Ethiopie: Là où la paix n'est pas la paix et la justice n'est pas la justice

communiqué de presse

Lorsque les deux principaux belligérants de la région éthiopienne du Tigré ont conclu un accord de « cessation des hostilités » il y a dix mois, on espérait que le conflit brutal qui durait depuis deux ans toucherait à sa fin.

Certains ont même osé espérer que les commandants et les fonctionnaires responsables des atrocités commises pendant la guerre soient traduits en justice.

Cela n'a pas été le cas.

Depuis la signature de l'accord de novembre 2022, de graves abus, notamment des meurtres et des violences sexuelles, se sont poursuivis au Tigré. L'état des droits humains et la situation humanitaire restent désastreux.

Les forces érythréennes, toujours présentes dans certaines parties de la région, ont bloqué l'aide humanitaire, auraient enlevé des personnes et pillé des biens dans les zones qu'elles contrôlent. Au Tigré occidental, les autorités et les forces régionales Amhara, ainsi que les milices connues sous le nom de Fano, ont poursuivi une campagne de nettoyage ethnique et expulsé de force les Tigréens.

L'insécurité et les abus se répandent en Éthiopie.

En avril, des violences ont éclaté dans la région d'Amhara, au sud du Tigré, lors d'opérations militaires menées par le gouvernement contre les milices Fano. Le gouvernement a bloqué l'accès à l'internet et a arrêté plusieurs journalistes qui avaient couvert l'évolution de la situation dans cette région.

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Début août, les affrontements se sont intensifiés, les témoignages de victimes civiles et de dommages aux infrastructures civiles se sont multipliés. Le gouvernement a par la suite décrété un état d'urgence généralisé dans la région d'Amhara, restreignant les droits humains fondamentaux. Des arrestations massives d'Amharas ont été signalées dans la région et dans la capitale de l'Éthiopie, Addis-Abeba.

Dans la région d'Oromia - une vaste zone au centre de l'Éthiopie - l'insurrection en cours et la campagne de contre-insurrection menée par le gouvernement contre l'Armée de libération de l'Oromo ont donné lieu à de graves abus envers les civils, tels que des détentions arbitraires, des exécutions sommaires et des massacres à grande échelle, notamment au sein des communautés minoritaires de la région.

Les victimes d'abus et leurs familles ont cherché à obtenir justice et réparation pour ces abus, mais l'accord de cessation des hostilités dans le Tigré ne précisait pas comment demander des comptes aux auteurs de ces abus. Au lieu de ça, il fait référence à l'engagement du gouvernement à mettre en oeuvre un « cadre politique de justice transitionnelle pour garantir la responsabilité, la vérité, la réconciliation et la guérison ».

On peut comprendre que les survivants d'abus et d'autres personnes ne fassent pas confiance à de telles promesses ni aux procédures juridiques nationales de l'Éthiopie en général. Mais surtout, il semble qu'il y ait peu de volonté politique nationale de garantir une véritable justice et des réparations pour les victimes d'abus graves.

Il est clair que l'attention de la communauté internationale et des enquêtes internationales sont toujours nécessaires.

La Commission internationale d'experts en droits de l'homme pour l'Éthiopie (ICHREE), mise en place par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies en décembre 2021, est le seul organe existant disposant à la fois de l'expertise et du mandat nécessaires pour enquêter de manière indépendante sur les abus commis en Éthiopie depuis novembre 2020. Elle peut également rassembler et conserver des preuves en vue de poursuites ultérieures.

Cependant, le mandat actuel de l'ICHREE expire en septembre 2023.

Compte tenu de la gravité de ce qui s'est passé et de ce qui continue de se dérouler en Éthiopie, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies doit, lors de sa session de septembre, renouveler son mandat, afin qu'il puisse poursuivre son travail.

 

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