Afrique: Nouvel ordre mondial - La bipolarisation de la planète se poursuit

analyse

La multiplication des alliances diplomatiques entre certains pays dirigés d'une part par les Etats-Unis et d'autre part par la Russie et la Chine témoigne d'une nouvelle stratégie adoptée par ces Etats pour former de plus grands blocs afin de faire face à leurs adversaires. Dans le cadre de cette politique, Washington mène une approche bilatérale avec des pays qui s'inquiètent de la puissance de Pékin ou de Moscou, et ces deux voisins adoptent également une politique visant à rassembler des nations hostiles à l'influence américaine.

Depuis l'arrivée de Joe Biden à la Maison-Blanche début 2021, l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) s'est étendue et a resserré ses rangs face à l'invasion russe de l'Ukraine. En Asie, pour faire face à la Chine, Washington a forgé une alliance militaire avec le Royaume-Uni et l'Australie et a relancé Quadrilated Security Dialogue, qui implique aussi l'Australie, avec le Japon et l'Inde.

Si en Europe Washington bénéficie d'une alliance collective - l'OTAN -, le cas de l'Asie est bien différent : le gouvernement américain a réchauffé les relations entre Séoul et Tokyo et organisé, au cours de ce mois, un sommet inédit avec le Japon et la Corée du Sud à Camp David. Les Etats-Unis souhaitent aussi renforcer leurs relations avec le Vietnam, dont les rapports avec Pékin sont tendus. De même, ils veulent se rapprocher de l'Inde, mais leur pari s'oppose à la neutralité historique du pays ainsi qu'à son refus de prendre part aux grandes alliances, - New Delhi est néanmoins membre du groupe Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).

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Du côté de l'alliance Russie-Chine, et à l'occasion du 15e sommet des Brics qui vient de se tenir à Johannesburg à un moment où les divisions sur la scène internationale ont été accentuées par l'invasion russe de l'Ukraine, les observateurs n'ont pas été surpris que six nouveaux pays soient admis au sein de l'organisation.

L'Arabie saoudite, l'Iran, l'Egypte, les Émirats arabes unis, l'Ethiopie et l'Argentine se sont engagés à rejoindre dès janvier 2024 les Brics, un ensemble qui veut gagner en influence dans le monde. Une quarantaine d'Etats y avaient demandé leur adhésion ou manifesté leur intérêt. Un signe de l'influence grandissante des pays émergents, selon le « club des cinq » qui produit un quart de la richesse et rassemble 42% de la population du globe.

Alliage hétéroclite, les Brics ont en commun la revendication d'un équilibre mondial plus inclusif, en particulier au regard de l'influence des Etats-Unis et de l'Union européenne. « Le bloc rassemblera bientôt le plus grand rival géopolitique des Etats-Unis (Chine) et l'un de ses alliés stratégiques historiques (Arabie saoudite) », ainsi que « deux parias internationaux d'un point de vue occidental », Russie et Iran, commente le groupe de réflexion Oxford Economics Africa.

OEuvrer en faveur du multilatéralisme

La Chine, poids-lourd qui pèse environ 70% du PIB du groupe, réitère l'intention du bloc de gagner en puissance. « Les Brics doivent oeuvrer en faveur du multilatéralisme et ne pas créer de petits blocs. Nous devons intégrer davantage de pays dans la famille des Brics », a enjoint le président chinois, Xi Jinping.

Réagissant à l'expansion des Brics à 11 membres, le gouvernement américain l'a minimisée, affirmant que cela ne l'empêchera pas de collaborer avec ses partenaires à travers le monde. « Les Etats-Unis réaffirment leur conviction que les pays sont libres de choisir leurs partenaires et les groupements auxquels ils s'associent », a fait remarquer un porte-parole du département d'Etat américain. « Nous continuerons de travailler avec nos partenaires et alliés sous des formes bilatérales, régionales, et multilatérales afin de renforcer notre prospérité partagée et de maintenir la paix et la sécurité mondiales », a-t-il ajouté.

Alors que New Delhi accueillera le mois prochain le sommet du G20, rassemblant les grandes puissances mondiales ainsi que les principales économies en développement, Washington pense que ce sera une occasion propice pour les puissances occidentales de s'attendre à des « résultats forts ». Celles-ci démontreront le rôle de l'organisation en tant que « forum principal de coopération économique, menant un programme positif et ambitieux pour les pays émergents et en voie de développement », estime la Maison-Blanche dans un communiqué.

Malgré la création des alliances par les deux parties suscitées, la question qui préoccupe les analystes est de savoir si ces nouveaux blocs seront pérennes. L'inquiétude qui pèse sur cette pérennité est due au probable retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, mais aussi au fait que Yoon Suk Yeol devra quitter la présidence sud-coréenne en 2027.

« L'administration Biden croit fondamentalement en la primauté des partenariats », estime Jon Alterman, chercheur au cercle de réflexion Center for Strategic and International Studies de Washington. Ce qui n'avait pas été le cas sous l'ex-président américain, Donald Trump, qui remettait en cause le bien-fondé des alliances par son slogan : « L'Amérique d'abord ».

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