Madagascar: Production rizicole - La Grande Ile parie gros sur le Bas-Mangoky

La plaine du Bas-Mangoky se trouve dans le district de Morombe, dans la région Atsimo Andrefana à 240 km au nord de la ville de Toliara.

Le périmètre est alimenté en eau par le fleuve Mangoky à travers une prise d'eau située à 20 km en amont de celui-ci. Grâce aux différents projets d'aménagement entrepris, le périmètre est passé de 5 000 ha à 10 000 ha, avec une production annuelle avoisinant les 80 000 tonnes. C'est le grenier à riz de la région et les autorités nationales misent beaucoup sur le Bas-Mangoky pour booster la production rizicole du pays.

La région Atsimo Andrefana est la zone climatique la plus aride de Madagascar. Dans le but d'améliorer la productivité agricole et les revenus des agriculteurs afin d'atteindre l'autosuffisance alimentaire, le Projet d'extension du périmètre de Bas-Mangoky (PEPBM), financé par la Banque africaine de développement (BAD) et sous tutelle du ministère de l'Agriculture et de l'élevage (Minae), prend en main l'aménagement des périmètres irrigués et la construction de barrages hydroagricoles pour maîtriser l'eau.

Après l'obtention de résultats qualifiés de tangibles, grâce à la réhabilitation de la prise de Bevoay, les travaux d'aménagement du périmètre additionnel d'une superficie cultivable de 5 000 ha de Bas-Mangoky sont maintenant achevés. La cérémonie d'inauguration de l'extension du périmètre a été présidée dernièrement par le chef de l'État, Andry Rajoelina. La cérémonie a vu également la présence de plusieurs personnalités à Tanandava, dont le ministre de l'Agriculture et de l'élevage, Harifidy Ramilison, et les hauts responsables de la BAD.

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On sait, en outre que, dans le cadre du PEPBM, Madagascar vise une production de 180 000 tonnes chaque année. « Avec une production de 44 000 tonnes supplémentaires de riz et de 2 400 tonnes de pois de cap, ce projet revêt une importance cruciale pour l'autosuffisance alimentaire et la croissance économique de la région et du pays », fait-on savoir, avant d'ajouter que les objectifs « s'alignent avec la vision du projet PEPBM qui contribue à la réduction de la pauvreté et de l'insécurité alimentaire des populations rurales de la région, par l'augmentation de manière significative des rendements, de la production de riz par la mise en valeur intensive et en double culture annuelle".

Il est à noter que la prise de Bevoay est la plus grande infrastructure hydroagricole de Madagascar, et parmi les canaux d'irrigation autoportés, elle est la plus moderne d'Afrique. Vingt mille hectares de superficie sont au bénéfice de 25 000 producteurs issus des trois districts Toliara II, Betioky et Morombe, de la région du Atsimo Andrefana. Une action qui favorise la création d'emplois et la réduction de l'insécurité. Le Minae a déjà effectué des travaux de réhabilitation et d'aménagement, dans la région du Atsimo Andrefana, dont la prise de Bevoay qui a une capacité de 40 m3 d'eau/s qui irrigue 3 200 ha de superficie, la réhabilitation de 74 km de canaux pour irriguer 7 500 ha. Sans oublier la réhabilitation du périmètre irrigué dans le Manombo, qui mesure 17 km de canal principal construit, et du barrage qui alimente 4 500 ha de superficie. En matière d'appui aux producteurs, 20 tonnes de semences de riz et plus de 40 petits matériels agricoles ont été aussi distribués aux bénéficiaires. Côté foncier, les producteurs bénéficiaires de l'extension se verront remettre des cahiers de charge foncier afin d'assurer la sécurisation de leurs parcelles. Par ailleurs, 35 000 ménages ont déjà reçu plus de 300 tonnes de semences et d'intrants agricoles par le biais du Projet Purpa, financé également par la BAD pour la préparation de la campagne agricole 2022-2023. Pour assurer la gestion de l'eau et l'entretien des équipements du périmètre au niveau des secteurs, les riziculteurs du Bas-Mangoky Phase II sont organisés en associations des usagers de l'Eau (AUE). AfricaRice, organisation de recherche panafricaine, leader oeuvrant pour l'amélioration des moyens d'existence en Afrique par des activités scientifiques et des partenariats, dont Madagascar est membre depuis 2011, soutient le pays par la mise en oeuvre de programme de recherche et développement spécifique dans le but d'améliorer la productivité rizicole, la nutrition et la sécurité alimentaire, et pour que le pays puisse atteindre son objectif d'autosuffisance alimentaire. Et qu'il devienne le grenier alimentaire de la sous-région Afrique australe. Et le Bas-Mangoky figure parmi ses priorités.

