Afrique: Khartoum menace de s'en passer de l'UA pour arrêter la guerre

Après quatre mois de siège à Khartoum, le général Abdel Fattah al-Burhan multiplie depuis fin août les déplacements à l'étranger pour tenter de s'imposer sur la scène diplomatique mondiale en cas de négociations de paix. C'est dans ce climat qu'il s'est emporté contre l'Union africaine, disant pouvoir se passer de son aide dans le conflit qui oppose l'armée aux paramilitaires, après la rencontre entre le président de la Commission de l'organisation continentale, Moussa Faki Mahamat, et le conseiller politique des Forces de soutien rapide (FSR), Youssef Ezzat.

Depuis le 15 avril, une guerre oppose l'armée et les FSR du général Mohamed Hamdane Daglo, et les multiples tentatives internationales de médiation ont échoué. L'UA, qui souhaite résoudre ce conflit a du mal à le faire parce que les relations deviennent de plus en plus tendues entre elle et les autorités gouvernementales soudanaises, poussant l'actuel président du Conseil de souveraineté, Abdel Fattah al-Burhan, qui dirige le pays d'affirmer ouvertement « ne pas avoir besoin de l'aide » de l'UA si elle ne changeait pas d'approche.

Le ministère des Affaires étrangères soudanais a également réagi, qualifiant la rencontre Moussa Faki Mahamat-Youssef Ezzat de « précédent dangereux ». L'organisation panafricaine, a-t-il ajouté, « ne devrait pas accorder de place à des mouvements rebelles ou des milices terroristes ». Il se référait aux FSR que le général Abdel Fattah al-Burhan a dissoutes.

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Répondant aux critiques des dirigeants soudanais, la Commission de l'UA a affirmé dans un communiqué son engagement à dialoguer « avec l'ensemble des parties », une « approche identique » à celle adoptée par les autres acteurs internationaux ayant tenté des médiations, et qui n'a pas suscité de « réserves » de la part des acteurs soudanais.

Outre l'UA, le chef de l'armée soudanaise s'en est pris au bloc régional de l'Afrique de l'Est (Igad), après que le ministère des Affaires étrangères a reproché au Kenya, qui préside l'organisation, de soutenir les FSR. Les tensions entre le Soudan et l'organisation régionale sur cette affaire remontent au mois de juillet lorsque l'armée avait boycotté des pourparlers de paix organisés à Addis-Abeba, en Ethiopie, par l'Igad.

Depuis lors, Khartoum réaffirme son refus de coopérer avec le comité mis en place par l'Igad pour tenter de mettre fin à la guerre, exigeant un changement de présidence de ce comité. Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères a assuré que « si l'Igad ne répond pas à notre demande de changement de présidence (...) le gouvernement soudanais réexaminera la pertinence de sa participation à l'organisation ».

Appels à négocier un accord de paix

Pour tenter d'asseoir sa légitimité après cinq mois de guerre contre les paramilitaires, le général Abdel Fattah al-Burhan a effectué une tournée régionale. Il s'est rendu notamment en Egypte, au Soudan du Sud, au Qatar et en Erythrée. Partout où il est passé, le dirigeant soudanais a évoqué « la situation au Soudan et les défis rencontrés » avec les présidents égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, sud-soudanais Salva Kiir, érythréen Isaias Afwerki et l'émir du Qatar, Tamim ben Hamad Al-Thani. Tous ont demandé l'arrêt des combats et souhaité que toutes les forces politiques soudanaises négocient un accord global et une paix durable.

Si le dirigeant soudanais a multiplié des visites au Qatar depuis le début de la guerre, deux autres pays du Golfe sont à la manoeuvre. D'un côté, l'Arabie saoudite s'est érigée en médiatrice aux côtés des Etats-Unis, n'obtenant finalement qu'une série de trêves qui n'ont pas duré. De l'autre, les Emirats arabes unis soutiennent le général Mohamed Hamdane Daglo qui tient une bonne part des mines d'or du Soudan. Abou Dhabi est le premier acheteur d'or du pays.

Les rumeurs de négociations pour une sortie de crise se multiplient ces derniers temps. Ce qui n'a pas empêché les Etats-Unis d'annoncer des sanctions visant des responsables des FSR dont le frère de leur dirigeant, tout en débloquant une nouvelle aide humanitaire pour ce pays ravagé par la guerre. Celle-ci a déjà fait près de 7.500 morts, selon l'ONG Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled).

Les sanctions visent notamment Abdelrahim Hamdane Daglo, frère du dirigeant des paramilitaires, le général Mohamed Hamdane Daglo, dont les forces sont accusées d'avoir commis des violations des droits de l'Homme et abus y compris des violences sexuelles en particulier au Darfour, une région de l'ouest du Soudan, selon un communiqué du département du Trésor. Est également visé le commandant des FSR au Darfour-Ouest, le général Abdul Rahman Juma, pour son implication dans des atrocités commises par ses forces dans cette région.

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