Tunisie: Il est temps de passer à la caisse

9 Septembre 2023

Le recouvrement des biens spoliés est l'un des axes majeurs du combat de libération nationale que prône le Chef de l'Etat avec des accents à la fois politiques, économiques et financiers.

Ce n'est pas la première fois que le Président de la République, Kaïs Saïed, appelle à poursuivre, dans le respect de la loi, tous ceux qui ont porté atteinte à la nation et au peuple. Mais c'est la première fois qu'il siffle la fin de la récréation et insiste sur l'importance de « passer à la caisse » pour ceux qui veulent conclure avec le peuple une réconciliation pénale pour éviter la prison ou pour la quitter.

En effet, après plus de douze ans, il est ahurissant de voir ceux qui tremblaient de peur en 2011, se pavaner encore aujourd'hui en toute liberté et s'organiser en lobbies ou en groupe de pression pour continuer à saigner à blanc le pays. Comment ont-ils fait pour conjurer cette peur et jouir du même passe-droit que par le passé ?

La Révolution a été une occasion en or pour ces « spoliateurs » de recruter parmi les avocats véreux, les juges corrompus, les experts et les hommes politiques peu soucieux de l'intérêt du peuple et du pays, des conseillers et de fervents défenseurs d'hommes d'affaires voyous pour s'arroger la liberté de continuer à piller sans être inquiétés.

%

C'est que, pour protéger leurs intérêts et persévérer sur la même voie de pillage des biens du pays, ils se sont convertis en « hommes politiques et médiatiques ». Ils savent que le nerf de la guerre est l'argent. C'est pourquoi ils ont investi le champ politique et ont profité de la liberté retrouvée pour investir le paysage médiatique et mettre en oeuvre leur projet éditorial basé sur la défense des intérêts politiques et par conséquent économiques.

C'est le nivellement par le bas des médias par des contenus orientés sur les règlements de comptes, sur la diabolisation des adversaires économiques ou politiques. Et pour garantir que l'alchimie fonctionne à merveille, il fallait prendre d'assaut le temple du pouvoir législatif là où se mijotent à petit feu les textes de loi et qui garantirait la pérennité de leur mainmise sur les rouages de l'administration.

Dès lors, le mercato des partis politiques a vu le jour avec des chasseurs de têtes des figures politiques réputées pour leur opposition à Bourguiba ou à Ben Ali et crédibles aux yeux du citoyen lambda à cette époque-là. On a vu des « hommes d'affaires », acheter des fonds de commerce politique, recruter des « leaders d'opinion », en chasser d'autres et donc gérer les partis politiques comme on gère des usines ou des fabriques.

Profitant d'un Code électoral aux malformations multiples et d'une Constitution qui souffre de plusieurs verrous, l'accès à l'Hémicycle est devenu aisé même aux contrebandiers et autres spéculateurs et voyous. On a vu comment les lois scélérates qui accordent aux Turques ou aux Qataris et autres acteurs locaux, des privilèges ostentatoires pour saigner à blanc le pays, étaient adoptées avec de larges scores.

Ce sont de telles lois et d'autres qui ont sapé l'autorité de l'Etat dans le champ économique et dépossédé l'administration de ses mécanismes de régulation et de protectionnisme, qui ont fait entrer le pays dans des zones de turbulences sociales. Aujourd'hui, le message est clair : la seule voie est la réconciliation pénale. Pour réparer les torts, il faut payer ou moisir en prison.

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.