Ghana: Appel à la démission du président sur fond de manifs contre la vie chère - Nana Akuffo-Addo quittera-t-il la scène par une porte dérobée ?

analyse

A quelque 12 mois de la fin de son second mandat en 2024, le président ghanéen, Nana Akuffo-Addo, est dans la tourmente, face à la grogne sociale qui ne cesse de prendre de l'ampleur depuis quelque temps.

En effet, après les manifestations des 21, 22 et 23 septembre derniers, qui ont connu des records de mobilisation, de nombreux Ghanéens sont à nouveau descendus dans la rue, à l'appel de l'opposition, le 3 octobre dernier, pour dénoncer la vie chère au pays de Kwame Nkrumah.

En cause, la politique du gouvernement et la supposée ou réelle mauvaise gestion de l'économie dans un contexte de chômage accru des masses avec une inflation qui atteint les 40%. Pris à la gorge par les effets pervers d'une situation économique qui n'en finit pas de se détériorer, les manifestants appellent à la démission du président Nana Akuffo-Addo.

Et la fronde populaire ne semble pas près de s'arrêter de sitôt puisque les organisateurs annoncent déjà un nouvel appel à manifester pour le mois de décembre prochain.

A l'allure où vont les choses, le pays n'est pas à l'abri d'une explosion sociale

La question qui se pose est de savoir jusqu'où ira la grogne sociale, tant en dehors de la répression, le pouvoir d'Accra semble pour le moment à court d'arguments pour répondre convenablement aux préoccupations existentielles et aux aspirations de vie meilleure des Ghanéens.

Et ce ne sont pas les allégations de malversations financières encore moins les accusations récurrentes de scandales de corruption et de mauvaise gestion économique portées à l'encontre du gouvernement, qui sont en mesure d'apaiser la situation.

En tout cas, à l'allure où vont les choses, le pays n'est pas à l'abri d'une explosion sociale si le mouvement doit prendre encore plus de l'ampleur et si les conditions de vie des populations doivent continuer à se dégrader, avec un pouvoir d'achat qui s'amenuise de jour en jour en se réduisant comme peau de chagrin, au fil des mois.

C'est dire combien la situation est difficile si elle n'est pas en passe d'atteindre un seuil véritablement critique pour l'ancienne Gold Coast. Au point d'obliger le président Akuffo-Addo, autrefois réfractaire à l'aide internationale et fermement opposé aux institutions de Bretton Woods dont il dénonçait le diktat, à ravaler sa fierté et à se tourner vers le Fonds monétaire international (FMI) pour négocier un accord de plusieurs milliards de dollars pour consolider les finances publiques et éviter à son pays, de tomber dans le défaut de paiement. Autant dire qu'à environ un an de la fin de son dernier mandat, Nana Akuffo-Addo ne présente pas le meilleur bilan à laisser à son successeur.

Et à l'allure où vont les choses, il est en train de fragiliser son parti, dans la perspective des prochaines élections. Déjà, des divisions apparaissent au sein du parti présidentiel. Et des cadres et pas des moindres sont annoncés sur le départ.

Le contexte international marqué par la guerre en Ukraine et la pandémie du Covid-19, aura été fortement préjudiciable aux ambitions du natif d'Accra

A ce rythme, on se demande comment son parti s'en sortira aux prochaines élections, face à une opposition revancharde qui a trouvé dans la situation économique difficile que traverse le pays, une occasion de lui tailler des croupières en accentuant la pression sur son gouvernement.

Et si cette même opposition doit intensifier ses manifestations, on se demande si, à la longue, le président ghanéen ne se retrouvera pas en sursis s'il n'est pas contraint de terminer son mandat sur les rotules, sous la pression populaire. La question est d'autant plus fondée qu'à un an de la fin de son bail au Jubilee House, les perspectives de redressement de l'économie nationale paraissent bien minces.

Et cette façon, pour les manifestants, de tourner en dérision le nom du palais présidentiel qu'ils ont circonstanciellement rebaptisé « Julorbi House », « Julorbi » signifiant « voleurs » en langue locale, semble en dire long sur le degré de la rupture de confiance entre le chef de l'Etat et ses administrés.

En tout état de cause, c'est une dure fin de mandat pour l'avocat devenu président qui avait de grandes ambitions pour son pays, mais qui se trouve finalement réduit à gérer l'une des plus graves crises que son pays ait connues depuis plusieurs décennies.

Et ce, avec une économie aujourd'hui au bord du chaos, après avoir connu une embellie qui se voulait le fruit des efforts de ses prédécesseurs. Mais tout porte à croire que le contexte international marqué par la guerre en Ukraine et la pandémie du Covid-19, aura été fortement préjudiciable aux ambitions du natif d'Accra, de lutter contre la corruption et de moderniser l'économie de son pays en hissant ce dernier au niveau des nations les plus prospères du continent.

Mais, à quelques encablures de la fin de son mandat, non seulement ces défis restent entiers, mais aussi et surtout le chef de l'Etat ghanéen cristallise le mécontentement de ses compatriotes au point que l'on se demande si au moment de faire ses adieux, il ne quittera pas la scène par une sortie dérobée. L'histoire sans doute le dira et c'est le wait and see.

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