Afrique: Selon une nouvelle analyse du PAM, chaque réduction de 1 % de l'assistance alimentaire plonge 400 000 personnes dans une situation de faim aiguë

David Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial, visite le camp de personnes déplacées d'Iftin, en Somalie ravagée par la sécheresse, où plus de sept millions de personnes, soit près de la moitié de la population, souffrent d'insécurité alimentaire aiguë. (Photo archive)

ROME — Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies a lancé aujourd'hui un avertissement inquiétant pour la sécurité alimentaire mondiale, estimant que chaque réduction d'un pour cent de l'aide alimentaire risque de pousser plus de 400 000 personnes au bord de la faim. Le PAM est contraint de réduire considérablement les rations dans la plupart de ses opérations en raison de l'effondrement du financement international de l'aide humanitaire. Les experts de l'agence estiment qu'en conséquence, 24 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de la faim au cours des 12 prochains mois, soit une augmentation de 50 % par rapport à la situation actuelle.

"Alors que le nombre de personnes confrontées à la faim dans le monde atteint des niveaux record, nous devons augmenter l'aide vitale, et non la réduire", a déclaré Cindy McCain, directrice exécutive du PAM. "Si nous ne recevons pas le soutien dont nous avons besoin pour éviter une nouvelle catastrophe, le monde connaîtra sans aucun doute davantage de conflits, de troubles et de faim. Soit nous attisons les flammes de l'instabilité mondiale, soit nous agissons rapidement pour éteindre l'incendie".

Dans le monde, 345 millions de personnes sont actuellement confrontées à une insécurité alimentaire aiguë (IPC3+), dont 40 millions à des niveaux d'urgence de la faim (IPC4). Ces personnes sont contraintes de prendre des mesures désespérées pour survivre et risquent de mourir de malnutrition. L'assistance alimentaire du PAM est leur principal moyen de survie, et souvent la seule option qui les empêche de mourir de faim.

Alors que le PAM s'efforce de répondre aux besoins mondiaux en matière d'aide alimentaire, il est confronté cette année à un déficit de financement de plus de 60 %, soit le plus important jamais enregistré en 60 ans d'existence de l'organisation. Pour la première fois, le PAM a vu ses contributions diminuer alors que les besoins ne cessent d'augmenter.

Les experts de l'agence craignent une catastrophe humanitaire contraignant le PAM à ne sauver que les personnes qui meurent de faim, au détriment de celles qui en souffrent. Des réductions massives ont déjà été mises en oeuvre dans près de la moitié des opérations du PAM, notamment dans des zones sensibles telles que l'Afghanistan, le Bangladesh, la République démocratique du Congo, Haïti, la Jordanie, la Palestine, le Soudan du Sud, la Somalie et la Syrie. Les effets de ces réductions de l'aide vitale feront monter en flèche les niveaux d'urgence de la faim.

"Il n'y a qu'une seule façon de s'en sortir", a déclaré la cheffe du PAM. "Nous devons financer des opérations d'urgence pour nourrir les personnes affamées aujourd'hui tout en investissant dans des solutions à long terme qui s'attaquent aux causes profondes de la faim. Notre objectif commun doit être de mettre fin au cycle vicieux, insoutenable et coûteux de la crise et de la réponse".

NOTE A L'ATTENTION DE L'EDITEUR :

  • L'analyse conduite par la division Recherche, évaluation et suivi (RAM) du PAM a permis de calculer, au niveau macroéconomique, l'impact des réductions de l'aide du PAM sur les populations souffrant d'insécurité alimentaire au cours d'une période de 12 mois suivant une réduction de l'aide alimentaire humanitaire.
  • L'analyse révèle l'effet cumulé des réductions des opérations d'assistance du PAM à l'échelle mondiale. La relation entre les réductions et l'insécurité alimentaire n'est pas linéaire, une réduction de 10 à 11 pour cent de l'aide ayant un impact plus faible qu'une réduction de 45 à 46 pour cent, par exemple.
  • Pour définir la modélisation, la division RAM du PAM a examiné les six régions opérationnelles de l'agence (Asie-Pacifique, Moyen-Orient, Afrique de l'Ouest et Centrale, Afrique australe, Afrique de l'Est et Amérique latine) et a analysé l'ampleur de l'insécurité alimentaire actuelle et la mesure dans laquelle les gens répondent à l'aide alimentaire dans chaque région. Une moyenne a ensuite été calculée pour fournir au PAM une vue d'ensemble. Le calcul ne peut pas être appliqué au niveau individuel d'un pays.
  • L'analyse utilise un calcul basé sur les dépenses quotidiennes du PAM par personne (incluant les coûts alimentaires, la valeur totale des transferts en espèces et les coûts de distribution) et fait la moyenne de tous les programmes (assistance alimentaire et en espèces, nutrition, repas scolaires et programmes de résilience).
  • L'analyse ne prend en compte que l'impact des réductions de l'aide alimentaire du PAM sur la faim. Le modèle n'inclut pas d'autres facteurs susceptibles d'accroître la faim dans le monde, tels que les conflits ou les catastrophes climatiques, ou d'entraîner une amélioration, telle qu'une baisse de l'inflation alimentaire nationale.
  • Pour ne citer que quelques opérations qui ont déjà fait l'objet de réductions importantes de l'aide alimentaire : En Afghanistan, en mai, le PAM a été contraint de réduire de 66 % (8 millions de personnes) le nombre de ses bénéficiaires, tandis qu'en juillet, d'importantes réductions ont été opérées en Syrie, en Somalie et en Haïti : en Syrie, l'assistance a été réduite de 45 % (2,5 millions de personnes), en Haïti, le nombre de bénéficiaires a été diminué de 25 % (100 000 personnes), tandis qu'en Somalie, le PAM a ramené le nombre de bénéficiaires à 2,4 millions, soit une baisse de 49 % par rapport aux 4,7 millions de personnes aidées au plus fort de la réponse à la faim, à la fin de l'année 2022.

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