Malgré le cadre légal défini et les nombreuses opportunités qui se présentent, les opérateurs du secteur des mines ne peuvent investir, sans la régularisation des permis et l'application des nouveaux textes de loi, selon la FOOM.
Les grandes compagnies multinationales du domaine minier sont prêtes à investir à Madagascar. La délégation sud-coréenne l'a confirmé hier au Novotel Ivandry, lors d'une cérémonie de signature d'accord de partenariat entre l'EDBM (Economic Development Board of Madagascar) et son homologue de la Corée du Sud.
Cette signature a été suivie d'une session de rencontres B2B, auxquelles ont participé sept grandes compagnies sud-coréennes opérant dans les domaines des mines, de l'agriculture et des technologies. La séance a vu la participation du ministère des Mines et de la chambre des Mines, des représentants du secteur privé, notamment des membres de la FOOM (Fédération des opérateurs miniers malagasy), témoignant de l'engagement de la partie malgache dans la coopération internationale.
Un constat encourageant émerge de ces échanges : les investisseurs sud-coréens montrent un grand intérêt pour investir à Madagascar, partager leurs connaissances techniques et collaborer activement, notamment dans le secteur des mines. Malheureusement, des contraintes majeures empêchent le développement du secteur minier, selon la FOOM. Celle-ci réclame une relance des activités minières, impliquant un traitement de toutes les demandes de permis miniers et un assainissement du secteur.
Blocages énormes
D'après le président de la FOOM, Haja Ralambomanana, les opérateurs, qu'ils soient nationaux ou internationaux, ne peuvent se lancer dans les investissements pour la recherche et l'évaluation des potentiels en gisement, si le secteur n'affiche pas une stabilité.
« On peut contribuer à stabiliser ce secteur, par l'assainissement. Il y a des permis miniers qui sont mis en veille car ses titulaires n'ont pas payé les frais d'administration, depuis la série de crises que nous avons traversées. L'Etat devrait fixer un délai de six mois, par exemple, pour que ces titulaires de permis puissent régulariser ces frais d'administration. Nous avons déjà un cadre légal défini. Il y a des balises telles que le Code minier, la loi sur les investissements, le Pacte d'industrialisation, etc. Mais comment mettre en vigueur ce cadre légal ? Peut-on payer les frais d'administrations actuellement ? C'est ce que nous réclamons actuellement. Nous devons pouvoir payer ces frais. Il faut que tout cela soit clair, pour que les opérateurs puissent s'investir et investir dans le secteur, trouver des partenariats, développer leurs activités. Pour l'instant, même si on peut discuter avec les partenaires, on ne peut rien faire, car le permis n'est pas encore valide, sans paiement des frais d'administration », nous a expliqué le président de la FOOM.
D'après ses dires, si les opérateurs ont cumulé des arriérés sur ces frais d'administration, c'est à cause des crises successives qui ont empêché la mise en oeuvre des activités productives et par ricochet, de l'allocation des ressources par les opérateurs économiques privés.
Profiter de la stabilité
Pour les opérateurs économiques regroupés au sein de la FOOM, Madagascar devrait profiter de la situation actuelle, pour relancer certains secteurs d'activités pouvant servir de levier de la croissance économique. En effet, la crainte d'un avenir incertain persiste actuellement pour ces opérateurs. « Nous voulons qu'il y ait une stabilité, mais aujourd'hui, personne ne peut garantir cette stabilité à Madagascar, surtout à la veille des élections. Il faut que les opérateurs travaillent si l'on veut que l'économie se développe. Il n'y a pas de temps à perdre », soutiennent les membres de la FOOM.
Outre la relance du paiement des frais d'administration, cette fédération martèle que l'Etat doit également traiter les demandes de permis sans exception. « Il n'y a pas de raison de procéder à des traitements partiels, car le cadre légal est déjà clair. Le décret d'application des lois est en gestation, mais le paiement des frais d'administration minière ne doit pas forcément attendre la sortie de ce décret », ont-ils ajouté.
Besoin d'inclusion
Par ailleurs, la FOOM demande également à participer à l'élaboration du projet de loi de finances initiale 2024, qui est actuellement en préparation. D'après ses membres, la Fédération doit participer au dialogue public-privé, car la disposition 2015/915 n'est plus à jour. « Il existe désormais de nombreux acteurs concernés, qui doivent prendre part aux décisions. Nous avons tous les arguments incontestables pour soutenir que si Madagascar veut un secteur minier actif et développé, il faut supprimer les droits d'accises, les droits de sorties et les autres parafiscalités qui représentent un frein au développement du secteur et qui créent des conditions invivables », a déclaré le président de la FOOM.
Opportunités
Certes, les compagnies multinationales intéressées par les mines de Madagascar sont nombreuses. Vis-à-vis de la Corée du Sud qui figure parmi les dix pays au monde ayant une vision large de l'économie, Madagascar pourrait tirer des leçons pour stimuler son propre développement économique. En effet, en Corée du Sud, les énergies fossiles contribuent à hauteur de 37% de la production énergétique, tandis que le nucléaire en représente 10%. Cette expérience pourrait ouvrir des opportunités pour Madagascar.
Parmi les voies à explorer, il est souligné que la mise en place d'une centrale nucléaire nécessite un financement de seulement 51 millions d'euros, comparé aux subventions, par exemple, de 1 400 milliards d'ariary allouées à l'électricité à Madagascar. Ces portes grande-ouvertes pourraient potentiellement transformer l'économie malgache. La délégation coréenne se concentre notamment sur la production de batteries, un secteur d'une importance croissante dans le contexte mondial actuel. La Corée du Sud est également un acteur majeur dans le projet Ambatovy pour la production de nickel à Madagascar. Les investisseurs sud-coréens expriment leur intérêt pour les produits connexes tels que le graphite et le lithium, qui sont essentiels à la production de batteries. Bref, il s'agit d'une des initiatives qui ne pourront pas avancer, si l'Etat n'oeuvre pas pour la relance des permis et des activités minières, selon les membres de la FOOM.