que les pays du BRICS aient accru leur influence internationale au cours des deux dernières décennies, qu'ils travaillent avec les pays du G7 individuellement ou dans le cadre d'organisations internationales plus vastes (comme le G20 ou l'ONU), le bloc se positionne comme le principal challenger des grandes puissances traditionnelles centrées en Europe et en Amérique du Nord.

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