Congo-Kinshasa: Détention du journaliste Stanis Bujakera - «C'est s'en prendre à toute la presse de RDC», pour HRW

La justice congolaise a rejeté, le 25 septembre 2023, une nouvelle demande de libération provisoire du journaliste Stanis Bujakera. Le correspondant de Reuters et de Jeune Afrique (JA) avait été arrêté le 8 septembre pour un article publié dans JA mettant en cause les renseignements militaires dans l'assassinat de l'ancien ministre Chérubin Okende. Une décision incompréhensible pour Thomas Fessy, chercheur spécialiste de la RDC pour Human Rights Watch (HRW). « Comment peut-il répondre d'un article qu'il n'a pas écrit ? », s'interroge-t-il notamment.

En République démocratique du Congo (RDC), le journaliste Stanis Bujakera termine sa troisième semaine de détention. Le tribunal a rejeté, lundi 25 septembre, la demande de remise en liberté provisoire déposée par ses avocats. Il reste donc en détention à la prison de Makala, à Kinshasa. Le journaliste est poursuivi pour propagation de faux bruits et diffusion de fausses informations pour un article publié par Jeune Afrique mettant en cause les renseignements militaires dans l'assassinat de l'ancien ministre Chérubin Okende, alors qu'il n'est pas l'auteur de l'article.

Pour Thomas Fessy, chercheur spécialiste de la RDC pour Human Rights Watch (HRW), ce maintien en détention met en lumière la répression croissante du gouvernement à l'encontre des médias, à moins de trois mois des élections générales prévues le 20 décembre 2023.

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« Le rejet de la demande de liberté provisoire de Stanis Bujakera est inexplicable »

« Le rejet de la demande de liberté provisoire de Stanis Bujakera est inexplicable, et son maintien en détention après trois semaines formalise l'intimidation qu'il subit depuis son arrestation, estime Thomas Fessy au micro de Paulina Zidi. Il a été interrogé sur un article dont il n'est pas l'auteur et qui ne porte pas sa signature. On lui demande de révéler les sources de cet article : au-delà du fait que la protection des sources est essentielle au travail d'enquête des journalistes, comment peut-il répondre d'un article qu'il n'a pas écrit ? L'article en question est basé sur une note présumée des renseignements à propos du meurtre de Chérubin Okende. Les autorités disent que cette note est un faux document. Soit. Pourquoi donc ne pas utiliser le droit de réponse pour contester l'authenticité de ce rapport et démontrer qu'il s'agit d'un faux ? »

Le chercheur conclut : « S'en prendre au journaliste le plus suivi du pays, qui a déjà fait l'objet de menaces et d'intimidations cette année, il faut le rappeler, c'est en réalité s'en prendre à toute la presse du pays à un moment très important. Stanis Bujakera devrait donc être libéré, et les atteintes à la liberté de la presse, l'un des fondements des démocraties, doivent cesser si l'on veut réellement créer les conditions d'un cadre électoral apaisé. »

Pour rappel, cette affaire concerne un article publié par Jeune Afrique mettant en cause les renseignements militaires dans l'assassinat mi-juillet de l'ancien ministre et opposant Chérubin Okende. L'article incriminé, diffusé fin août, se basait sur une note confidentielle présentée comme émanant des services de renseignements civils (ANR). Une note dont les autorités congolaises ont ensuite assuré qu'il s'agissait d'un faux.

Depuis, de nombreuses personnalités et organisations ont réclamé la libération de Stanis Bujakera. Le 19 septembre, le président de la RDC, Félix Tshisekedi, avait assuré : « Pour le journaliste Stanis Bujakera, qui est un jeune homme que j'aime bien [...], je regrette ce qui lui arrive, mais je ne peux pas faire entrave à la justice et ne pas permettre à celle-ci de faire toute la lumière. D'autant plus qu'on parle de mort d'homme, là. »

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