Mali: Consultations du Conseil de Sécurité sur le Mali - Briefing par El-Ghassim Wane, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali

Réunion du Comité technique d'experts de la MINUSMA et du Gouvernement pour évaluer la première phase du retrait, marquée par la fermeture des camps d'Ogossagou, Ber, Goundam et Ménaka, et leur transfert aux autorités civiles maliennes.
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Je vous remercie, Madame la Présidente, pour l'opportunité qui m'est offerte ce jour de faire le point sur les avancées faites s'agissant du processus de clôture de la MINUSMA à la suite de la décision, prise le 30 juin, de mettre un terme à son mandat, conformément à la demande des autorités maliennes. Mon propos se veut un complément à la Lettre du Secrétaire général en date du 18 août.

Immédiatement après l'adoption de la résolution 2690, qui demande que la fermeture de la Mission soit achevée d'ici au 31 décembre 2023, la MINUSMA, en coordination avec le Secrétariat des Nations unies, a établi un groupe de travail intégré afin d'élaborer un plan de réduction et de retrait de la Mission. Ce plan prévoit un retrait et un rapatriement du personnel ainsi que des équipements et matériels déployés dans les zones d'opération de la MINUSMA, selon un calendrier et un ordre séquentiel précis, tout en gardant à l'esprit l'exigence d'un processus ordonné et conduit en toute sécurité.

Given the centrality of cooperation with the Malian authorities for the efficient conduct of this undertaking, on 3 July, I met with the Minister of Foreign Affairs of Mali to discuss requirements for a safe and orderly process. Subsequently, coordination mechanisms, comprising both the Transitional Government and MINUSMA representatives, were put in place at technical and political levels to coordinate all aspects of the withdrawal and ensure that the 31 December deadline is respected. I commend the Malian authorities for the cooperation and support they have extended so far.

Madame President,

Closing a Mission built over a decade within a period of six months is a very complex and ambitious endeavor. In concrete terms, it entails the repatriation of 12,947 uniformed personnel, the separation of 1,786 civilian staff, the repatriation and/or relocation of a load of approximately 5,500 sea containers of Contingent and United Nations Owned Equipment and almost 4,000 vehicles, as well as the closure and handover of 12 camps and one temporary operating base to Malian civilian authorities.

The task is made even more challenging by a host of other constraints linked to geography, climate, logistics and infrastructure. To this, one should add the serious risks associated with the prevailing security situation.

As outlined in the Secretary-General's Letter, the drawdown and closure of the Mission is unfolding in two phases through 31 December 2023, followed by the liquidation period, which will begin in January 2024.

The first phase of the drawdown and the withdrawal began on 17 July, focusing on the closure of the smallest and furthest outposts from our super camps in Timbuktu, Gao, and Mopti and shrinking our (geographical) footprint by 25 percent. On 25 August, three days ago, we completed this first phase with the closure of the Menaka base. Earlier this month, we successively closed the temporary operating base in Ogossagou, in the Bandiagara region of Central Mali, as well as the camps in Ber and Goundam, in the Timbuktu region.

The departure of MINUSMA from each of these camps was accompanied by the signing with the designated civilian representatives of the Malian authorities of documents that attest to the state of the vacated camps and the fulfillment of the Mission's environmental obligations. In this respect, I would like to emphasize that the Mission is making all reasonable efforts to complete environmental remediation and removal of hazardous materials prior to returning premises to the authorities, in spite of serious time constraints and the progressive reduction of the security umbrella under which we are operating.

Additionally, negotiations are underway to finalize an overarching Framework Agreement that will spell out the obligations of the two Parties, in line with relevant United Nations instruments and policies.

Des avancées notables ont été accomplis à ce jour, et nous restons sur la bonne voie pour la clôture de la Mission d'ici au 31 décembre 2023. Toutefois, des difficultés se sont présentées dans la mise en oeuvre de cette première phase du plan de retrait.

À cet égard, l'expérience de la fermeture du camp de Ber a été révélatrice. Le dernier convoi de casques bleus, d'équipements et de matériels qui s'est retiré de Ber pour rejoindre la ville de Tombouctou a mis 51 heures pour parcourir les 57 kilomètres du trajet en raison de la nature du terrain, qui est peu favorable - une situation aggravée par la saison des pluies - et de l'insécurité. Ce convoi a été attaqué à deux reprises par des éléments armés non identifiés, blessant quatre casques bleus et endommageant trois véhicules, avant d'arriver à Tombouctou.

Le retrait de Ber s'est également avéré difficile sur le plan politique, les autorités maliennes et les Mouvements signataires de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali étant en désaccord sur le sort à réserver au camp après le départ de la Mission. Pour sa part, et en raison de l'extension des affrontements à la zone de Ber et des risques que cette situation posait pour la sécurité des casques bleus, la Mission a dû avancer son départ du camp, qui est intervenu le 13 août au lieu du 15 août comme initialement envisagé.

