Afrique: «On ne pense pas au football» - À Marrakech, la Gambie à reculons contre le Congo après le séisme

interview

Après qu'un séisme meurtrier a frappé le centre du Maroc dans la nuit du vendredi 8 au samedi 9 septembre, la CAF a décidé que la rencontre de qualification pour la CAN entre la Gambie et le Congo, prévue à Marrakech dimanche, sera maintenue, alors que le pays compte et pleure ses morts. Le sélectionneur de la Gambie, Tom Saintfiet, revient pour RFI sur la nuit vécue par son groupe et la préparation douloureuse pour un match que lui et ses hommes auraient préféré ne pas jouer.

Est-ce que vous pouvez nous raconter la nuit que vous avez vécue à Marrakech ?

On a fait une très bonne préparation les premiers jours. On est arrivés lundi ici, hier dans la nuit à 23 heures, heure locale, j'étais dans mon lit et c'était un grand choc. Au début, je pensais qu'il y avait quelqu'un qui tapait à ma porte. Et après, comme s'il y avait un avion dans l'hôtel, qui est très proche de l'aéroport. C'était vraiment un choc, parce que ce n'est pas quelque chose normal, c'est très agressif. J'ai le sentiment que ça prend longtemps, mais c'est seulement 30 secondes. Après, j'ai couru à l'extérieur à la piscine. Tous les joueurs, les membres du staff, et aussi d'autres touristes, étaient là. On a dormi à côté de la piscine.

Cela a dû perturber votre préparation, comment vous l'avez-vous vécue ?

On est restés toute la nuit à l'extérieur. On n'a pas pu rentrer dans l'hôtel parce que c'était toujours dangereux, on n'a pas beaucoup dormi. On est toujours au même hôtel et on doit préparer notre match de demain. Tous mes joueurs, tout mon staff a été choqué dans la nuit. Et c'est très grave pour toutes les personnes qui vivent ici. Les décès, les familles, c'est une catastrophe.

Et chez vos joueurs, quel est le sentiment qui domine ?

Pour le moment, il n'y a pas un bon sentiment. Il y a beaucoup de joueurs qui veulent rentrer à la maison. La majorité ne veut pas jouer le match, c'est clair. C'est comme être dans un film d'horreur, on ne pense pas au football. C'est un match très, très important pour nous. Parce qu'il nous faut une victoire ou un nul pour être qualifiés pour la deuxième CAN. Et ce n'est pas une préparation normale, il n'y a pas beaucoup de joueurs qui pensent au football.

Est-ce que vous pensiez que le match serait annulé ou reporté ?

Oui, pour moi, c'est la seule décision correcte (reporter la rencontre). On est à Marrakech, il y a plus de 1 000 personnes mortes et on parle de football, de jouer un match qu'on pourrait jouer en octobre. On peut se qualifier en octobre, c'est la même chose pour le Congo-Brazzaville. Pour moi, ce n'est pas normal de jouer ce match par respect pour les morts, pour toutes les familles, les personnes qui travaillent dans la police, les hôpitaux... Se concentrer sur un match de football, ce n'est pas un bon timing, je pense. La décision de ne pas jouer le match est la meilleure. Mais on n'est pas en contrôle. Tout ça, c'est la CAF qui décide. On doit jouer dimanche et on va tout faire pour se qualifier. Mais c'est très difficile.

Est-ce que vous avez peur des répliques depuis vendredi soir ?

Un tremblement de terre, on n'a pas de contrôle. Ça n'a pas été prévu vendredi soir. Pour nous, la meilleure décision est de retourner à la maison avec nos familles. Nous sommes des humains avec des familles. Mais quand la CAF décide qu'on doit jouer, on va jouer.

Et vous, en tant que coach, en quoi cette situation modifie votre approche du match ?

Ce n'est pas un match normal. Les visages des joueurs disent tout. Ils ne sont pas concentrés sur le football, ils n'ont pas la tête au match. On va faire tout ce samedi soir au dernier entraînement et ce dimanche dans la préparation de match pour créer un sentiment de concentration. Mes joueurs sont des athlètes, mais aussi des humains, je dois respecter ça.


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