Madagascar: Gouvernement Collègial - Dix candidats chargent la Haute Cour Constitutionnelle

"Nous n'accordons plus aucune confiance aux membres de la Haute Cour Constitutionnelle (...)". C'est en ces mots que dix candidats à l'élection présidentielle concluent une lettre qu'ils ont signée le 11 septembre, et qu'ils adressent au président de la Haute Cour Constitutionnelle (HCC). Jusqu'ici, pourtant, ils restent encore dans la course.

À la lecture de cette missive, la cause de cette crise de confiance affirmée est la décision de l'institution d'Ambohidahy édictant que c'est au gouvernement d'assurer collégialement le rôle du chef de l'État par intérim. Ceci, suite à "la renonciation" de Herimanana Razafimahefa, président du Sénat. Selon les signataires de la lettre adressée au patron de la CENI, la HCC a fait "une mauvaise interprétation des dispositions constitutionnelles l'amenant à prendre une décision biaisée et, ainsi, à violer la Constitution".

Ces prétendants à la magistrature suprême ajoutent, "en réalité, nous suspectons que ces décisions et avis cités plus haut ont été dictés par le pouvoir qui a, de ce fait, opéré un véritable coup d'État institutionnel dans le but de mettre le Premier ministre aux commandes de l'État pendant la période électorale présidentielle afin d'en manipuler les résultats au profit de leur candidat". Après la candidature de Andry Rajoelina, c'est la HCC qui est la nouvelle cible des feux croisés de prétendants à la présidentielle. L'acrobatie juridique qu'a impliquée "la renonciation" du numéro Un de la Chambre haute est, cette fois-ci, l'angle de tir choisi.

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Pour les signataires de la lettre datée du 11 septembre, l'article 52 de la Constitution, auquel l'institution d'Ambohidahy s'est référée pour édicter l'intérim collégial par le gouvernement, ne devrait pas s'appliquer au cas de démission du président de la République, pour cause de candidature à l'élection.

Empêchement

La démission d'un Président candidat est prévue à l'article 46 de la Loi fondamentale. Il y est également prévu que l'intérim soit alors assuré par le président du Sénat. "Dans le cas où le Président du Sénat lui-même se porte candidat, les fonctions de chef de l'État sont exercées par le Gouvernement, collégialement", est prescrit à l'alinéa 3 de cette disposition constitutionnelle. Dans sa décision, publiée samedi, la HCC rapporte que Herimanana Razafimahefa lui a adressée une lettre, le 8 septembre, lui demandant "de constater sa volonté de renoncer à exercer les fonctions du chef de l'État par intérim". Le président du Sénat motive sa renonciation par "des raisons personnelles".

Face aux candidats, lors du tirage au sort de leur numéro, au siège de la CENI, lundi, Florent Rakotoarisoa, président de l'institution d'Ambohidahy, a expliqué cette décision. "Nous ne pouvons pas forcer une personne à assumer une fonction à laquelle elle renonce", est la réponse du numéro Un de la HCC. Arguant qu'il a été de ceux qui ont rédigé la Constitution, il a expliqué que les termes de l'alinéa 3 de l'article 46 et l'alinéa 3 de l'article 52 ont été prévus "afin d'éviter que la vacance à la présidence de la République ne nous conduise à sortir du cadre constitutionnel". Dans la lettre adressée au président de la CENI, les candidats signataires soutiennent, pourtant, que "la renonciation effectuée par le président du Sénat n'est prévue nulle part dans la Constitution".

À ce point, Florent Rakotoarisoa a répliqué en notant qu'elle entre dans la notion du mot "empêchement", à l'article 52 de la Loi fondamentale. " Ce mot doit être lu au sens d'entrave à l'exercice d'une fonction", défend-il. Selon l'alinéa 3 de la Constitution, "en cas d'empêchement du président du Sénat constaté par la Haute Cour Constitutionnelle, les fonctions de chef de l'État sont exercées collégialement par le gouvernement".

Le débat autour de la décision de la HCC vire au juridisme, suivant les sensibilités politiques de part et d'autre. Les arrêts, décisions et avis de la Haute Cour Constitutionnelle ne sont, cependant, susceptibles d'aucune voie de recours. Le cas échéant, cette fronde tend à préparer le terrain à d'éventuelles contestations post-électorales.

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