Maroc: Début de polémique suite à la non-réponse de Rabat à la proposition d'aide de la France

Rabat, Maroc.

Plusieurs pays ont proposé leur aide à Rabat. Les autorités marocaines ont annoncé, dimanche 10 septembre dans la soirée, avoir accepté « à ce stade » les offres de quatre d'entre eux, l'Espagne, le Royaume-Uni, le Qatar et les Émirats arabes unis pour envoyer des équipes de recherche et sauvetage. Mais le Maroc n'a pas répondu à la proposition d'aide de la France, ce qui fait naître un début de polémique.

Pourquoi les autorités marocaines n'ont-elles pas encore accepté l'aide d'un pays historiquement proche dont l'expertise, en matière de catastrophes naturelles, est unanimement reconnue ? Est-ce en raison des mauvaises relations qu'entretiennent actuellement les deux pays ?

L'hypothèse a été balayée, ce lundi matin, d'un revers de main par Catherine Colonna, cheffe de la diplomatie française, chez nos confrères de BFM : « Permettez-moi de dire que c'est vraiment une mauvaise querelle, une querelle tout à fait déplacée. Nous avons fait une offre. Une soixantaine de pays ont fait des offres et le Maroc décide souverainement. »

À la question de savoir si, selon la ministre, cela n'a rien à voir avec le froid glacial - c'était le titre d'un des journaux marocains encore récemment - entre la France et le Maroc, Catherine Colonna insiste : « Le président de la République a échangé à de nombreuses reprises avec le roi du Maroc. J'ai eu, moi-même, mon homologue encore longuement hier.

Tous les contacts sont pris à tous les niveaux. Mettons ça de côté.

Mettons les tensions de côté, dit Catherine Colonna. Celles-ci sont pourtant assez fortes, depuis de longs mois. Rabat n'a plus d'ambassadeur à Paris, suite à une résolution du Parlement européen votée, en janvier dernier, dans laquelle les eurodéputés se disaient « profondément préoccupés » par la possible implication du Maroc dans un scandale de corruption qui touchait Bruxelles.

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Autres sujets de discorde, la question des visas, celle du Sahara occidental. Mais les autorités marocaines ont surtout mal vécu le rapprochement de Paris avec Alger l'an passé, un rapprochement dont la France semble encore aujourd'hui faire les frais.

▶Sahara occidental : « Le Maroc fait payer également cette position »

La première explication à cette affaire est d'ordre pratique : le Maroc veut garder la main sur la situation, évaluer ses besoins et ne pas surcharger les couloirs humanitaires. Mais la question du Sahara occidental, tout particulièrement, pourrait bien avoir quelque chose à voir avec le fait que les France n'a pas été sollicitée jusqu'ici, estime Beligh Nabli, professeur de droit et auteur d'un ouvrage intitulé Relations internationales.

« Il faut prendre en considération » cette donnée, explique-t-il. « De ce point de vue-là, sachant que c'est le dossier le plus important dans l'agenda diplomatique du Maroc, le choix de ces pays, de l'Espagne en particulier, est tout à fait significatif. L'Espagne a reconnu la souveraineté du Maroc sur ce territoire ou, dans tous les cas, a fait un grand pas dans ce sens et c'est un élément important, du point de vue du Maroc, qui a voulu, en accordant l'autorisation à l'Espagne d'intervenir, dans le cadre de cette crise, reconnaître précisément ce rapprochement diplomatique. » (écouter cet entretien en intégralité ici)

À l'inverse, cette même donnée, ce même critère, à savoir le dossier du Sahara occidental, a pesé ou pèse actuellement, disons, sur la froideur du Maroc quant à la proposition, l'offre d'assistance humanitaire, de la France, dans la mesure ou la France, précisément, n'a pas reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental et d'une certaine manière, le Maroc fait payer également cette position

00:54 Beligh Nabli, auteur de «Relations internationales»

RFI La position du Maroc est bien la conséquence des relations dégradées entre les deux pays, estime aussi Boris Vallaud, président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, qui appelle à ne pas engager cette polémique dans le contexte actuel, tout en envoyant un pique au chef de l'État.

Je suis d'avis, parce qu'il y a de très nombreuses victimes, de très nombreux morts, des gens blessés et encore beaucoup de disparus, qu'on ne s'engage pas dans une polémique sur un sujet qui mérite de la solidarité. Et les Françaises et les Français sont solidaires, ils l'ont largement exprimé, des victimes marocaines. Ensuite, si vous m'interrogez sur les relations d'Emmanuel Macron et son rapport à la diplomatie : oui, la diplomatie, ça ne se fait pas avec des enflures du ton, des effets de manche, et avec le sentiment que l'on peut, j'allais dire, conduire le destin du monde tout seul. Quand il fait de la diplomatie comme il fait de la diplomatie nationale, eh bien ça ne marche pas plus en matière de diplomatie qu'en matière de politique nationale.

00:34 Boris Vallaud, Parti socialiste

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