Madagascar: Dialogue public-privé - Réformes et inclusivité comme priorités

Le secteur public et le secteur privé étant partenaires, un alignement de leur vision du développement économique est jugé nécessaire. D'où le rôle du Dialogue Public-Privé (DPP) en tant que processus de collaboration inclusif visant à réformer la gouvernance et le climat des affaires, en vue de maximiser l'efficacité des politiques publiques et dynamiser l'économie.

«Le DPP est un processus organisé et structuré qui nécessite un suivi dans la concrétisation des engagements qui ont été pris. Un événement d'une journée, au cours de laquelle des personnes décident sans qu'aucun suivi ni aucune mise en oeuvre ne soient assurés, n'est donc pas un DPP », a expliqué l'Economic Development Board of Madagascar (EDBM) avant d'ajouter qu'un environnement des affaires dynamique et transparent favorable aux investissements privés et à l'entreprise est l'un des principaux moteurs du développement durable et de la création d'emplois,

d'où la nécessité d'inclure le secteur privé dans le dialogue portant sur les réformes politiques. À noter que la signature, récemment, du Pacte sur l'Industrialisation fait partie des réalisations majeures du DPP.

À savoir que sous l'égide du président de la République, la plateforme du DPP comprend, en plus du Premier ministre, 13 ministres pour le compte du secteur public et neuf organisations intermédiaires pour le privé. Cette plateforme constitue l'instance de décision et d'orientation des relations entre l'État et le secteur privé. Son Comité de Pilotage (COPIL) est présidé par le ministre de l'Industrialisation, du commerce et de la consommation (MICC).

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Sept ministres pour le compte du secteur public et les organisations intermédiaires du secteur privé présentes dans la plateforme siègent au niveau du comité. Le secrétariat technique et la facilitation du DPP sont assurés par l'EDBM, suivant les nouveaux statuts de ce dernier qui a aussi tenu à préciser que le DPP est un processus qui nécessite une réelle participation et un engagement à court et long terme de tous les acteurs.

« Pour qu'un dialogue soit efficace, plusieurs prérequis doivent être observés. C'est pour cette raison que la phase de préparation de tout dialogue est la phase la plus importante et à ne surtout pas négliger. En effet, mise à part la logistique, c'est déjà dans cette phase qu'on prépare le terrain du dialogue et qu'on assure une grande partie, pour ne pas dire la plus grande partie, de la réussite du travail à accomplir », a-t-on aussi souligné.

Des secteurs qualifiés de prioritaires

Plusieurs secteurs ont été retenus par le DPP comme prioritaires. Ils vont de l'industrie à l'énergie en passant par la logistique. Dans le cadre des travaux pour fixer le schéma directeur de l'industrialisation, une série de dialogue public-privé (DPP) a été organisée depuis l'année dernière sous la houlette du MICC et avec la participation d'autres directions ministérielles (l'énergie, les impôts, la douane, ...) et les groupements du secteur privé. Une première session de DPP sur des thèmes transversaux (énergie, accès au financement, ressources humaines, ...) a été réalisée au mois de mars 2022, suivie d'une session sur les secteurs des Produits de Première Nécessité et de la transformation alimentaire, des huiles essentielles et de la filière textile.

Durant les échanges, les représentants de l'État ont souligné les challenges à relever pour la croissance des secteurs dits prioritaires, pour le développement du pays et pour contribuer à l'amélioration du quotidien de la population. De son côté, le secteur privé a souvent rappelé l'objectif de dégager des engagements précis, de mettre en place un DPP sans langue de bois et orienté « solution » suivant des principes de facilitation et de cohérence.

Pour le secteur de l'énergie, le DPP a conclu sur la nécessité de promouvoir l'autoproduction et l'efficacité énergétique. Le MICC a rappelé la pertinence de l'autoproduction et s'est engagé à étudier la mise en place d'un système de fonds de garantie pour financer les investissements nécessaires sur l'idée que l'autoproduction pour les industriels éviterait à la Jirama de perdre plus de 400 milliards d'ariary par an. Dans la foulée, le MICC a noté que les parcs industriels permettraient de regrouper les industries et faciliter la mise en place de solutions d'autoproduction.

