Sénégal: Pr Ibrahima Cissé, Recteur de l'Université Amadou Mahtar Mbow - « Nous avons entamé une nouvelle phase de plan de développement »

19 Septembre 2023
interview

Inaugurée en 2022, l'Université Amadou Mahtar Mbow de Diamniadio (Uam) a entamé sa montée en puissance suivant un phasage bien déterminé. Selon son Recteur, Pr Ibrahima Cissé, c'est dans ce cadre qu'il est prévu, dès la prochaine rentrée, le lancement de trois Unités de formation et de recherche (Ufr) et le regroupement des cinq écoles supérieures au sein d'une entité dénommée « Polytec Diamniadio ». Dans cet entretien, M. Cissé revient aussi sur l'expansion de l'institution comme recommandé par la tutelle. Il n'a pas manqué de rassurer les étudiants en annonçant l'ouverture de Masters, dès l'année 2023-2024.

Pr. Cissé, vous avez tenu, fin août, un séminaire de trois jours sur l'expansion de l'Uam. Que retenir de cette rencontre ?

Du 25 au 27 août 2023, s'est déroulé, à Saly Portudal, un séminaire de partage des résultats des travaux entrepris par le Groupe de réflexion sur l'expansion de l'Université Amadou Mahtar Mbow (Uam) de Diamniadio. Ce séminaire résidentiel a été élargi à l'ensemble de la communauté universitaire de l'Uam, ainsi qu'aux experts des universités publiques sénégalaises, du monde socioprofessionnel, des Isep et aux représentants du Ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation (Mesri). Après avoir exploité les documents contenant les cadres de référence préalablement définis, dès les débuts du projet, le Groupe de réflexion sur l'expansion de l'Uam s'est attelé à élaborer les approches pratiques pour mettre en oeuvre trois Unités de formation et de recherche (Ufr) et une nouvelle structure qui va regrouper 5 grandes écoles actuelles. Ces nouvelles entités ont été consignées dans un prérapport de la manière suivante : Il y a l'Ufr Sege (Sciences économiques et de gestion des entreprises) avec 2 filières, économie et gestion ; Ufr Tecna (Technologies de la communication numérique et de l'audiovisuel) qui, également, dans un premier temps, devra ouvrir 2 filières (infographie et design et communication et journalisme numérique); l'Ufr Sta (Sciences et technologies avancées), aussi avec 2 filières au départ : mathématiques, physiques, informatique et sciences de la mer et du littoral. De plus, il a été décidé la mise en place d'une grande école dénommée « Polytech Diamniadio », destinée à regrouper les cinq 5 écoles existantes de l'Uam. Et si nécessaire, de nouveaux départements pourront être établis. De surcroit, ces établissements conserveront leurs filières spécifiques au sein de la structure Polytech Diamniadio.

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Qu'est-ce qui justifie la création de ces trois Ufr dès la prochaine rentrée d'autant que l'université compte cinq écoles supérieures déjà opérationnelles ? Est-ce que toutes les conditions sont réunies ?

Cette année, l'État du Sénégal doit orienter près de 77.000 bacheliers à l'échelle nationale. Face à cette augmentation constante, l'Uam s'adapte en fonction de ses capacités d'accueil et son engagement en faveur d'une éducation de qualité. L'université dispose déjà de salles de cours pouvant accueillir 4.500 étudiants et de services sociaux modernes, dont 5.000 lits. L'Uam entame, en ce moment, une nouvelle phase de son plan de développement décliné depuis son existence. Pour une montée en puissance, il est donc impératif de mettre en place des Ufr pour répondre aux demandes croissantes de flux d'étudiants et par la même occasion proposer un regroupement des écoles avec un tronc commun pour mieux optimiser. Actuellement, l'Uam compte environ 1.200 étudiants répartis dans les 5 écoles existantes. Il est important de noter que le nombre d'étudiants dans chaque école est limité en raison de la spécificité de certaines filières, principalement dans le domaine des sciences et technologies. Cependant, ces écoles seront regroupées avec leurs filières respectives au sein de la nouvelle entité appelée « Polytech Diamniadio ». En conséquence, en réponse à la demande de l'État du Sénégal et pour répondre aux besoins en formation de qualité des nouveaux bacheliers, le Ministère de tutelle (Mesri) a confié à l'Uam la tâche de développer de nouvelles structures de formation.

Les étudiants demandent le maintien du concours comme critère d'entrée à l'Uam alors qu'on parle d'orientation. Qu'en est-t-il réellement ?

Dans son mode de fonctionnement, l'Uam est destinée à monter en puissance suivant un phasage maîtrisé. Projetée, à terme, à 30.000 étudiants, il est évident que l'Uam n'a pas encore atteint sa pleine capacité. Dans cette nouvelle phase, l'Uam se dote de trois nouvelles structures de formation et de recherche, en plus des 5 écoles avec lesquelles elle a commencé les enseignements-apprentissages, il y a plus de 3 ans. En ce qui concerne l'accès à l'Uam, deux possibilités sont d'ores et déjà prévues pour les nouveaux bacheliers. Les étudiants peuvent être admis par le biais d'un concours pour accéder à Polytech Diamniadio. Ainsi, le concours est maintenu à ce niveau. Cependant, pour ce qui est des trois nouvelles Ufr, l'accès se fait via la plateforme d'orientation Campusen. Cette plateforme est déjà opérationnelle et l'Uam a déjà intégré toutes les filières de ses nouvelles structures, ainsi que leurs critères d'admission.

