Tunisie: L'entreprise autrement - Ces entreprises malades de l'administration (II)

27 Septembre 2023

Un frein et un fardeau pour l'économie du pays. Aussi paradoxale que cela puisse paraître, cette affirmation sied bien, chez nous, à l'Etat, censé être un moteur pour la croissance, le progrès et le bien-être. (Voir notre chronique du 13-09-2023). Traduire, un pays et son peuple victimes de leur Etat dont les rouages (exécutif, législatif et judiciaire) sont souvent inefficaces et coûteux.

Avec sa fiscalité excessive et mal répartie et souvent injuste, son administration archaïque et non-citoyenne et les lois qu'il édicte, l'Etat s'est souvent révélé une structure contre la société, un parasite envahissant et récalcitrant, une entité dominante, hyper contraignante, hégémonique et inefficace, poussant à la corruption et aux pratiques apparentées et à tout ce qui est informel, illégal et mafieux. A cause de son caractère hégémonique et brutal, il a largement participé à la création de ce que nous avons appelé l'«anti- citoyen ».

Tous ont été victimes de cette institution, surtout de son appareil administratif, qui représente le peuple et sa souveraineté et qui est censée bien gérer son passé, son quotidien et son avenir. La réalité montre que depuis le déclenchement, à partir de 1956, du soi-disant processus de sa modernisation, beaucoup reste à faire.

Pire, ce qui a été fait a été soit bâclé, soit mal fait, soit encore ayant généré de nouveaux problèmes devenus, à cause, entre autres, de leur accumulation, de vrais abcès. Déséquilibre régional flagrant, concentration urbaine malsaine dans le Grand-Tunis, très mauvaise qualité de la vie, criminalité toujours en hausse et de plus en plus organisée et meurtrière, ruralisation des villes, marginalisation de plusieurs métiers à haute valeur ajoutée, etc.

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Ecosystème, patrimoine culturel, richesses naturelles (y compris le soleil), capital humain, capital connaissances, appareils de production, créativité, image, progrès dans certains domaines et secteurs, etc., ont tous souffert d'un Etat dominé par un exécutif lui-même dominé par des groupes influents et violents et une administration aux méthodes archaïques, qui n'a pas su se débarrasser du conformisme, son juridisme, son clientélisme, son ascendant sur le gouvernement, etc.

Ainsi, et à travers ses politiques désastreuses, y compris celles relatives à la production et à la valorisation des compétences, à la fiscalité, à la monnaie, politiques souvent conçues par une administration coupée de la réalité, l'Etat s'est retrouvé gérant des budgets de fonctionnement de plus en plus grands que ceux dédiés au développement. Ainsi, il a embourbé le pays dans le «mal-développement».

Parmi les tares de l'administration publique, nous citerons une centralisation excessive, l'absence d'une approche managériale par les résultats, la rigidité et une tendance pathologique à vouloir tout contrôler (d'où des fléaux tels que la corruption, les mesures provisoires de raccommodage qui se transforment en règles), effectif pléthorique et coûteux, en termes de salaire et de très faible productivité, absence de politique de management du capital humain, faible rendement, absence de politiques de gestion des connaissances, etc.

En se désengageant socialement d'une manière brutale et mal étudiée, à partir de 1986, l'Etat a laissé la place à un secteur privé vorace et cupide qui n'a pas, en contrepartie, participé à la résorption du chômage et à l'augmentation des recettes de l'Etat.

Résultats, des services sociaux à deux vitesses, une paupérisation de la classe moyenne, une école à la dérive, un peuple à la santé fragile sinon ébranlée, des charges physiques mentales et financières quotidiennes excessives pour le citoyen qui se retrouve obligé de payer au prix fort même l'eau qu'il doit boire.

Côté entreprises publiques, c'est la vraie tragédie. Un ministre des Finances du régime déchu les a qualifiées à l'époque de gouffre financier, que dire alors aujourd'hui? Certaines, opérant dans des secteurs dits stratégiques, ont été complètement lâchées et abandonnées à leur triste sort. Cela en plus de leur poids revendicatif parfois démesuré.

Le grand perdant, dans tout cela, comme dit précédemment, restera sans doute l'entreprise privée existante ou en puissance. Facteurs de production excessivement chers et de mauvaise qualité, pression fiscale intolérable et très mal répartie, banques archaïques et taux d'intérêt élevés, rareté des liquidités entre autres à cause des dettes de l'Etat contractées auprès des banques privées, prolifération des pratiques non-concurrentielles, y compris celles dont l'auteur est l'Etat lui-même et la liste est longue.

Or, les entreprises privées sont les seules entités capables de créer des richesses et d'accroître l'investissement directement productif et de veiller à ce qu'il soit plus rentable, ce qui a fait retarder le processus de développement du pays et tué dans l'oeuf l'esprit de l'initiative privée.

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