Une semaine après le début des inondations qui ont endeuillé la Libye, les autorités et les services de secours peinent à dresser un bilan précis de la pire catastrophe naturelle que ce pays a connue depuis 1942.
Près de 11 500 victimes ont été dénombrées, le 17 septembre, et la course contre la montre continue afin de retrouver plus de 10 000 personnes portées disparues dans la ville de Derna, devenue dès les premières heures, l'épicentre du désastre.
Le bilan pourrait donc s'alourdir dans les prochaines heures au regard du décor apocalyptique de plusieurs milliers de maisons englouties dans les rues et ruelles maculées de boue de cette cité martyre.
Outre le nombre incroyable de sacs mortuaires alignés ou entassés les uns sur les autres, et les probables victimes toujours coincées sous les décombres, il faudra braquer les projecteurs sur la mer, dans laquelle des flots de plusieurs mètres de hauteur se sont jetés avec toutes ces personnes considérées aujourd'hui comme disparues.
Si l'on sait, à l'heure où nous traçons ces lignes, que la plupart des naufragés ont été emportés vers la mer par les torrents d'eau qui se sont échappés des deux barrages de la ville de Derna, on se pose toujours des questions en revanche sur les véritables causes de cette crue spectaculaire et dévastatrice sans précédent dans l'histoire récente de la Libye. Effet climatique ?
Infrastructures hydrauliques vétustes ? Services météorologiques défaillants ? Peut-être qu'il y a un peu de tout cela dans cette comptabilité macabre, et des leçons doivent être rapidement tirées afin d'éviter, ou à tout le moins, de minimiser les conséquences de cette folie de la nature.
Le décompte final des victimes révèlera sans doute des statistiques effroyables
Certes, dans un pays embourbé au propre comme au figuré, dévasté par une décennie de guerre et de chaos, il est quasiment impossible de trouver la recette ou la formule magique pour régler tous ces problèmes potentiels.
Mais les autorités qui contrôlent cette partie du pays, doivent prendre des mesures idoines pour faciliter le travail de toutes ces bonnes volontés et de tous ces humanitaires qui ont accouru de partout pour sauver ce qui peut encore l'être.
Il est déjà heureux de constater que les deux camps qui se disputent la Libye depuis 2011, ont mis temporairement en sourdine leur antagonisme pour ne pas entraver le travail des secouristes, qu'une aide alimentaire aux milliers de déplacés a commencé à être fournie et que, dans le même temps, un appel de fonds de plusieurs millions de dollars a été lancé pour soutenir les plus vulnérables.
Face à l'immensité des besoins, les amis et partenaires traditionnels de la Libye mettent les petits plats dans les grands, afin de juguler la crise humanitaire et les risques majeurs de propagation de maladies à transmission hydrique et vectorielle comme le paludisme, la dengue et le choléra.
L'état d'urgence sanitaire devrait d'ailleurs être décrété dans toute la zone sinistrée, et une riposte nationale et internationale rapidement déclenchée pour ne pas amplifier davantage les conséquences néfastes du déluge.
Il ne faut pas, en effet, oublier qu'au-delà de la destruction massive des maisons d'habitation et des risques sanitaires encourus, plusieurs centaines de milliers de Libyens seront, dans les prochaines semaines, en insécurité alimentaire et nutritionnelle, en raison d'une inflation incontrôlable des prix des produits de première nécessité.
C'est vrai que les Libyens ne seront pas abandonnés à eux-mêmes face à cette terrible épreuve. Mais le décompte final des victimes sera difficile et révèlera sans doute des statistiques effroyables qui auront, espérons-le, le seul mérite de rappeler à tous les Libyens, l'impérieuse nécessité de se mettre en ensemble, dans la paix et au nom du destin commun, afin de reconstruire tout ce que l'indomptable nature a détruit avec rage.
Après tout, on peut toujours trouver quelque chose de positif dans un événement fâcheux comme nous l'enseigne le proverbe, et nos frères de la Libye ont ici plus que jamais, l'occasion de le démontrer.