De même, les convois transportant du matériel et des équipements de nos bases de Goundam, dans la région de Tombouctou, et d'Ogossagou, dans le Centre du Mali, ont été la cible d'engins explosifs improvisés, tandis que le dernier convoi de Gao à Ménaka a également été pris pour cible par des éléments armés non identifiés. Heureusement, cette attaque n'a fait ni dégâts matériels ni pertes en vies humaines.

Avec la fin de la phase I, nous avons rapatrié un total de 1 096 personnes en uniforme dans leurs pays respectifs cependant que 79 conteneurs de matériels et d'équipements sont déjà été transférés hors du Mali. Une nouvelle réduction du personnel en uniforme est attendue à la fin du mois de septembre. En ce qui concerne le personnel civil, et conformément au statut et au règlement du personnel des Nations unies, 291 membres du personnel civil (y compris des Volontaires des Nations unies), soit environ 33% de nos effectifs civils, seront séparés d'ici au 30 septembre 2023.

Madame la Présidente,

La deuxième phase du processus de réduction des effectifs et de retrait, que nous entamons maintenant, se déroulera jusqu'au 15 décembre 2023. Elle se concentrera sur la fermeture de 6 bases (Tessalit, Aguelhok et Kidal, dans leNord du Mali, Douentza et Mopti, dans le Centre du Mali, et Ansongo, dans le Nord Est). Le personnel, les équipements et matériels concernés seront redéployés dans les super camps de Tombouctou, Gao et Bamako, avant d'être rapatriés dans leurs pays respectifs.

Cette phase sera extrêmement difficile. Les convois devant évacuer le personnel, les équipements et matériels de Tessalit, d'Aguelhok et de Kidal vers Gao, par exemple, devront parcourir 563 km dans chaque sens pour Tessalit, 415 km pour Aguelhok et 352 km pour Kidal. Il faudra au moins 1 050 camions pour transporter tous les équipements et matériels appartenant soit aux contingents soitaux Nations unies. A cela s'ajoute le fait que le terrain est difficile et l'insécurité omniprésente.

Le retrait du matériel et des équipements de Tombouctou à Mopti, outre les problèmes de sécurité, se heurte à des contraintes logistiques. Nous ne pourrons transporter plus de 6 conteneurs par jour en utilisant des barges sur le fleuve Niger durant la période navigable qui va d'août à novembre de chaque année. Avec de telles limitations, le retrait des 2 000 chargements prévus de Tombouctou vers des zones de transit à l'étranger va nécessiter l'identification d'itinéraires supplémentaires.

La situation au Niger a également un impact sur notre plan de retrait qui repose sur l'utilisation de zones de transit à Cotonou et à Lomé. Il est essentiel que nous puissions transporter des équipements et des matériels à travers le Niger jusqu'à ces ports pour leur rapatriement subséquent vers les pays contributeurs de troupes et de personnels polices concernées.

Outre les contraintes logistiques et de sécurité, la fermeture de la MINUSMA comporte également une dimension politique. Cela était prévisible, étant donné que la présence de la Mission dans ces avant-postes du nord a contribué au respect par les parties signataires du cessez-le-feu et des arrangements sécuritaires, tout en soutenant également la mise en oeuvre de l'Accord pour la paix et la réconciliation de 2015.

Ce retrait intervient dans un contexte marqué par la paralysie des structures de suivi de l'Accord de paix, qui ne se sont pas réunies depuis novembre 2022, et par un grave déficit de confiance entre les Parties. Sans surprise, les Parties ont adopté des positions divergentes sur le sort des camps qui seront libérés par la Mission. À cet égard, les autorités de transition ont signifié à la Mission qu'elles entendent reprendre tous les camps de la MINUSMA après leur évacuation, soulignant que l'Accord de paix n'abroge pas la responsabilité de l'État d'assumer le contrôle de son territoire afin de protéger les populations et d'assurer la sécurité. Les Mouvements signataires, en revanche, notamment la Coordination des Mouvements de l'Azawad (CMA), ont invoqué les arrangements sécuritaires de 2014 pour objecter au déploiement des forces armées maliennes dans les zones qu'ils contrôlent et insister sur la nécessité d'opérer dans le cadre de l'Accord de paix.

Dans le contexte de la résolution 2690, la MINUSMA a rappelé et continue de rappeler à toutes les parties prenantes le calendrier serré du départ de la Mission, et les paramètres qui sous-tendent la fermeture de ses camps, y compris le fait que les bases sont légalement transférées à l'État malien.

En outre, la Mission continue à encourager les Parties à parvenir à un accord pour éviter des incidents inutiles, dont les conséquences pourraient être considérables. De tels incidents compliqueraient en effet le processus de retrait, affecteraient négativement le travail des entités onusiennes après la clôture de la Mission, et compromettraient sérieusement les perspectives de reprise de la mise en oeuvre de l'Accord de paix, qui est une pierre angulaire de la stabilisation à long terme du Mali. Il n'est point nécessaire de souligner l'urgence de la situation, étant donné le délai très court imparti pour la clôture de la Mission et le peu de flexibilité dont nous disposons dans notre processus de retrait.

