Près de 200 personnes, des ressortissants français au Burkina Faso, ont monté le collectif « Vivre ensemble au Faso ». Ils estiment que les autorités françaises, en stoppant notamment les demandes de visas, attisent les tensions dans le pays.
Ces ressortissants français au Burkina Faso dénoncent les décisions diplomatiques de Paris. Samuel Bernier est l'un des porte-parole de ce collectif « Vivre ensemble au Faso ». Il est au micro de Guillaume Thibault de la rédaction Afrique de RFI.
« Il y a beaucoup d'impact par rapport aux dernières mesures politiques qui ont été prises par le gouvernement français. Dans la lettre, on parle de la suspension des visas, des familles qui ont été séparées, des artistes qui ne peuvent plus exercer leur métier, des médecins qui espéraient pouvoir être formés en France et qui ne pourront plus ; les étudiants, c'est la même chose et je ne parlerai pas de la suspension des adoptions internationales qui me semble quand même être une mesure un peu exagérée.
Nous, par rapport à ce qu'on constate sur place, on ne comprend vraiment pas notre gouvernement qui rentre dans une escalade d'hostilité diplomatique. Nous, on ne juge pas du tout de la position du Burkina Faso : on parle, on s'adresse à l'exécutif français. Et non seulement notre image est salie puisqu'on est Français, mais en plus nos droits, on en a perdus.
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Donc, à un moment, ça a créé ce mouvement que je considérerais comme historique puisqu'il rassemble des personnes complètement différentes, qui ont réussi à se rassembler pour faire face à l'adversité. »
Lancée par le Collectif pour « UN MIEUX VIVRE ENSEMBLE AU BF »
SOUTIEN À LA LETTRE OUVERTE DE CITOYENS FRANÇAIS ET EUROPÉENS DU BURKINA FASO A L'EXÉCUTIF FRANÇAIS
« Nous, collectif d'une centaine de citoyens français et européens résidant au Burkina Faso pour certains depuis plusieurs décennies, porteurs de diverses nationalités, issus de divers corps de métier, de tous horizons politiques, et subissant les effets de l'escalade des hostilités diplomatiques, exprimons notre profonde désapprobation par rapport aux positions et décisions du gouvernement français vis à vis du Burkina Faso au cours des dernières semaines, lesquelles ont d'importantes répercussions sur le vivre ensemble dans ce pays.
Des mesures unilatérales et contre-productives aux impacts dramatiques pour les personnes
L'arrêt de la délivrance de visa aux ressortissants burkinabè, le classement de l'ensemble du pays en zone rouge, la suspension de l'aide publique au développement et de la coopération, y compris culturelle, ainsi que la réduction des effectifs consulaires ont des conséquences graves :
En raison de l'arrêt de la délivrance des visas et de la réduction des effectifs consulaires, l'accès des personnes, qu'elles soient burkinabè, françaises, franco-burkinabè, ou d'autres nationalités impactées, à leurs droits et aux opportunités qui leur sont offertes est rendu complexe, voire impossible.
Des familles binationales sont séparées, des artistes ne sont plus en mesure d'exercer leur métier, les échanges culturels sont suspendus, des médecins burkinabè ne peuvent partir se former en France, des étudiants et chercheurs qui pensaient pouvoir y poursuivre leurs études ou leur recherche, notamment après l'obtention de bourses, sont bloqués...
Nous considérons que l'arrêt de la délivrance des visas aux ressortissants burkinabè et la classification en zone rouge de l'ensemble du pays sont des mesures profondément injustes et injustifiées, qui s'apparentent à de la rétorsion suite à la prise de position burkinabè sur les développements au Niger : nous ne constatons pas, nous qui sommes sur place, une augmentation de l'insécurité dans les villes de Ouagadougou, Bobo Dioulasso et Koudougou qui justifierait cette reclassification, encore moins l'arrêt total de la délivrance de visas aux ressortissants burkinabè.
En raison de la suspension brutale des différents appuis publics au développement, de nombreuses coopérations bilatérales risquent d'être pénalisées et des salariés de ces projets licenciés.
Le ralentissement des flux commerciaux et de personnes impacte négativement les opérateurs économiques locaux et internationaux travaillant avec la France et menace de nombreux emplois locaux.
Ces décisions du gouvernement français, unilatérales et contre-productives, viennent alimenter les tensions et la rancoeur, fragiliser les relations de qualité qui existent entre citoyens de nos différents pays.
Citoyens français, européens et burkinabè, nous sommes liés !
Au-delà des relations entre nos différents États et nos gouvernants, il existe une multitude de liens personnels et professionnels entre familles, associations, entreprises, artistes, étudiants, chercheurs, etc. qui sont garants du bien-être et du développement social et économique des citoyens de nos nations. Ces liens doivent être préservés, perdurer et se renforcer, indépendamment des tensions diplomatiques actuelles entre nos États. Sans ces relations d'amitié entre nos peuples, rien de nouveau ne pourra voir le jour. Si nous brisons ces liens, comment reconstruirons-nous le vivre-ensemble ?
Laissez-nous l'espace nécessaire pour maintenir cette solidarité humaine !
Pour sauvegarder le patrimoine humain interculturel que nous nourrissons, entretenons et construisons tous les jours ici, trois mesures doivent être prises sans délai :
L'annulation du classement en zone rouge des villes de Ouagadougou, Bobo Dioulasso et Koudougou ;
La reprise de la coopération (scientifique, académique et culturelle) et des actions d'appui au bénéfice des populations burkinabè ;
La reprise immédiate de la délivrance de visas aux ressortissants burkinabè, par exemple par l'instruction des dossiers par voie électronique.
Nous vous remercions par avance pour l'attention et les réponses que vous apporterez à cette
lettre, rédigée et validée collectivement, porteuse de nos convictions, de nos craintes et de nos
espoirs.
Ouagadougou, le 19 septembre 2023 »