Des artistes nigériens ont réagi à la décision des autorités françaises de suspendre toute coopération avec les artistes du Mali, du Niger et du Burkina Faso.
"Cette décision ne nous surprend pas car la France a mal que nos pays qui furent ses anciennes colonies décident aujourd'hui de se libérer totalement de son joug", a indiqué Oumarou Issoufou dit "Phéno", précident de l'Association Nigérienne des Auteurs Compositeurs et Interprètes des Métiers de la Musique (ANACIMM), dans une déclaration à Anadolu.
"Si la France peut s'en aller et laisser nos pays jouir de leurs richesses naturelles et du sous-sol qu'elle exploite depuis des décennies, cela ne nous fera ni chaud ni froid qu'elle suspende toute subvention", a-t-il ajouté. "Les artistes nigériens que nous sommes ne fonctionnent pas qu'avec les subventions de la France qui sont d'ailleurs minimes et orientées. Notre priorité aujourd'hui au Sahel c'est d'abord l'insécurité", a déclaré à Anadolu Diassibo Tchiombiano, un des reggaeman engagés du Niger.
"Cette décision confirme l'amateurisme de la diplomatie et qui ne respecte aucune valeur et aucune règle. Elle fait aussi ressortir l'ignorance des décideurs français de leurs propres textes en particulier les fondements de l'exception culturelle française de la Francophonie", a réagi Dr Saley Boubé Bali, écrivain et membre de l'Association des écrivains du Niger, dans une déclaration à Anadolu.
"Cette décision aura des conséquences sur le plan artistique et social car elle va affecter la mobilité des artistes des trois pays concernés où c'est l'ambassade de France qui délivre les visas même pour aller dans les autres pays européens", a-t-il déploré. Toujours selon l'écrivain, beaucoup de manifestations culturelles organisées dans chacun des trois pays, comme le théâtre des réalités au Mali, le festival Émergences au Niger et le Fespaco au Burkina Faso, risquent de ne pas se tenir, car "les créateurs culturels des trois pays ont pour principaux partenaires ceux de la France à cause de la langue d'une part et de l'importance des Centres culturels et des Alliances françaises dans lesdits pays pour la création et la diffusion des oeuvres, d'autre part".
La France dispose de deux centres culturels au Niger, dont l'un est basé dans la capitale Niamey et l'autre à Zinder, la deuxième ville du pays située au sud-est et frontalière du Nigéria. Jeudi, des médias français ont rapporté un message des Directions générales des affaires culturelles françaises demandant aux structures culturelles relevant de ses services de "suspendre toute coopération" avec les artistes du Mali, du Niger et du Burkina Faso.
"Tous les projets qui sont menés par vos services avec des institutions ou des ressortissants de ces trois pays doivent être suspendus sans délai", a indiqué la décision, précisant que même la délivrance des visas est suspendue pour les artistes des trois pays.
Dans un communiqué publié jeudi soir, le ministère français de la culture a indiqué que "pour des raisons de sécurité", la France a suspendu délivrance des visas à partir du Niger, du Burkina Faso et du Mali, ainsi que toute coopération culturelle avec les trois pays. Depuis la prise du pouvoir par les militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger, les relations entre la France et ces trois pays sont devenues très tendues. Les autorités militaires de chacun des trois pays ont demandé le départ des troupes françaises.