Madagascar: Toamasina - Fête foraine, la roue tourne

La foire de Toamasina installée entre la plage et le « bord » est un lieu de festivité incontournable. Ouverte de 8h à 21h, elle attire les Malgaches en quête de divertissement. Elle vient d'être déplacée en raison d'un projet d'urbanisme.

Nestor, 21 ans, vient d'effectuer un salto depuis une nacelle de la plus grande roue, provoquant rires et encouragements autour de lui. Les spectateurs vivent pourtant sans le savoir la dernière soirée de cette fête foraine car dès le lendemain, jeudi 24 août, elle a commencé à être démontée.

En deux jours, la plage a fait place nette et de hautes palissades se sont dressées pour séparer le bord de la route. Il n'est plus possible de venir se promener à cet endroit. La faute au projet d'urbanisme « Miami», décidé par le gouvernement : la plage doit être vidée afin d'accueillir la construction de nouveaux magasins en dur.

Pour Nathan, 20 ans, « le président développe la ville mais oublie le social ». Selon lui, le projet est trop grand pour la ville de Toamasina et peu adapté à la population locale.

Quant à Silvano, 23 ans, travailleur chargé de l'installation des palissades, il s'attriste de la situation : « Ça dérangeait la commune que les forains soient là ». Cependant, les attractions n'ont pas vocation à être supprimées puisqu'elles ont été déplacées 200 mètres plus loin, sur la plage en direction du port.

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Malgré tout, cette décision a déplu aux forains. Au coeur du chantier de déconstruction, une vendeuse de pop-corn et glace hausse le ton : « Ça fait douze ans que je suis là. On dégage les quartiers pauvres et on nous oblige à partir sinon des bulldozers détruisent tout ! » Le maire de Toamasina, Nantenaina Herilala Rakotonirina, défend le projet : « Il va permettre d'augmenter le nombre de touristes, entraînant des flux économiques dans toute la ville.

C'est donc un projet important pour les travailleurs». En attendant, Nestor fait tourner une dernière fois la roue à l'aide de son corps : à mains nues il grimpe au sommet puis se suspend aux nacelles pour les faire descendre. La manoeuvre semble simple mais peu sans doute s'y risqueraient.

La roue culmine en effet à une dizaine de mètres de haut, la chute pourrait être mortelle. Il faut bien gagner sa vie et plusieurs hommes, parfois mineurs, se relayent à ce poste. Aussi étonnant que cela puisse paraître, aucun accident ne semble être à déplorer selon Philibert, habitué des lieux. « Ils ne sont jamais tombés », assure-t-il en rigolant. La question de la sécurité se pose aussi du côté des clients.

Une fois monté dans la nacelle une petite chaîne sert de ceinture. Ce dispositif ne suffit pas à rassurer Miola Kaylan, maman venue du centre-ville avec ses trois enfants: « Je préfère qu'ils montent dans les petites voitures sur rails, c'est plus sécurisant ». Aina, 16 ans, habitante de Antananarivo, est venue passer les vacances scolaires à Toamasina en compagnie de sa famille.

Elle est surprise et un peu désappointée : « À Tana, c'est motorisé et surtout moins cher ». Sur la plage, un tour de grande roue coûte 3000 ariarys, contre seulement 1000 dans la capitale. Son petit frère de 10 ans, Ny Aro, s'exclame : « J'ai peur car ici ça tourne vraiment vite ! ». Pour autant, la famille dit apprécier cette fête foraine lui apportant une impression de « nouveauté ».

À la nuit tombée, la foule se presse à la recherche du meilleur stand. Quatre roues multicolores tournent, deux bateaux à balance et un manège sur rails se font concurrence, de nombreux trampolines rencontrent un franc succès, tout comme la structure gonflable, les baby-foots et les jeux de hasard.

Il est possible de se restaurer sur place, notamment aux stands de glace et barbe à papa rose flashy. Sambatra, 23 ans, vacancière également originaire de Tana, accompagne les enfants de sa famille et attend la fin de leurs tours de manège en profitant « des frites et des friandises ».

La fête foraine déborde sur la plage où des jeux de canne à pêche sont proposés. Quelques chevaux attendent des cavaliers pour un tour sur la plage à la tombée de la nuit, pour la somme de 15000 ariary. Spirit, un petit cheval bai efflanqué, attend patiemment. Le soleil brûlant de Toamasina a cramé la peau de ses naseaux.

Derrière lui, de nombreuses tables, chaises en plastique et parasols invitent à boire un verre entre amis. La zone non éclairée est peu à peu désertée. Dans la pénombre, une vendeuse refuse alors de vendre de l'alcool par peur des bagarres.

Pas de quoi inquiéter la plupart des forains qui espèrent que la bonne ambiance restera la même sur leur nouveau lieu d'activité.

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