Dakar — Le président de la République, en faisant d'Amadou Ba le candidat de Benno Bokk Yaakaar (BBY) à l'élection présidentielle du 25 février 2024, mise sur un haut fonctionnaire pourvu d'une expérience ministérielle de grande envergure, doublé d'un engagement politique de longue date.
Le candidat de la majorité présidentielle à la succession de Macky Sall est un fiscaliste qui a blanchi sous le harnais, de la base au sommet de l'administration des impôts et des domaines, à laquelle il a consacré vingt-cinq années avant d'entamer une riche carrière ministérielle.
Trois ans après la suppression du poste de Premier ministre de l'architecture institutionnelle sénégalaise, Macky Sall mise sur ce cadre de la haute administration des impôts et des domaines et ancien ministre des Affaires étrangères et de l'Économie et des Finances, pour matérialiser sa restauration en 2022.
Les relations entre le chef de l'État et l'homme qu'il choisit pour les commandes du gouvernement, le 17 septembre 2022, datent de 2006 au moins. Cette année-là, Amadou Ba devient directeur général des impôts et des domaines, une nomination qu'il dit publiquement devoir au Premier ministre de l'époque, un certain Macky Sall.
En ce qui concerne les études, le candidat de BBY, choisi par le président de la République parmi ses plus proches collaborateurs, dont Abdoulaye Daouda Diallo, Mame Boye Diao, Mahammed Dionne et Aly Ngouille Ndiaye, est titulaire d'une maîtrise de sciences économiques (1980) de l'Université de Dakar (devenue l'université Cheikh-Anta-Diop) et d'un brevet de l'ex-École nationale d'administration et de magistrature (1988). Il intègre ensuite les impôts et domaines et en gravit les échelons, de son premier poste d'affectation à Diourbel (centre) comme inspecteur stagiaire à la direction générale de l'administration fiscale.
Après sa formation professionnelle initiale au Sénégal, le jeune fonctionnaire jette son dévolu sur l'Institut international d'administration publique de Paris pour se perfectionner. Il se rend ensuite à Baltimore, aux États-Unis d'Amérique, pour étancher sa soif de savoir-faire. L'École nationale des impôts de Clermont-Ferrand, en France, l'accueille pour un stage de formation.
Chef d'inspection des impôts et des domaines à Dakar-Plateau (1990-1992), Amadou Ba devient ensuite commissaire contrôleur des assurances à la direction des assurances, jusqu'au milieu des années 90, et accède au poste d'inspecteur vérificateur des enquêtes fiscales.
Amadou Ba, l'artisan du Code général des impôts et du Plan Sénégal émergent, selon certains fonctionnaires
L'actuel chef du gouvernement a piloté le centre des grandes entreprises de la direction des impôts et des domaines, puis la direction des impôts (2004) et la direction générale des impôts et des domaines (2006). Pour certains fonctionnaires de l'administration fiscale et financière, il est l'artisan du Code général des impôts en vigueur depuis 2013 et du Plan Sénégal émergent, dont il a négocié le financement avec des partenaires économiques internationaux en 2014.
Nommé ministre de l'Économie et des Finances, le 2 septembre 2013, dans le gouvernement d'Aminata Touré, Amadou Ba entame une importante carrière ministérielle au cours de laquelle il ne dirigera que des ministères dits de souveraineté : l'Économie, les Finances, le Plan, puis les Affaires étrangères.
Mais en novembre 2020, il est écarté du gouvernement en même temps que d'autres poids lourds, dont Mouhamadou Makhtar Cissé (Énergie) et Aly Ngouille Ndiaye (Intérieur) : les ex-ministres sont victimes de leur trop-plein d'ambitions et se seraient mis à préparer silencieusement la succession du chef, selon la rumeur.
Mais, par ces retrouvailles dont la politique a le secret, le haut fonctionnaire doublé d'un militant de l'Alliance pour la République (APR) et ancien membre du Parti socialiste (PS) retourne au gouvernement et en prend la direction. Auparavant, il passait pour la coqueluche des médias, même s'il ne siégeait plus au Conseil des ministres et n'exerçait aucune fonction officielle.
Amadou Ba est un homme de belle allure. Des costumes de belle coupe et une mise toujours irréprochable.
Né le 17 mai 1961 à Dakar, c'est de cette ville qu'il fait sa base politique en adhérant à l'APR, le parti politique de Macky Sall, qui le fait élire député en juillet 2022.
On se trompe en le prenant pour « un néophyte en politique »
Marié et père de trois enfants, le quatrième Premier ministre de Macky Sall est décrit dans son entourage comme un féru de sport, de lecture et de jeux de l'esprit.
Le chef de l'État l'a nommé Premier ministre en raison de plusieurs qualités qu'énumère le secrétaire général de la présidence de la République, Oumar Samba Bâ, le 17 septembre 2022, au palais présidentiel : "compétence", "dévouement", "pragmatisme" et "efficacité".
S'exprimant lors d'une réunion au palais présidentiel, ce samedi 9 septembre, le chef de l'État a parlé des raisons qui ont conduit au choix d'Amadou Ba en invoquant sa "carrière diversifiée", ainsi que sa capacité d'écoute et ses qualités de "rassembleur".
L'actuel Premier ministre, en homme providentiel, dirige en même temps, depuis plusieurs mois, les ministères de l'Élevage et des Sports, en remplacement d'Aly Saleh Diop et de Yankhoba Diatara.
"Les analystes politiques, les adversaires et même ses partisans ont fini de se tromper à son sujet [en le prenant pour] un néophyte en politique", note à son sujet le site d'information Seneweb en septembre 2022, considérant sa candidature aux élections législatives de 2017 (sans succès) et de 2022 comme "la résurrection d'un dinosaure".
Selon le même média, le candidat choisi ce samedi 9 septembre 2023 par Macky Sall pour conduire BBY à l'élection présidentielle de 2024 faisait déjà partie des leaders socialistes des Parcelles Assainies, dans les années 90. Proche de Mamadou Diop, qui fut maire de Dakar pendant longtemps, Amadou Ba est élu conseiller municipal PS de la capitale en 1996.
L'homme est né à Grand-Dakar et a passé une partie de son enfance dans ce populeux quartier où on le surnomme Bayal, selon Seneweb.