Coup de pouce d'AfricaRice

Outre le développement de semences de qualité, AfricaRice a initié le projet d'étuvage de riz dans des régions comme l'Atsimo Andrefana. Dans ce cadre, quatre associations de riziculteurs dans le Bas-Mangoky (Santatra, Mirandava, Fivemami et Fiba) ont reçu une formation du Fofifa et d'AfricaRice sur les techniques modernes de riziculture et le système d'étuvage du riz. Les membres de ces associations ont été convaincus des bienfaits et avantages du riz étuvé. Les femmes membres mettent surtout l'accent sur l'aspect économique : « Deux kapoaka de riz étuvés suffiraient pour six personnes alors que 3,5 kapoaka de riz ordinaire sont nécessaires pour le même nombre de consommateurs », constate Mme Lucie, présidente de l'association Santatra. Et de poursuivre que l'étuvage du riz permet aussi de réduire les pertes après la récolte et pendant sa conservation, puisque l'étuvage rend le riz moins vulnérable aux insectes durant son stockage. D'autres membres ont insisté sur la qualité du riz étuvé qu'ils trouvent « plus nutritif et plus résistant. Il s'allonge mieux et se gonfle plus que le riz ordinaire, les grains sont moelleux, et non collant. Le riz étuvé conviendrait mieux aux personnes diabétiques ». Le processus d'étuvage contribue également à la protection de l'environnement puisque les déchets du riz transformé peuvent être utilisés comme sources d'énergie pour remplacer le bois de chauffe. Au mois de novembre 2022, ces associations ont reçu de la part d'AfricaRice des matériaux pour l'étuvage « GEM ». Il s'agit d'un système d'étuvage amélioré qui vise à obtenir un riz étuvé de meilleure qualité que celui obtenu par l'étuvage traditionnel.

Ce système est plus économe en énergie et permet de transformer rapidement de grandes quantités de riz. Une plateforme commerciale a été mise en place pour faciliter la commercialisation des produits et la promotion des associations des femmes. Déclenchement également d'un processus de dialogue afin de stimuler la collaboration et la coopération, mettre en relation les différents acteurs et les parties prenantes, assurer la visibilité des associations. La plateforme comporte les informations sur les différentes associations de producteurs et les différents types de produits proposés. Des applications numériques sont également développées pour aider les agriculteurs. Pour rappel, les travaux d'aménagement de la nouvelle zone d'extension du périmètre du Bas-Mangoky ont débuté il y a plus de cinq ans dans la commune rurale de Tanandava-station. Il a déjà été souligné à ce moment que l'objectif est l'extension des surfaces exploitables dans le périmètre ainsi que l'augmentation de la production rizicole. Ainsi, la construction de réseaux d'irrigation s'est divisée en deux lots : le premier concerne travaux de « regabaritage » et rehaussement de l'avant-canal, d'un coût initial de 26 milliards d'ariary et le deuxième lot concerne la construction du canal principal P2, d'une longueur de 24 km pour un coût initial de 27 milliards d' ariary. Suite à ces travaux, le périmètre double et la production rizicole attendue du périmètre, sur la base de deux campagnes, devrait dépasser les 80 000 tonnes par an. De son côté, la BAD a estimé que ces investissements permettront d'augmenter le revenu moyen des agriculteurs par an de 1,5 million d'ariary à 3,6 millions d'ariary.

