Compte tenu des risques sociopolitiques et de sécurité dans l'Union et à une conjoncture internationale défavorable, l'autorité monétaire a décidé de relever son taux directeur, c'est-à-dire le taux d'intérêt auquel elle prête aux banques commerciales. Il passe de 3 % à 3,25 %.
La Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (Bceao) a relevé de 25 points de base son taux directeur qui passe de 3,00 % à 3,25 %. La décision a été prise, hier, à l'issue de la réunion du Comité de politique monétaire. Jean-Claude Kassi Brou, le Gouverneur de l'institution monétaire, a justifié la mesure par la conjoncture internationale marquée par une forte inflation, le renchérissement des conditions financières sur les marchés internationaux et la « montée des incertitudes au niveau régional ». « La hausse des taux directeurs vise à anticiper et à contenir l'impact de ces facteurs de risque sur les perspectives macroéconomiques de l'Union », expliqua-t-il. La mesure entre en vigueur à partir du 16 septembre 2023.
D'après le Gouverneur de la Bceao, le renchérissement des conditions financières sur les marchés internationaux a fait qu'au deuxième trimestre les États de l'Union qui interviennent sur le marché financier ont connu des difficultés pour mobiliser des ressources. En 2022, a rappelé Jean-Claude Kassi Brou, les États n'avaient pas pu mobiliser des eurobonds, contrairement à 2021, à cause du durcissement des conditions financières. « Et cette situation continue et persiste en 2023 », confie-t-il, ajoutant que les États sont revenus sur le marché intérieur pour mobiliser des ressources. « Sur les six premiers mois de l'année 2023, les États de l'Union ont mobilisé sur le marché financier régional plus de 5100 milliards de FCfa alors qu'un an auparavant ils avaient mobilisé autour de 3800 milliards de FCfa. Cette forte mobilisation des ressources au sein du marché régional a entrainé une hausse des rendements sur les titres publics », indique le Gouverneur de la Bceao. Cette situation a fait que les banques qui sont les principaux intervenants sur le marché financier avaient atteint un niveau de saturation en termes d'achat de titres publics, amenant ainsi la Bceao a racheté, en juin 2023, des titres publics sur le marché secondaire afin de permettre un bon fonctionnement du marché financier régional des titres publics et de baisser les taux à court terme. « Aujourd'hui, la situation s'est normalisée et les États continuent de mobiliser des ressources sur le marché financier régional », se félicite-t-il.
Jean-Claude Kassi Brou a assuré qu'au cours des prochains mois, le Comité de politique monétaire pourrait prendre, en fonction de la conjoncture économique, « si nécessaire, les mesures idoines pour assurer la stabilité monétaire de la zone ».
Concernant l'inflation, elle poursuit sa baisse « à la faveur de la hausse de la production de céréales et de la baisse des prix des produits énergétiques et alimentaires importés ». D'après le Gouverneur de la Bceao, la baisse est également accentuée par les actions des États dans le « cadre de la lutte contre la vie chère combinée aux effets des mesures de politique monétaire prises par la Banque centrale ». « Le taux d'inflation s'est situé à 4,0 % sur le deuxième trimestre de 2023, après 5,8 % le trimestre précédent. En juillet 2023, la progression des prix à la consommation est ressortie à 3,4 %, se rapprochant davantage de la cible de la Banque centrale », informe Jean-Claude Kassi Brou.
Le taux de croissance projeté à 5,6 % en 2023
Le Gouverneur de la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest s'est félicité du niveau soutenu de l'activité économique dans l'Union, au deuxième trimestre de l'année 2023. Une tendance qui présage, selon lui, d'une croissance économique robuste pour l'année 2023. « Au sein de l'Uemoa, l'activité économique demeure soutenue avec un taux de croissance estimé à 5,7 % au deuxième trimestre 2023. La bonne tenue de l'activité dans l'ensemble des secteurs laisse augurer une croissance robuste projetée à 5,6 % pour l'année 2023, après 5,9 % en 2022 », déclare Jean-Claude Kassi Brou.
Relativement au financement des économies de l'Union, Jean Claude Kassi Brou a souligné que les crédits accordés par le système bancaire au secteur privé et aux États s'inscrivent toujours dans une tendance haussière. En effet, les crédits à l'économie ont enregistré une progression de 16,2 %, en rythme annuel, à fin juin 2023, après 16,6 % à fin mars 2023. « Cette bonne orientation permet de soutenir l'activité économique dans l'Union », dit-il.
Toutefois, le Gouverneur de la Bceao a noté que les ressources mobilisées par les États auprès des Partenaires techniques et financiers sont en forte baisse, dans un « contexte de déficits budgétaires toujours élevés, induisant de fortes pressions sur le marché financier régional et sur les comptes extérieurs de l'Union ».