Congo-Kinshasa: Principes volontaires sur la sécurité et les droits humains - Les militaires accusés de créer de l'insécurité dans les entreprises minières

Citant le cas de l'entreprise Comide, l'ONG Justicia ASBL pense que les éléments des Forces armées de la République démocratique du Congo (Fardc) ne devraient pas être mis à contribution pour sécuriser les entreprises minières.

L'organisation de promotion et protection des droits humains et développement basée en République démocratique du Congo (RDC), Justicia ASBL, facilitatrice du groupe de travail sur les principes volontaires en matière de sécurité et droits humains pour les provinces du Haut-Katanga et du Lualaba, s'est dite vivement préoccupée par la montée des incidents sécuritaires sur les sites des entreprises minières opérant dans ces deux provinces précitées. Cette organisation motive ses inquiétudes par le dernier cas en date lié à des événements inédits survenus sur la mine de Comide, qui est une entreprise membre du groupe ERG2.

Selon cette ONG, dans la nuit du 13 au 14 septembre, près d'une centaine d'éléments des Fardc ont investi les installations de cette entreprise, où ils ont cassé le matériel de forage, brûlé les tentes servant d'abri aux éléments de la police des mines et menacé quelques autres éléments des Fardc qui ont abandonné le dépôt d'explosifs que l'entreprise utilise pour les services de minage. « Cet abandon du site d'explosifs entre les mains des personnes incontrôlées constitue un grand danger non seulement pour l'entreprise, mais aussi pour les communautés locales qui sont tout autour de la mine de Comide », a alerté Justicia ASBL dans son communiqué signé le 18 septembre.

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Une alliance avec des jeunes délinquants

Citant des informations en sa possession, l'ONG note que ces militaires envahisseurs se seraient ligués avec des jeunes des villages voisins du site se réclamant membres du parti politique Union nationale des fédéralistes congolais (Unafec) et disposant des machettes et autres armes blanches. Et de souligner que ce groupe ainsi constitué percevrait indûment des taxes auprès des coopératives et autres creuseurs illégaux qui alimentent ce vaste réseau maffieux avec la bénédiction de quelques services de l'Etat.

L'organisation rappelle, en outre, que ces incursions musclées dateraient de plusieurs mois ou années déjà, et que des coopératives appartenant aux sujets libanais et pakistanais seraient de mèche avec un certain Claude Kipeleka, se faisant passer pour un des conseillers du président de la République, Felix Antoine Tshisekedi. «Les précités, avec leurs coopératives illégales et creuseurs clandestins à l'appui, utilisent des engins pour extraire de manière industrielle plus de cent camions de minerais riches en cuivre et cobalt par jour au vu et au su des autorités provinciales », regrette Justicia ASBL. Et de s'inquiéter que « des alertes lancées par la société civile et l'entreprise elle-même ne soient suivies d'aucune action du gouvernement central, laissant crédibiliser les rumeurs selon lesquelles des personnalités proches de la famille du chef de l'Etat tireraient des avantages de cette exploitation minière sauvage ».

Justicia ASBL dit, par ailleurs, s'étonner que malgré les dénonciations contenues dans des rapports officiels et non officiels indexant certains membres de la famille du chef de l'Etat comme bénéficiaires directes de ce vaste réseau maffieux, ce dernier n'a pris aucune mesure pour les en empêcher, donnant ainsi l'impression que les investisseurs miniers en RDC ne seraient pas sécurisés. « Pire encore, même les annonces faites par l'auditeur supérieur près la Cour militaire de l'ex-Katanga enjoignant les militaires d'évacuer les sites miniers dont l'échéance a été écoulée depuis le 17 septembre 2022 conformément à sa lettre émise le 13 septembre 2022 portant le numéro AMS/KAT/0385/012/22 avec comme objet retrait de tous les éléments dans les mines, dépôts miniers et autres, sont restées lettre morte, à croire que le réseau maffieux est tellement puissant qu'il échappe à tout contrôle du pouvoir », a souligné cette organisation.

Pour mettre fin à cette situation décriée, Justicia ASBL dit attendre du chef de la maison civile du chef de l'Etat de diligenter une enquête sur sieur Claude Kipeleka et de le traduire en justice pour l'utilisation des militaires à commettre des actes contraires à leur devoir et des violations des droits humains. La maison civile du chef de l'état est également exhortée à sensibiliser tous les membres de la famille présidentielle à ne pas être parmi les personnes qui ternissent le nom du chef de l'Etat.

Cette ONG recommande à l'auditeur général près la Haute Cour militaire d'ouvrir des actions en justice contre tous les militaires ou magistrats militaires qui se seraient compromis dans la commission des violations des droits de l'homme sur le site de Comide et autres sites miniers qui sont victimes et de contribuer à l'application de la mesure prise par le Conseil supérieur de sécurité lors de la réunion du 13 avril 2019 tenue à Lubumbashi, interdisant la présence des militaires sur les sites miniers.

Le chef d'Etat-major des Fardc est, quant à lui, appelé à déployer une nouvelle équipe des militaires dans les provinces du Haut-Katanga et du Lualaba pour faire déguerpir tous les militaires et policiers non éligibles qui sèment la terreur et désolation sur les sites miniers. Alors que l'entreprise minière Comide est conseillée de faire connaître ses préoccupations aux autorités judiciaires congolaises pour espérer obtenir réparation des préjudices subis par le fait de ces incursions.

Et les responsables du parti politique Unafec sont exhortés à éduquer leurs militants à ne pas se mêler des actes de violence ou de vol des minerais commis par les militaires Fardc dans les sites miniers de la province du Lualaba.

Il est rappelé que la RDC a reçu, en mai dernier, une notification officielle comme membre de l'initiative internationale « Principes volontaires sur la sécurité et les droits humains » dont le Secrétariat international est basé à Genève. A ce titre, le pays devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que des forces combattantes ne ternissent l'image de prestige des minerais congolais. « Suite aux probables violations des droits humains dont se rendraient coupables les Fardc sur les sites miniers, la RDC pourrait en être préjudiciée », a alerté Justicia ASBL.

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