Il est encourageant de constater que les parties prenantes ont conscience de la délicatesse du processus et de la nécessité de le gérer avec prudence. Les autorités maliennes, lors de plusieurs réunions avec moi ainsi qu'avec le Secrétaire général adjoint Jean-Pierre Lacroix lors de sa visite au Mali, il y a deux semaines, ont souligné qu'il n'y avait aucune intention d'entrer en confrontation avec les Mouvements signataires, exprimant leur engagement au dialogue pour résoudre tout problème qui pourrait survenir et les efforts déployés à cet effet. De même, les Mouvements ont également exprimé leur volonté de résoudre les différends de manière pacifique et de contribuer à la création de conditions nécessaires à la reprise du processus de paix. Il est maintenant du devoir des Parties de transformer ces expressions de bonne volonté en mesures concrètes, afin d'éviter une crise tout aussi mal venue que potentiellement dangereuse, et de faire avancer la cause de la paix et de la réconciliation au Mali, prenant en cela appui sur les avancées enregistrées ces huit dernières années, y compris la fin de la belligérance armée.

La semaine dernière, une initiative a été lancée par des membres éminents des communautés arabe et touaregue à Bamako pour faciliter le dialogue et l'entente entre les autorités de transition et les Mouvements signataires, afin d'éviter l'escalade et de préserver l'Accord de paix.

Madame la Présidente,

Ces développements liés au retrait de la Mission mettent en relief l'importance du travail effectué en collaboration avec les autorités maliennes de transition sur le transfert des tâches précédemment effectuées par la Mission. Du 2 au 4 août, la MINUSMA, de concert avec le Gouvernement malien, a animé une table ronde de trois jours sur les activités de soutien à la transition, au processus de paix, à la restauration de l'autorité de l'Etat, à la promotion et à la protection des droits de l'homme et à d'autres questions transversales. L'équipe pays des Nations unies et le Bureau des Nations unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel, l'Union africaine, la CEDEAO et la Mission de police de l'UE (EUCAP) ont pris part à cette rencontre.

L'objectif était de de mieux expliquer le travail accompli et d'évaluer les perspectives et les possibilités pratiques de poursuite des tâches conduites jusqu'ici par la MINUSMA, en premier lieu par les autorités maliennes et, le cas échéant, par l'équipe-pays des Nations unies et par d'autres parties prenantes. Les représentants du gouvernement ont réaffirmé qu'ils assumeraient leurs responsabilités. Les membres de l'équipe-pays des Nations unies ont exprimé leur volonté de soutenir les autorités de Transition sur la base du Cadre de coopération des Nations unies pour le développement durable du Mali, et indiqué qu'ils reprendraient certains des programmes résiduels de la MINUSMA, tout en soulignant la nécessité de ressources supplémentaires.

Des discussions sont en cours sur la manière de consolider et de préserver les résultats obtenus dans le cadre du soutien apporté au gouvernement et au peuple maliens, tout en cherchant à maintenir un environnement propice à l'engagement à long terme des Nations unies au Mali et dans la région dans son ensemble.

Toutefois, des difficultés subsisteront en raison du calendrier serré de retrait de la Mission, ainsi que de la cessation immédiate de son mandat substantiel en vertu de la résolution 2690, qui n'a pas permis d'envisager une période de transition proprement dite. Dans ce contexte, il est important de reconnaître que certaines tâches ne pourront pas être transférées de manière effective.

Alors que la MINUSMA entame son dernier chapitre au Mali, je ne saurais conclure mon propos sans exprimer ma gratitude aux pays contributeurs de troupes et de personnels de police pour leur engagement remarquable.

Je rends hommage à tous nos casques bleus, dont plusieurs ont fait le sacrifice ultime pour la cause de la paix et de la stabilité au Mali.

La MINUSMA a eu un impact tangible sur le terrain et apporté un soutien inestimable aux autorités et au peuple maliens, dans ce qui s'est avéré être l'une des opérations de maintien de la paix les plus difficiles jamais entreprises par les Nations unies.

La MINUSMA quitte le Mali, mais les Nations unies, par l'intermédiaire de leurs agences, fonds et programmes, y restent. Leur travail n'a jamais été aussi vital qu'aujourd'hui. Je me félicite des assurances données par les autorités maliennes quant à leur engagement à assurer la sécurité du personnel des Nations unies. J'appelle les États membres à envisager des contributions volontaires supplémentaires à l'équipe-pays des Nations unies et aux acteurs humanitaires pour leur permettre de continuer à prêter assistance aux populations dans le besoin et à soutenir les efforts de développement au Mali.

Je vous remercie.

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