Pour le secteur privé, il est envisageable de se regrouper en Groupement d'Intérêt Economique pour répartir les investissements pour la mise en place d'une solution d'autoproduction. Le secteur privé peut également se positionner comme fournisseur d'énergie pour les parcs industriels lancés par l'État. Sous un autre angle, le secteur privé s'est engagé à investir dans l'efficacité énergétique et l'adoption progressive des énergies renouvelables.

Pour le volet financement, les parties prenantes se sont mises d'accord pour matérialiser les programmes crédit-bail et Fonds National pour le Développement Industriel (FNDI). Le MICC s'est ainsi engagé à appuyer la finalisation du cadre légal du crédit-bail et à mettre en place le FNDI. Par ailleurs, face aux réticences constatées au niveau des entrepreneurs et des industriels malgaches à ouvrir leur capital, « le MICC va aider à la préparation à l'investissement de ces derniers ». Pour leur part, le secteur privé, les banques et les institutions financières se sont engagés à mettre en place et à développer les offres de crédit-bail, dès la mise en place du cadre légal. Les fonds d'investissement (capital-risque) seront aussi impliqués.

Parcs industriels décentralisés

Pour le volet logistique, les échanges concernent divers sujets dont le problème de congestion du port de Toamasina. « Le MICC va soumettre au ministère de l'économie et des finances la proposition d'extension en terre-plein des magasins sous-douanes. Les perspectives de développement portuaire de l'Agence Portuaire, Maritime et Fluviale (APMF) doivent aussi s'aligner sur celles du MICC en termes de zones industrielles », peut-on lire dans le rapport.

On sait, en outre, que l'État a choisi de décentraliser les parcs industriels afin d'éviter les problèmes de connectivité. « Il faudra soumettre des projets de développement/réhabilitation des infrastructures routières au ministère des Travaux publics et réfléchir à la réhabilitation du transport de marchandises par rail. La mise en place d'une compagnie régionale maritime, en partenariat avec le secteur privé des îles de la sous-région, pour fluidifier le transport international et potentiellement maîtriser les coûts sera aussi étudiée ». Le secteur privé évaluera, quant à lui, les quantités à transporter pour négocier l'augmentation des lignes.

Pour les ressources humaines, le DPP a noté la nécessité de disposer d'une stratégie pour anticiper les besoins en formation. Il faudra appuyer le développement des CAP pour répondre aux besoins de main d'oeuvre de l'industrialisation et, notamment, des pépinières industrielles. Il faut aussi développer avec les écoles des formations techniques à mettre en place localement sur les zones identifiées ». Le MICC s'engage aussi définir une politique de communication dès la classe de 5ème sur l'industrialisation, dans le cadre de l'orientation professionnelle. La mise en place des formations en ligne est envisagée aussi bien pour le secteur public que le secteur privé.

Le secteur privé s'engage à planifier leurs besoins en ressources humaines pour planifier les formations à mettre en place. Le secteur privé s'est également engagé à élargir le Pôle Stage aux autres groupements professionnels en plus du SIM et intégrer plus d'écoles. La mise en place du parrainage du Syndicat des Industries de Madagascar (SIM) dans le cadre des pépinières industrielles sera effectuée. Pour optimiser les innovations, le secteur public mettra en place un catalogue des brevets, résultats de recherche et études au niveau des écoles publiques.

Dans le même sens, le MICC tiendra un rôle de leadership technologique dans les cahiers des charges des futurs AO. La mise en place du FNDI devra intégrer un volet « Recherche et Développement » et des partenariats stratégiques ciblés seront développés pour optimiser le transfert de technologie à l'exemple de l'Inde pour les pierres précieuses. Par ailleurs, le Centre d'appui à la technologie et à l'innovation (CATI) devrait être promu davantage auprès des industriels.

