Kolda, la capitale du Fouladou a abrité du 30 août au 04 septembre dernier une série d'ateliers de formation sur les stratégies de lutte contre le vol transfrontalier de bétail entre le Sénégal et la Guinée Bissau, phénomène qui engendre des pertes en vies humaines et en matériels ainsi que des préjudices d'ordre économique et social.
Il ressort de ces rencontres multi-acteurs civilo-militaires, le renforcement du dispositif de sécurité de proximité de concert avec les forces de défense et sécurité. C'est à l'initiative de Wanep/Sénégal et Guinée avec ses partenaires de mise en oeuvre que sont Enfance et Paix et Afrique Enjeux, sur financement de la coopération autrichienne pour le développement.
Cette série de sessions de formation multi-acteurs organisée la semaine dernière à Kolda à l'intention des participants des régions de Sédhiou, Kolda et Ziguinchor est une initiative de la West Africa Network for peace building (Wanep/Sénégal et Guinée Bissau), sur financement de la coopération autrichienne pour le développement. Les différents modules ont traité des mécanismes de prévention, de médiation, de sécurité de proximité et du système d'alerte précoce. Acteurs de la société civile, techniciens, élus et forces de défense et de sécurité y ont pris part.
Le coordonnateur de Wanep/Sénégal et Guinée a déclaré que « dans le cadre de ce projet, des comités de veille ont été installés de part et d'autre des frontières entre le Sénégal et la Guinée Bissau. Nous avons réuni ici à Kolda durant presqu'une semaine ces membres des comités de veille, des élus, des acteurs communautaires, des éleveurs, des chefs de village, techniciens de l'élevage, différents corps des forces de défense et de sécurité pour échanger sur la problématique du vol transfrontalier de bétail entre le Sénégal et la Guinée Bissau », a indiqué Alfred Gomis.
Et de poursuivre sur les modules dispensés : « les modules s'articulent autour de la médiation et des techniques de résolution pacifique des conflits ; et étant entendu que nous sommes à l'ère de la coproduction de la sécurité, nous avons donc mis ensemble les forces de défense et de sécurité pour échanger et s'entendre sur les mécanismes de prise en charge de la sécurité à travers ce que nous appelons la sécurité de proximité. Nous avons aussi formé nos moniteurs sur le système d'alerte précoce et de signalement des incidents ».
Les partenaires de mise en œuvre rassurent et exhortent à la synergie
Au niveau opérationnel, les partenaires de mise en oeuvre sont déjà à pied d'oeuvre avec des activités de sensibilisation communautaire pour renforcer les mécanismes de prévention. « Le vol de bétail est une problématique très sérieuse ici car datant de très longtemps. Et cette zone de frontière est encore très fragile en termes d'insécurité, d'où l'urgence de veiller à la préservation de la paix et de la stabilité sociale.
C'est un phénomène qui a appauvri nombre de foyers dans ces zones de frontière. Un beau jour, tu apprends que ton troupeau est convoyé de l'autre côté de la frontière, c'est atterrant vraiment. Mais à la suite de ces rencontres, nous osons espérer pour le mieux » dixit Mamadou Lamine Sadio, le coordonnateur de l'ONG Enfance et Paix couvrant la zone Kolda et Sédhiou.
Son collègue d'Afrique Enjeu Jules Bassène qui couvre le département de Ziguinchor et celui de Goudomp exhorte à cette synergie de terrain : « nous faisons appel à tous les acteurs et bonnes volontés pour qu'on trouve une solution durable à ce fléau qui affecte lourdement la cohésion sociale. C'est bien d'accompagner l'Etat dans la lutte contre ces vols armés. Et nous pensons avec raison que des stratégies communes seront trouvées et pourront éviter que les populations cherchent bien souvent à se faire justice elles-mêmes sous le coup de la colère et de la déception ».
Élus, dignitaires et techniciens à pied d'oeuvre !
Sur le terrain, les techniciens de l'élevage vulgarisent les stratégies d'identification et de traçabilité du bétail pour dissuader les malfaiteurs. L'exemple du village frontalier de Salikégny dans le département de Kolda en est une bonne illustration. Mme Anna Gomis, vétérinaire et chef de poste de Salikégny explique : « dans notre zone, nous menons beaucoup d'activités de lutte contre le vol de bétail.
Nous exhortons les populations et surtout les éleveurs à identifier leurs animaux et à prendre un laisser-passer sanitaire qui permet de faire la traçabilité des mouvements de l'animal. Pour ce qui est des puces électroniques, ce n'est pas encore généralisé mais c'est appliqué aux chevaux. Depuis que je suis venue ici, nous avons fait beaucoup de progrès en matière de lutte contre le vol de bétail », dit-elle.
Dans le département de Goudomp, le mal a pris des proportions inquiétantes, en attestent les dernières manifestations d'exaspération des populations du Balantacoubnda. Oumar Mané le président du Conseil départemental de la jeunesse de Goudomp s'engage dans la prévention arguant que « toutes les couches de la population manifestent leur volonté à combattre le phénomène. Nous exhortons à la dénonciation et la collaboration de proximité avec les forces de défense et de sécurité ». Le maire de Médina El Hadji Ousmane M'ballo dit être convaincu que le mal va baisser d'intensité eu égard à l'engagement communautaire et à la synergie des acteurs, espère-t-il.
Forces de défense et de sécurité satisfaites des perspectives de collaboration
Cette série d'ateliers de formation de Kolda recommande fortement une synergie des acteurs avec notamment les forces de défense et de sécurité présentes aux différentes sessions pour venir à bout du phénomène. Le lieutenant de police Cheikh Tidiane Ngom, le chef du poste frontalier de Salikégny, est d'avis que « le besoin d'impliquer la communauté dans les stratégies de lutte est toujours utile. On ne peut pas combattre ce phénomène sans l'implication de tous, surtout ces comités de veille et de vigilance et de l'ensemble des forces vives de la nation.
Nous, nous avons une solide expérience en zone de frontière et nous allons mutualiser nos forces avec les citoyens engagés » dit-il. Au sujet de cette collaboration justement, le capitaine Alexandre Mb. Diouf commandant la compagnie de la gendarmerie de Ziguinchor a animé avec dextérité plusieurs sessions sur la sécurité de proximité à la grande satisfaction de l'audimat qui s'engage à faire dans la dénonciation (information précise en temps réel) pour faciliter le travail des forces de défense et de sécurité.
Bissau prend le relai !
Cette semaine, c'est la Guinée Bissau qui abrite de pareilles activités de sensibilisation toujours sous la conduite de WANEP et de ses partenaires de mise en oeuvre dans le but d'inter-agir efficacement dans la pro-activité plutôt que de courir derrière des drames déjà accomplis au grand dam des communautés. Enfin, des mécanismes de suivi/évaluation sont aussi prévus pour le monitoring de la situation afin d'engager tous les acteurs dans le combat contre ce phénomène aussi vieux que le monde, le vol de bétail économiquement appauvrissant et socialement déstabilisateur.