FOFIFA - Confiant des potentialités du Bas-Mangoky

La consommation annuelle de riz par habitant est estimée à 138 kg en milieu rural, et à 113 kg en milieu urbain. Aliment de base de la population malgache, le riz est la principale culture vivrière dans la Grande ile et 90 % des activités agricoles sont basées sur la riziculture qui est pratiquée par environ 2 000 000 de ménages. La filière riz constitue la première activité économique en milieu rural et le Bas-Mangoky fait partie des zones stratégiques, selon le Fofifa qui est le Centre national de recherche appliquée au développement rural. Pour être autosuffisant en riz, le Fofifa soutient qu'il faudrait d'abord accroitre, de manière significative, la production aussi bien en quantité qu'en qualité. Les perspectives d'augmentation de la production rizicole nécessitent, entre autres, la production et la valorisation des variétés améliorées, à plus haut rendement. Les variétés améliorées sont plus performantes et résilientes au changement climatique, que celles traditionnellement cultivées par les paysans. Leur productivité est rehaussée par l'utilisation des semences de bonne qualité, certifiées. Et le Fofifa d'ajouter que la vision de la Stratégie nationale semencière ambitionne de disposer « de produits agricoles compétitifs, en abondance et de bonne renommée ». Par conséquent, l'objectif est de « soutenir, sur le long terme, le développement du secteur agricole et agroalimentaire, et de contribuer ainsi, à la réduction de la pauvreté et à l'essor de l'économie nationale ». Il s'agit, à cet effet, notamment pour le Bas-Mangoky, de « promouvoir l'utilisation des variétés améliorées afin d'atteindre un développement rapide et harmonieux du marché des semences ». Pour ce faire, un des créneaux principaux demeure la professionnalisation de la filière semencière et l'utilisation de semences de qualité.

Les indicateurs de résultats escomptés dans cette stratégie sont l'augmentation de 5 à 10% des surfaces emblavées avec des semences améliorées et l'augmentation de 10 à 50% des rendements selon les cultures et les régions. La production, la disponibilité et l'accessibilité des semences certifiées devraient permettre de satisfaire les besoins pressants des producteurs. Aussi, faudrait-il les « associer à la sélection même des variétés pour qu'ils fassent un choix correspondant à leurs préférences ». C'est ce que le Fofifa appelle la sélection variétale participative mieux connue sous le terme anglo-saxon PVS ou Participatory varietal selection. Les riziculteurs du Bas-Mangoky ont connu l'expérience, en vue de la production de semences de la prochaine saison culturale. C'est dans le cadre du projet Priaso et à travers leurs programmes de sélection et d'amélioration variétale, qu'ont été testées de nouvelles variétés de riz proposées dans la région.

La moyenne de rendement en paddy des variétés traditionnelles varie entre 4 et 5 tonnes/ha. Les nouvelles variétés sélectionnées s'adaptent aux conditions agroécologiques de la région et permettront d'obtenir au moins 20% supplémentaire de rendement. « Avec une superficie équivalente à 5000 ha et un rendement de 6 tonnes et plus à l'hectare, la grande plaine du Bas Mangoky dans le Sud-Ouest de Madagascar dispose d'un important potentiel et constitue certainement une des grandes régions productrices rizicoles à Madagascar », a fait aussi remarquer le Fofifa. Et avec cette extension qui vient d'être réalisée, le Bas-Mangoky peut viser loin.

BAS MANGOKY EN CHIFFRES

VERBATIM

Harifidy Ramilison, ministre de l'Agriculture et de l'Élevage

« L'extension de ce périmètre irrigué jusqu'à Morombe, devrait augmenter le rendement dans l'ensemble du périmètre du Bas-Mangoky. Une production de 180 000 tonnes est prévue chaque année, avec une production de 44 000 t supplémentaires de riz et de 2 400 t de pois de cap. Notons que la prise de Bevoay est la plus grande infrastructure hydroagricole de Madagascar. Et parmi les canaux d'irrigation autoportés, elle est la plus mo¬derne d'Afrique. 20 000 ha de superficie profitent à 25 000 producteurs de la région Atsimo Andrefana. »

Tovonera Antoine Honoré, directeur du Projet Bas-Mangoky (PEPBM)

« Beaucoup de travaux ont été réalisés pour le Bas-Mangoky. Des canaux aux systèmes hydromécaniques. Le projet a aussi accordé une importance particulière à l'aspect foncier afin que les agriculteurs puissent effectuer leurs activités sereinement et avec plus d'ambition. La situation actuelle et à venir ne peut qu'être encourageante pour les riziculteurs de cette partie de l'ile. »

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