Toujours dans le cadre du DPP, l'EDBM est missionné pour organiser les réunions nécessaires afin de dresser un état des lieux de la fiscalité et de la parafiscalité (les textes sectoriels inclus), à Antananarivo, Antsirabe et Toamasina. De plus, un engagement conjoint a été établi dans le but de définir une politique fiscale incitative et ciblée sur les filières industrielles prioritaires.

Pour lever les blocages dans le développement ou la mise en application des différentes lois et règlements, le MICC s'est engagé pour l'adoption des lois et décrets d'application sur les investissements et le développement des industries. Il en est de même pour l'adoption du décret d'abrogation des entreprises franches défaillantes. Les problèmes de retard de paiement sur les marchés publics ont également été abordés et un DPP spécifique sera organisé sur la question. Par ailleurs, dans un souci de visibilité, l'ensemble des procédures d'autorisation du MICC seront mis en ligne. Enfin, il a été souligné que la stratégie industrielle adoptée devra être en cohérence avec la politique fiscale et douanière.

Projet de Loi de Finances 2024

Le dialogue se poursuit

Actuellement, la plateforme de dialogue public-privé se penche sur le Projet de Loi de Finances initiale 2024. Une réunion de préparation technique s'est tenue au siège de l'EDBM le 20 septembre dernier. Cette rencontre fait suite à la rencontre entre l'équipe du ministère de l'Économie et des finances, dirigée par la ministre, et les représentants du secteur privé, qui s'est déroulée le 7 septembre dernier. Lors de cette réunion technique, la direction générale des Douanes a travaillé en étroite collaboration avec des représentants du secteur privé, notamment le Groupement des Entreprises de Madagascar (GEM), le SIM, le FIVMPAMA, la Confédération du Tourisme de Madagascar, et le Tranoben'ny Tantsaha.

« Ces discussions font suite à une série de rencontres entre les groupements membres de la plateforme de dialogue public-privé (DPP). Les propositions communes du secteur privé pour la Loi de Finances Initiale de 2024 ont été soigneusement élaborées et validées lors de cette réunion, et elles seront présentées au ministère de l'Économie et des finances », a-t-on rapporté. On sait, en outre, que les groupements du secteur privé ont bénéficié de l'expertise en fiscalité grâce au soutien du programme Clim-Invest de l'Union européenne. Cette collaboration vise à structurer et à étayer de manière solide les propositions présentées.

Cette initiative s'inscrit dans le cadre de l'optimisation des processus de dialogue public-privé, visant à établir un mécanisme de dialogue constructif et inclusif pour favoriser le développement économique du pays. « Ce dialogue actif entre le secteur privé et le ministère des Finances est essentiel pour créer des politiques budgétaires équilibrées et adaptées aux besoins de Madagascar, contribuant ainsi à la croissance économique et à la prospérité de la nation », a fait savoir le MEF.

VERBATIM

Edgard Razafindravahy,

ministre de l'Industrialisation, du commerce et de la consommation.

« L'importance d'un secteur privé fort pour le développement économique n'est plus à démontrer. Tout comme l'interdépendance entre investissements, financement et confiance, qui requiert une coopération étroite et des discussions constructives entre l'État et le secteur privé. Ce qui justifie la mise en place de la Plateforme de Dialogue Public-Privé. Cette dernière a tenu ses promesses. De grandes avancées ont été enregistrées dont la signature du Pacte sur l'Industrialisation qui marque un engagement historique entre l'État malgache et les organisations du secteur privé ».

Tiana Rasamimanana,

Président du Syndicat des Industries de Madagascar (SIM).

« Promouvoir un dialogue transparent et développer un partenariat efficace pour l'industrialisation et l'expansion économique de Madagascar, c'est l'objectif du Dialogue Public-Privé. On peut noter une volonté commune et une ferme détermination du Secteur Public et du Secteur Privé malgache d'aller vers une nouvelle ère industrielle. Une relation fiable doit exister entre ces deux parties qui doivent se considérer en permanence comme partenaires et non adversaires ».

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