Au Mali, le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (Jnim), lié à al-Qaïda, annonçait le 8 août dernier un blocus sur la ville de Tombouctou.
Depuis près de 30 jours, les camions venant d'Algérie et de Mauritanie sont interdits d'accès, les prix augmentent, la ville a été visée par plusieurs attaques et plus de 30 000 habitants ont fui. Alors que les autorités parlent d'« intoxication » médiatique, la population ne baisse pas les bras.
L'huile, les pâtes, la semoule, le sucre et surtout l'essence : tels sont les produits qui commencent à manquer et dont les prix grimpent. Plus 20 à 50%, selon les témoignages de nombreux habitants de Tombouctou joints par RFI. Ces produits ne peuvent plus être acheminés d'Algérie ni de Mauritanie. Le nombreux habitants dénoncent aussi des tentatives de spéculation de la part de certains commerçants, eux-mêmes mis en difficulté par la baisse de leurs stocks et par l'impossibilité de se réapprovisionner. Des camions venant habituellement d'autres localités maliennes sont également bloqués et ne prennent plus la route en raison de la menace jihadiste.
Camion brûlé, bateau attaqué, obus sur la ville
Il y a huit jours, un camion transportant du carburant a été incendié à l'entrée de la ville. Vendredi dernier, c'est un bateau qui rejoignait Tombouctou par le fleuve qui a été visé par des tirs : un enfant a été tué. Depuis deux semaines, la ville a également essuyé plusieurs salves d'obus qui ont, de sources sécuritaires et locales, tué deux enfants et fait plusieurs blessés. Le Jnim a revendiqué un bombardement sur l'aéroport de Tombouctou mercredi matin, qui n'a pas fait de victime.
Bons offices et détermination
Malgré tout, certaines marchandises venant du sud du Mali ont aussi pu contourner le blocus et les Tombouctiens joints par RFI tiennent à afficher leur détermination face à une situation dont ils espèrent qu'elle ne durera pas. En dépit des difficultés, plusieurs interlocuteurs affichent même fièrement une forme d'optimisme, rappelant que la ville a connu pire lors de l'occupation jihadiste de 2012. Des notabilités coutumières et religieuses des régions de Tombouctou et de Taoudeni ont entrepris une mission de bons offices pour que le Jnim relâche son étau, à ce stade sans résultat.
Armée
Cette semaine, l'armée malienne a affirmé avoir neutralisé « un influent terroriste » impliqué dans des tirs qui avaient visé la ville (communiqué de l'armée en date du mardi 29 août). Vendredi, le commandant militaire de la zone de Tombouctou, le colonel Mamadou Souleymane Koné, a cherché à rassurer les populations en dénonçant devant la presse une « campagne médiatique » faite d'« intoxications ». Le commandant de zone a assuré que l'armée allait renforcer ses actions dans la ville et sur les axes d'approvisionnement.
30 000 personnes ont fui
La mobilisation de l'armée rassure certains Tombouctiens, mais en inquiète aussi d'autres : de nombreuses familles, arabes et touarègues notamment, ont préféré quitter la ville. Selon les témoignages recueillis par RFI, ces familles ont fui en raison de la menace jihadiste, mais aussi par crainte d'amalgames et de représailles des soldats maliens et de leurs supplétifs russes de Wagner. Une crainte renforcée par l'arrivée il y a trois semaines (le 13 août) des Forces armées maliennes et de Wagner dans le camp militaire de Ber, à environ 60 kilomètres de Tombouctou.
Selon le Bureau onusien de la coordination des affaires humanitaires (Ocha) au Mali, plus de 30 000 personnes (plus de 6 000 ménages) « se sont déplacées préventivement à travers les régions de Tombouctou, Taoudeni et vers les pays voisins depuis le début du blocus ».
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