Gabon: Prestation de serment du président de la transition - Le général Brice Oligui Nguema fera-t-il mentir les cassandre ?

Prestation de serment du General de Brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, President de la Transition, le lundi 4 septembre 2023 à Libreville
4 Septembre 2023
analyse

Moins d'une semaine après le coup d'Etat qui a mis fin au pouvoir du président Ali Bongo, nouvellement réélu le 30 août dernier au Gabon, le Général Brice Oligui Nguema, désigné par l'armée pour conduire la transition, a prêté serment dans la capitale gabonaise.

C'était le 4 septembre dernier au palais présidentiel, devant les juges de la Cour constitutionnelle et un parterre d'invités au nombre desquels des autorités administratives et militaires, mais aussi des personnalités et autres dignitaires du régime déchu comme l'ex-Premier ministre Alain Claude Bilie By Nzé et la vice-présidente Rose Christiane Ossouka Raponda. Etaient aussi présents, des diplomates parmi lesquels l'ambassadeur de France au Gabon. Le diplomate français avait, du reste, été reçu la veille par le tombeur d'Ali Bongo.

Une attitude aux relents de caution morale de Paris, portée à la junte militaire qui s'est emparée du pouvoir à Libreville dans les conditions que l'on sait. Une posture qui tranche avec la position radicale de l'Elysée qui met en avant l'illégitimité des tombeurs de Mohamed Bazoum au Niger, pour refuser de les reconnaître, plus d'un mois après la chute de celui qui passait pour le chouchou voire le « protégé » des Occidentaux en général et de la France en particulier dans la région du Sahel.

L'officier militaire a toujours voulu donner des gages de sa volonté d'instaurer une nouvelle gouvernance dans son pays

Une position à géométrie variable de l'ex-puissance coloniale qui tend plutôt à montrer que derrière la démocratie que la France prétend défendre en Afrique, peuvent se cacher bien des intérêts insoupçonnés. Toujours est-il que, passés les premiers moments d'euphorie du coup d'Etat, celui qui a fait l'unanimité de la hiérarchie militaire autour de son nom pour conduire le processus de renouveau au Gabon, se révèlera être un homme du sérail bien connu dans les premiers cercles du pouvoir à Libreville.

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De là à se demander si ce pronunciamiento aux allures de révolution de palais menée par le Général Nguema, ne vise pas à préserver les intérêts du clan, il y a un pas que d'aucuns ont vite fait de franchir. En effet, le Général-putschiste est présenté, soit dit en passant, comme un cousin éloigné de l'ex-président Ali Bongo.

Sans oublier qu'au-delà des résultats contestés du vote qui le donnaient encore gagnant, le valétudinaire locataire du Palais du bord de mer, ne présentait pas, aux yeux de plus d'un, les meilleures garanties de santé physique et mentale pour étrenner un nouveau septennat à la tête de l'Etat gabonais. Malgré ses liens protéiformes avec le pouvoir déchu, le Général Brice Oligui Nguema saura-t-il faire mentir les Cassandre ?

La question mérite d'autant plus d'être posée que l'officier militaire qui se veut aujourd'hui l'homme du renouveau au Gabon, a toujours voulu donner des gages de sa volonté d'instaurer une nouvelle gouvernance dans son pays, en totale rupture avec celle de son prédécesseur.

Le Général-président sera attendu au pied du mur de ses promesses par ses compatriotes

En cela, il s'est jusque-là voulu rassurant, et pour ses compatriotes, et pour les partenaires internationaux de son pays. Et en plus de promettre aux Gabonais, des institutions « plus démocratiques » et respectueuses des « droits humains », l'officier supérieur qui a mené des concertations tous azimuts durant le week-end écoulé avec les « forces vives de la nation », la société civile, les partis politiques, le corps diplomatique, les organisations internationales et les bailleurs de fonds, a aussi promis, outre la lutte contre la corruption, de doter le Gabon d'une nouvelle Constitution et d'un nouveau Code électoral. Le tout, selon un agenda qui reste encore à déterminer, mais « sans confondre vitesse et précipitation ».

C'est dire si le Gabon ne semble pas parti pour une transition de courte durée. En tout état de cause, maintenant qu'il a prêté serment, il revient au tout nouveau président de la transition gabonaise, de travailler à enlever tout argument aux mauvaises langues qui ne voient en son putsch qu'une récupération du pouvoir dans le but de préserver ses intérêts qui se confondent parfois avec ceux de l'ex-famille présidentielle qui a dirigé le Gabon pendant plus d'un demi-siècle. Et cela, en opérant des réformes politiques et institutionnelles hardies, de sorte à arrimer résolument son pays à la démocratie qui a tant souffert au Gabon.

En tout cas, sur la question, c'est peu de dire que le Général-président sera attendu au pied du mur de ses promesses par ses compatriotes, non seulement sur le contenu des réformes, mais aussi sur la durée de cette transition qui peine encore à se dessiner clairement. Autant dire qu'au regard du soutien populaire dont semble bénéficier son putsch, le Général Nguema n'a pas droit à l'erreur.

Et il y a lieu de le prendre aux mots en espérant qu'il restera à l'écoute de son peuple. Car, le Gabon revient de loin. Et l'oeuvre de la refondation s'avère déjà titanesque. A commencer par la mise en place progressive des institutions de la transition dans laquelle la junte ne doit pas rater le coche. Mais à présent que le président de la transition a prêté serment, on ne devrait pas tarder à être peu ou prou édifié sur l'orientation de son action à la tête de l'Etat, à travers la configuration du gouvernement après la nomination du Premier ministre qui est très attendue.

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