Croire, après les trois buts contre le Botswana, qu'on a finalement une équipe complète et performante dans ses trois compartiments, c'est aller vite en besogne. La bonne assise défensive des nôtres ne doit pas cacher les limites du secteur offensif.
La large victoire de l'équipe de Tunisie sur le Botswana par trois buts à zéro, qui lui a permis, grâce au nul arraché dans les dix dernières minutes par la Libye à la Guinée équatoriale, de terminer première de son groupe, a été accueillie avec soulagement surtout que notre team national a trouvé des difficultés, voire de la peine pour trouver sa vitesse de croisière, imposer son style de jeu et trouver le chemin du but durant 60 minutes de jeu. Les trois buts inscrits, après cette longue période de tâtonnement dans un match facile, doivent nous inciter à plus d'humilité et de modestie dans l'analyse et le décryptage de ce succès plutôt qu'à cette euphorie excessive d'une qualification sur le fil à la première place.
En effet, nous avons plus d'un motif d'être prudents et mesurés et de ne pas céder à un sentiment d'autosatisfaction profond qui pourrait nous induire en erreur et nous jouer de très mauvais tours. D'abord, le statut de l'adversaire qui n'est pas une grande nation de football africain et mondial (classé 147e Fifa par rapport à la Tunisie 31e). L'écart entre les deux équipes est donc énorme. Puis vient l'absence d'enjeu et de motivation pour un adversaire déjà éliminé et qui n'avait rien à espérer de cette rencontre.
Normalement, le onze tunisien était en roue libre et aurait dû afficher et concrétiser son ascendant sur le match et sa suprématie dès la première mi-temps et ne pas attendre que l'adversaire lui ouvre le chemin des filets et lui redonne cet appétit de presser haut et de marquer. On peut avoir cet orgueil d'avoir fini les éliminatoires avec 13 points, 11 buts marqués et un seul but encaissé, de s'être très bien comporté défensivement, d'avoir gagné en puissance et en efficacité dans notre surface, mais on ne peut pas se cacher qu'au niveau rapidité dans la transition, animation offensive et efficacité dans la surface de l'adversaire, il y a encore pas mal d'automatismes à peaufiner et un bon nombre de lacunes à corriger.
Le collectif doit faire la différence
Contre ces modestes Botswanais, c'est le talent et l'expérience de Youssef Msakni, bien épaulé par le latéral Ali Abdi bien en jambes et généreux dans l'effort et les montées sur son flanc, qui a donné la solution après le premier but marqué de la tête par un adversaire.
Le second but est un coup de tête malicieux et bien piqué par Youssef tout comme le troisième qui est le fruit d'une jolie feinte de son pied droit et d'une frappe bien enroulée. On se demande si Youssef Msakni n'avait pas eu cette réussite, Jalel Kadri avait-il des solutions et des plans de jeu de rechange pour colmater cette éventuelle défaillance? Pour le moment, ce n'est ni sûr, ni assuré. Et puis, il faut se mettre dans la tête et prévoir que face à des équipes plus robustes et mieux organisées tactiquement, on ne peut pas toujours faire la différence sur une prouesse technique et un exploit individuel. On s'en rendra compte dès demain devant l'Egypte de Mohamed Salah.
Jalel Kadri doit donc travailler le collectif, la variété dans les profils et les choix de joueurs à vocation offensive. Hamza Rafia, Anis Ben Sliman, Elyès Achouri, Saifallah Ltaief et Hannibal Mejbri forment un groupe sur lequel il peut compter. Il doit aussi revoir sa copie pour les joueurs de pointe et les attaquants buteurs car Haithem Jouini, qui s'est bien démené et a beaucoup bougé sans ballon, a besoin de renforts et de concurrents à son poste.
Des joueurs du même calibre de Issam Jebali, Saifeddine Jaziri manquent terriblement à la sélection. Le jeune Anas Ben Mohamed est encore trop frêle et a besoin d'expérience pour être le pion de rechange immédiat. Le soutien indispensable du latéral droit ne peut être fructueux que par l'apport de Wajdi Kechrida ou Mohamed Drager après la sortie peu convaincante de Yann Valéry qui n'a pas été omniprésent et percutant dans le boulot offensif.
Gare donc à cet excès d'euphorie après les trois buts contre le Botswana, car le chemin est encore long et il y a plein de travail à faire pour s'améliorer. Ce n'est que contre les sélections de haut niveau que l'on retrouvera en phase finale de la CAN que l'on peut faire la bonne évaluation et afficher le sourire de satisfaction et cette euphorie des belles soirées de victoire.