Cote d'Ivoire: Filets sociaux - Ces petits soutiens financiers qui valent grand chez les bénéficiaires

Dans son village à Zossonkoi, dans la commune d'Anyama, Anne Chaké Ako avait une situation financière peu reluisante. Elle arrivait difficilement à joindre les deux bouts. La ménagère a retrouvé le sourire et repris espoir, en 2021, quand le projet "filets sociaux" a posé ses valises à Zossonkoi. « Les filets sociaux m'ont beaucoup aidée. Avec les 36 000 FCfa que je reçois tous les trois mois, je me suis lancée dans plusieurs petites activités commerciales. Je vends, selon les périodes, de l'Attiéké, du manioc, de l'Alloco, de la banane, des légumes, etc. Ça se passe bien pour moi », rapporte Anne Ako.

La dame dit devoir la nette amélioration de sa condition de vie au projet gouvernemental. Qui lui permet de vivre décemment et de scolariser ses enfants depuis trois ans. « Malheureusement, le projet arrive à terme pour la vague de bénéficiaires dans laquelle je suis. J'espère qu'on va me reconduire sur la liste des ayants-droit des trois prochaines années. Ma famille et moi avons vraiment besoin de cette aide », plaide Anne Ako.

Bénéficiaire, elle-aussi, des "filets sociaux", Emma Sahein a entrepris, avec son pécule, des activités commerciales dans son quartier à Adjouffou Belleville, dans la commune de Port-Bouët. Le projet gouvernemental de soutien financier aux couches vulnérables a été une véritable bouffée d'oxygène pour cette mère de sept enfants. « Il y a quelques années, des gens sont venus chez moi. Ils m'ont posé des questions sur mes conditions de vie et le nombre de mes enfants. Ils ont ensuite enregistré mes pièces. Des semaines après, j'ai reçu un appel téléphonique m'annonçant que je suis admise. J'ai demandé comment je peux être admise alors que je n'ai passé aucun concours. On m'a répondu que j'ai été sélectionnée pour bénéficier des filets sociaux. Et que je dois me rendre au centre pilote de Port-Bouët pour récupérer un téléphone et une puce », relate Emma Sahein.

Sept enfants à charge grâce aux filets sociaux

C'est donc sur le téléphone et le numéro d'appel qui lui ont été offerts, ce jour-là, que la quinquagénaire reçoit tous les trimestres, depuis 2018, les 36 000 FCfa destinés aux bénéficiaires du programme d'assistance financière. « Avec les 36 000 FCfa qu'on m'envoie tous les trois mois, j'ai réussi à me stabiliser. Mes enfants vont à l'école, je paie régulièrement ma maison. Grâce à l'argent des filets sociaux, je vis mieux, mes soucis de mère célibataire avec sept enfants à charge ont diminué », témoigne Emma Sahein. Qui exerce désormais dans la vente de sandwichs de pain sucré à l'omelette et de viande de porc, sous diverses formes de cuisson.

La bénéficiaire assure que les filets sociaux lui ont permis de mieux vivre, ces cinq dernières années. Elle note aussi que des personnes de son entourage, grâce au projet, arrivent aujourd'hui à garantir leur "sac de riz". « A mes soeurs, je tiens à dire que les 36 000 FCfa qu'on nous donne ne doivent pas servir uniquement pour nos ventres. Nous devons chercher à entreprendre et multiplier ça. Si on travaille avec cet argent, il peut, non seulement, nous aider pour la popote, mais aussi pour faire face aux autres dépenses », conseille, par ailleurs, dame Emma.

Autre bénéficiaire, même vision entrepreneuriale. Annick Bendé Kamenan fait partie des personnes qui ont su fructifier les modiques sommes reçues des filets sociaux. La jeune dame, bientôt la trentenaire, dit avoir reçu, un jour de 2019, la visite d'agents du projet à domicile à Adjahui-Coubé dans la commune de Port-Bouët. « Quand ils sont arrivés, j'étais avec mes petites soeurs. Ils nous ont interrogées sur nos conditions de vie. Et qu'est-ce que je faisais, en tant qu'ainée, pour m'occuper de mes quatre petits frères et soeurs, puisqu'on vivait seuls car orphelins de mère. J'ai répondu qu'on se débrouillait en faisant de petits boulots de servantes et en aidant des femmes à vendre. Quand ils sont repartis, ils m'ont appelée quelques mois après pour m'informer que j'étais éligible au projet "filets sociaux". Les agents m'ont donné rendez-vous au centre social, où ils m'ont remis un téléphone et un numéro sur lequel j'allais désormais recevoir gratuitement de l'argent de l'État », explique Annick Kamenan.

« J'ai commencé mon activité avec 20 000 FCfa »

Avec les premiers 36 000 FCfa perçus, Annick se souvient avoir épongé le mois de loyer de 10 000 FCfa qu'elle devait au propriétaire de la petite baraque qu'elle habitait avec ses frères et soeurs. Les 26 000 FCfa restants ont servi à faire face aux besoins de la maisonnée. Le deuxième versement, poursuit la jeune dame, a été fait six mois après. « C'était une double dotation de 72 000 FCfa. C'était assez consistant pour moi. Je me suis tout de suite dit que je pouvais entreprendre avec cet argent. J'avais une idée de ce que j'allais faire, puisque j'aidais déjà des femmes à vendre. J'ai opté pour la vente d'Attiéké poisson fumé (Apf). J'ai utilisé juste 20 000 FCfa pour débuter l'activité à Koumassi Bia-Sud. Grâce à Dieu, ça a marché. Jusqu'à ce jour, les choses vont bien pour moi. Mon commerce a grandi », révèle la jeune diplômée, titulaire d'un Brevet de technicien supérieur (Bts) en Gestion commerciale.

La demoiselle confie d'ailleurs que c'est avec le reste des 72 000 FCfa qu'elle a payé son droit d'examen du Bts, à hauteur de 10 500 FCfa, puis des documents scolaires dont avait besoin sa petite soeur. « Grâce aux bénéfices de cette activité et des autres versements que je reçois tous les trois mois, j'ai pu payer ma scolarité, ainsi que celle de ma petite soeur. Aujourd'hui, on vit bien, et ça dure depuis trois ans », soutient Annick Kamenan.

La jeune dame, enceinte de son premier bébé, fait toutefois savoir que depuis octobre 2022, elle ne perçoit plus de transfert des filets sociaux. Chaque cycle de paiement dure en effet trois ans.

« Pour combler le vide, les concepteurs du projet forment et aident les bénéficiaires à mettre en place des Associations de valorisation de l'entraide communautaire (Avec). C'est désormais avec l'Avec qu'on continue de mener nos activités en épargnant ou en prenant des prêts. La caisse de l'Avec permet de soutenir celles ou ceux parmi nous qui ont des soucis de famille, de santé ou dans leurs activités », évoque avec assurance la future mère.

Témoignage tout aussi éloquent, celui de Colette Amenan Kouadio. Cette mère de cinq enfants se souvient de la précarité dans laquelle elle vivait dans un passé récent. « Les filets sociaux m'ont sauvée. Ça n'allait pas chez moi. Je vivais une vie triste. J'étais une femme abandonnée. Le projet m'a permis de scolariser mes enfants. Deux ont eu le Bepc l'an dernier et un autre a eu son entrée en sixième cette année (...). J'ai désormais une nouvelle vie et un nouvel espoir grâce au commerce d'Attiéké et de poulets que j'ai développé grâce aux transferts que je reçois », rapporte-t-elle.

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