Lors de l'inauguration de l'Uam en décembre 2022, vous aviez plaidé auprès du Président Macky Sall le renforcement du personnel (Per, Pats) pour accompagner sa montée en puissance. Qu'en est-il aujourd'hui ?

À la rentrée 2022-2023, l'Uam disposait déjà d'une trentaine d'enseignants répartis dans les 5 écoles. De plus, nous avions l'accompagnement de 250 intervenants (vacataires) universitaires et professionnels pour nos formations.

Avec la création de ces nouvelles Ufr, sur commande de l'État du Sénégal via le Mesri, nous osons espérer un accompagnement des autorités pour le recrutement de nouveaux enseignants-chercheurs et personnels administratifs et techniques (Per et Pats). En fait, ces travaux sur l'expansion de l'Uam sont en parfait accord avec cette plaidoirie que j'avais émise. Pour accompagner le plan de développement de l'Uam, l'autorité a recommandé à l'établissement de mettre en place de nouvelles structures de formation et de recherches. Une telle démarche exige, comme mentionnée précédemment, un renforcement des ressources pédagogiques, y compris le personnel enseignant et administratif (Per, Pats), ainsi que des améliorations à la bibliothèque. Cela implique également l'acquisition de mobilier, la poursuite des travaux de construction et bien d'autres aspects.

L'Uam a noué un partenariat avec des universités belges. Certains de vos étudiants séjournent depuis mars dernier dans ce pays. Pouvez-vous revenir sur le sens de cette coopération ?

L'Uam a signé une trentaine de conventions de coopération avec des universités et institutions d'enseignement supérieur réparties dans tous les continents. Ces conventions de coopération portent sur l'ensemble des champs disciplinaires communs aux institutions, notamment au point de vue de l'enseignement, de la recherche et de la mobilité du personnel et des étudiants. En ce qui concerne la Belgique, pour répondre à votre question, l'Uam a noué des accords de partenariat avec des universités et des entreprises belges, notamment l'Université Libre de Belgique (Ulb), l'Université de Liège (Ulg) et le consortium Univercells (Quantoom, Biosciences, Exothera, Unizima, la Haute École pratique des hautes études commerciales (Ephec), etc. Avec l'Université de Liège (Ulg), Gembloux Agro-Bio Tech, l'Uam a signé un projet de partenariat intitulé « Formation des étudiants et jeunes leaders en création et gestion durable d'entreprises dans le domaine de l'agriculture, de l'élevage et de l'alimentation ». Concernant Univercells, l'accord-cadre consiste à accompagner tous les 6 étudiants de la promotion 2022 titulaires d'une licence en génie des procédés dans un stage de six mois axé sur les biosciences, avec un accent particulier sur la bio-informatique. De plus, 3 enseignants répartis en deux groupes supervisent simultanément les étudiants pendant ce stage.

Les étudiants réclament l'ouverture des programmes de Master. Pourquoi ça tarde à se faire ?

Tout d'abord, il est important de souligner que l'ouverture des programmes de Master doit répondre à des critères d'excellence. À l'Uam, la formation pluridisciplinaire repose sur une application rationnelle du système Lmd avec une forte mutualisation de la formation et des ressources. Malgré sa création récente, l'Uam est parfaitement intégrée dans le système Lmd. Cependant, certaines écoles d'ingénieurs avaient choisi de débuter avec des programmes de diplôme d'ingénieur. En revanche, d'autres envisagent de proposer des programmes de Master. Dans tous les cas, toutes les écoles regroupées au sein de Polytech Diamniadio offriront soit un deuxième cycle en ingéniorat, soit des programmes de Master, au moins. Il est également important de rappeler que les autorités suggèrent d'aller vers des programmes de Master interuniversitaires. Et puis, c'est devenu la tendance actuelle. Dans ce contexte, de nombreux étudiants titulaires d'une Licence en urbanisme et aménagement du territoire, en économie et gestion, ainsi qu'en informatique, poursuivent actuellement leur deuxième cycle à l'Université numérique Cheikh Hamidou Kane. Tous les étudiants ayant obtenu une Licence en Génie civil ont été admis à l'Ufr des Sciences de l'ingénieur de l'Université Iba Der Thiam de Thiès. À la rentrée 2022-2023, en dépit de l'absence de programmes de Masters, l'Uam s'est appuyée sur la mobilité pour permettre aux étudiants qui le souhaitent de s'inscrire dans les universités publiques du Sénégal. Tous les étudiants en génie des procédés ont été acceptés en Belgique (Quantum, Univercells, Ulb) pour un stage de perfectionnement dans le domaine de la bio-informatique. Ainsi, d'importants efforts ont été déployés pour accompagner tous les titulaires de licences dans des programmes de deuxième cycle, des stages et des opportunités professionnelles. Trois étudiants de la filière informatique ont d'ailleurs été recrutés par l'Uam. Par ailleurs, les perspectives de formation en second cycle, notamment, l'ouverture de Masters et du cycle d'ingénieur dans les écoles, à partir de la rentrée 2023-2024, ont été validées par le Conseil académique. À cet égard, les directeurs d'école sont tous engagés dans la perspective de proposer des programmes de second cycle. Des cycles d'ingénieur pour certaines écoles et des Masters pour d'autres.

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