Sénégal: Ndiaga Sylla, expert électoral et président du cabinet CEELECT - « Le problème majeur de notre système de parrainage, c'est qu'on n'a aucune maîtrise sur les doublons externes »

8 Septembre 2023

« Le problème majeur de notre système de parrainage, c'est qu'on n'a aucune maîtrise sur les doublons externes. Autrement dit, aujourd'hui, un candidat peut effectivement avoir un dispositif informatique qui lui permet de vérifier les doublons internes pour y déceler peut-être les parrainages erronés, mais il n'a aucune maîtrise sur les doublons externes.

Cela veut dire, en réalité, il ne sait pas à priori si une personne X qu'il considère comme parmi ses parrains n'a pas déjà parrainé quelqu'un d'autre. Et le cas échéant, la loi prévoit effectivement qu'on le comptabilise, on le valide en fait sur la première liste déposée et contrôlée, et on le rejette maintenant sur l'autre liste.

Cependant, le deuxième candidat sur la liste a la possibilité de régulariser les parrains doubles puisque la loi prévoit un délai de 48 autres pour tout candidat qui n'atteint pas le nombre maximum à cause des parrainages doubles. Seulement, à ce niveau, le problème est que la régularisation ne peut se faire qu'une seule fois. Cela pose un problème puisque, comme je l'ai déjà dit, les candidats n'ont aucune maîtrise des doublons externes. Et c'est à ce niveau où se trouve la faille du système. A ce niveau, je dirais que l'ancienne mouture de la Loi était plus favorable parce qu'elle n'avait pas limité le nombre de fois qu'on avait pour en fait régulariser les doublons. Mais aujourd'hui la loi est très stricte : on ne peut régulariser qu'une seule fois un parrainage double.

En réalité, pour régler le problème des doublons externes, il faut un système d'enregistrement automatique qui permet, au moment d'enregistrement des parrains, de détecter dans un premier temps, les personnes qui sont dans le fichier électoral ensuite voir si ces personnes ont déjà parrainé un autre candidat. Et le cas échéant, rejeter aussitôt ce parrainage et éliminer le risque de doublon externe. Malheureusement, nous n'avons pas institué ce système qui aurait pu nous éviter ces doublons externes. Puisqu'avec les téléphones smartphones, le ministère de l'Intérieur aurait pu partager avec tous les candidats un logiciel qui leur permettrait de scanner avec leur téléphone portable les cartes d'identité nationale de toutes les personnes qui voudraient parrainer leur candidature sans risque de doublons externes.

Tirage de passage des candidats : un couteau à double tranchant.

« Le tirage au sort de l'ordre de dépôt des candidatures permet d'éviter la cacophonie qu'on avait connue en 2019 avec les bousculades entre Mimi Touré et Malick Gakou. A l'époque, c'est l'ordre de dépôt qui déterminait celui de contrôle des parrainages. Donc, il fallait être premier pour déposer avant tout le monde alors qu'on n'avait aucune maîtrise sur cet ordre-là. Tout le monde pouvait venir quarante-huit heures avant la date de démarrage des dépôts faire la queue ou même le jour-j à 07h00. Aujourd'hui donc, le tirage au sort a le mérite d'éviter en fait cette cacophonie.

Toutefois, je considère que l'enjeu, c'est plutôt l'ordre de vérification des parrains et non l'ordre de dépôt des candidatures. Et pour cause, la loi électorale impose aux candidats indépendants et aux candidats soutenus par des coalitions de déposer leurs parrainages, non pas au moment de la déclaration de candidature, mais au plus tard la veille du dépôt de leur candidature.

Si je suis un candidat indépendant et que je devais déposer mon dossier de déclaration de candidature le 11 du mois, il faudrait impérativement que je me présente au greffe du Conseil constitutionnel le 10 pour faire la notification du titre de ma candidature et déposer en même temps mes parrains. Et si après tirage au sort, je sors premier sur la liste. Dans ce cas, j'ai l'obligation à l'ouverture des dépôts d'être sur place à l'heure. A défaut, si j'accuse du retard, on appelle le numéro 2 et mon dossier sera renvoyer à la dernière place et je deviens le dernier ainsi de suite ».

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.