- Les charrettes tirées par des ânes sont le moyen de transports le plus utilisé dans la commune de Koumpentoum, dans la région de Tambacounda (est).
De la gare routière aux quartiers les plus éloignés du centre-ville en passant par le marché central, ce moyen de locomotion s'impose par sa disponibilité et ses tarifs abordables.
Aussi est-il impossible de circuler dans les rues de Koumpentoum sans croiser ces véhicules, une partie du décor de la ville, de sa carte postale même, pourrait-on dire.
Les charrettes attelées à des ânes sont visibles dans les endroits les plus fréquentés de la capitale départementale - la gare routière, le marché, etc. Les conducteurs sont constamment à la recherche de passagers ou de marchandises à transporter. Les tarifs varient selon la distance du trajet ou les produits à transporter.
Faisant partie de la famille des équidés, l'âne s'adapte bien au transport de marchandises, grâce à sa force et à son endurance. Le prix de l'animal peut grimper jusqu'à 100.000 francs CFA, selon les éleveurs et les usagers de ses services.
La plupart des ânes utilisés dans le transport des marchandises et des passagers sont élevés dans le département de Koumpentoum. Certains éleveurs locaux en possèdent des dizaines de têtes.
Souvent peu spacieuses, les charrettes tirées par des ânes peuvent transporter "jusqu'à 500 kilos de marchandises", selon la Société industrielle sahélienne de mécanique, de matériels agricoles et de représentation (SISMAR). La SISMAR estime que le prix d'une charrette est d'environ 65.000 francs CFA.
Une activité qui traverse les âges
Les charretiers se réunissent dans plusieurs endroits de la ville de Koumpentoum. Certains d'entre eux s'installent sur l'emprise du chemin de fer, à quelques dizaines de mètres de la route nationale. Ils cohabitent ici avec des vulcanisateurs, des boutiquiers, des gargotières et des mécaniciens.
L'un d'eux, Alassane Dramé, dit travailler pour le compte du propriétaire de la charrette et de l'âne. Le charretier est vêtu d'un t-shirt dont on arrive difficilement à distinguer la couleur et un pantalon noir usé par la sueur et la chaleur.
Assis sur sa charrette stationnée au milieu de plusieurs autres sans ordre apparent, M. Dramé, la trentaine bien révolue, guette les passagers. Il espère les voir arriver avec des bagages à transporter. La clientèle qui vient souvent faire des emplettes dans les boutiques et au marché de Koumpentoum est souvent obligée de faire appel aux charretiers.
"Nous transportons parfois des passagers, surtout ceux qui viennent des villages environnants. Quand ils descendent à la gare routière avec des bagages, ils ont besoin de charrettes pour rejoindre leur village ou le marché central", explique Alassane Dramé.
Selon lui, les charretiers installés sur les rails n'ont pas choisi cet endroit par hasard. C'est un passage incontournable pour les gens venant des villages situés près de la ville, qui ont souvent du sucre, du charbon de bois, des céréales (mil, maïs, etc.) ou de l'arachide à transporter.
"Les bagages sont transportés par des voitures. Les charretiers les acheminent ensuite au marché, dans les quartiers de la ville ou les villages", explique le charretier. On l'entend difficilement à cause du vacarme provenant des ateliers de menuiserie métallique et du vrombissement des motos et des voitures en provenance de différents endroits.
Des adolescents, des jeunes et des personnes âgées s'adonnent à la conduite des charrettes. Ahmet Coulibaly, âgé de 12 ans, est un élève de sixième du collège Sémou Niang, qui gagne sa vie en conduisant ce moyen de transport très prisé des Koumpentoumois. Il tient solidement la bride pour conduire la charrette sur laquelle sont entreposées trois bassines remplies de glace.
L'écolier pratique ce métier à la demande de sa mère, qui lui remet tout l'argent gagné à la fin de la journée, assure-t-il.
Assis sur sa charrette, le visage détendu, un large sourire aux lèvres, Ahmet Coulibaly ne conduit la charrette que durant les vacances et pendant les jours où il ne va aider ses parents dans les champs.
Le jeune conducteur de charrette travaille de 8 heures à 13 heures, heure à laquelle il retourne à la maison pour prendre son repas et revenir travailler jusqu'au crépuscule. "Ce boulot peut me rapporter jusqu'à 5.000 francs par jour, quand ça marche bien", dit-il.
Un gain quotidien de 5.000 francs CFA
"C'est avec une partie de cet argent que ma mère prépare la rentrée des classes pour mes frères et soeurs", ajoute Ahmet Coulibaly.
Une lanière en main, il tapote sur la charrette et se retourne de temps en temps... "Aujourd'hui, avec ces bassines de glace, j'ai gagné 600 francs, c'est une chance. Il y a moins de passagers pendant l'hivernage", renseigne-t-il.
Ibou Mbaye, un sexagénaire, s'est lancé dans cette activité depuis une dizaine d'années. Cultivateur, il conduit sa charrette à temps plein pendant la saison sèche. En raison des travaux champêtres, il réduit ses heures de travail comme charretier.
Cette activité lui permet de résoudre beaucoup de problèmes financiers. "C'est le boulot, à part les travaux champêtres, qui me permet de nourrir ma famille depuis plus de dix ans", raconte M. Mbaye.
Adossé à sa charrette, il détaille les marchandises qu'il a l'habitude de transporter. Il gagne en moyenne 5.000 francs CFA par jour, dit-il.
Pour gagner mieux, Ibou Mbaye a trouvé l'astuce: chercher la collaboration des boutiquiers. "Il arrive que l'un d'entre eux m'appelle dès que je sors de chez moi pour me demander de lui transporter des marchandise", lance-t-il.
Les marchandises peuvent être des sacs de riz ou d'oignon, du lait, de la boisson ou d'autres produits. Les sacs sont transportés à raison de 100 francs CFA l'unité. "Dans la journée, il m'arrive de faire trois à cinq voyages à l'intérieur de la ville", souligne Ibou Mbaye.
À Koumpentoum, l'âne exerce une activité socioéconomique très importante dans les communes confrontées à l'enclavement et au manque de moyens de transports. L'animal est en même temps utilisé pour les travaux champêtres et constitue le gagne-pain de nombreux ménages.