Guinée: Transition guinéenne - Le colonel Doumbouya se hâte lentement

Hier 5 septembre 2023, cela faisait deux ans qu'Alpha Condé avait été renversé, déposé par des militaires pour avoir lui aussi été atteint par le syndrome du 3e mandat.

Alors qu'il avait été le premier président démocratiquement élu depuis l'indépendance du pays en 1958 il avait la chance d'entrer honorablement dans l'histoire ; malheureusement cela n'a pas été le cas. C'est dire si son tombeur, le colonel Mamadi Dombouya, était arrivé en héros ou en sauveur pour remettre le pays sur les rails de la démocratie et de la bonne gouvernance.

Deux ans après, force est de reconnaître que la transition conduite par Mamadi Doumbouya manque de lisibilité. Après les tractations, les passes d'armes avec la CEDEAO, l'ancien patron des Forces spéciales, sur la durée de la transition, s'était finalement résolu de raboter, allant de 36 à 24 mois pour mener de profondes réformes, donc jusqu'en fin 2024, avant de rendre le pouvoir aux civils. Presqu'un an s'est écoulé depuis ce deadline et rien ne montre que la Guinée est sur le bon chemin. C'est vraisemblablement un pilotage à vue porté sur le culte de la personnalité de plus en plus prégnante, avec des OSC, des organisations des droits de l'homme, des journalistes... tenus en respect par « le solide gaillard de Conakry ».

L'opposition dénonce l'arrestation de certains de ses dirigeants, des poursuites judiciaires contre d'autres, la dissolution d'un collectif citoyen critique de l'action de la junte. Elle crie également contre une « gestion autoritaire et unilatérale, et à une volonté de confiscation du pouvoir ». Autres griefs faits au colonel Doumbouya et à son équipe, « l'enrichissement effréné de la classe dirigeante ». Deux ans après l'exercice du pouvoir par la junte militaire guinéenne, la rupture avec le peuple de Guinée est complètement consommée.

C'est en raison de tout cela qu'une marche qui se voulait pacifique pour réclamer un retour rapide des civils à la tête du pays avait été préconisée. Elle sera malheureusement formellement interdite par le pouvoir, qui dit préserver ainsi la tranquillité publique.

Tout au plus, au crédit de la junte, les profondes mutations de la justice clamées par ses partisans, l'opérationnalisation du Fonds d'aide juridictionnel, la politique pour mettre fin à la corruption, la création de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF)...

Mais plus les mois passent, plus on se demande si le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) remettra effectivement le pouvoir aux civils, tant le travail qui mène aux élections est titanesque.

En effet, le chronogramme arrêté prévoit, entre autres étapes, le recensement de la population, celui administratif, l'établissement du fichier électoral, l'organisation du scrutin, celle de l'élection locale et communale, les législatives et la présidentielle.

Encore une fois, deux ans après, ce qui a semblé pour de nombreux Guinéens et d'observateurs de la scène politique être un coup d'Etat salvateur, la solution du colonel Doumbouya, se révèle malheureusement pire que le mal qu'il est venu soigner.

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