Madagascar: Socioculturel - L'aspect physique du Malgache remis sur le tapis

Apparemment, les habitants de la Grande île n'ont toujours pas compris l'épisode le plus important de leur histoire.

L'origine du peuplement malgache figure, pourtant, bel et bien dans les manuels scolaires dès la classe de primaire.

Point de rencontre entre l'Asie, le Moyen-Orient, l'Afrique, et le vieux continent, Madagascar est un carrefour culturel incontestable.

À 63 ans de son indépendance, le pays en forme de pied gauche incliné ne sait comment avancer !

« C'est le signe d'un malaise de la cohésion malgache », explique l'historien, le Dr Denis Alexandre Lahiniriko.

Effectivement, faute d'infrastructures, de communication, bien que les réseaux sociaux soient des petites fenêtres à demi ouvertes illustrant une des facettes de la malgachéité, la population n'arrive pas à bâtir une nation forte, ou suivre l'exemple de son voisin mauricien. « Nous avons tendance à créer dans notre esprit l'archétype du Malgache », ajoute l'historien.

Ce nationalisme primaire est véhiculé par les politiciens.

Une vieille pratique héritée par la colonisation durant laquelle le slogan « diviser pour mieux régner » était suivi à la lettre.

Inculquée inconsciemment dans la tête du Malgache actuellement, cette phrase est devenue une unité de base de l'information génétique qui se transmet d'aïeux en petit-fils.

Autrement dit, les portraits des souverains merina esquissés par le peintre Philippe-Auguste Ramanakirahina restent des références d'un peuple vivant au XXIème siècle.

Et lorsqu'un individu ne répond pas aux soi-disant critères, il est un «étrange étranger». D'ailleurs, des personnes en témoignent. « C'était en 2015, je crois ! Moi et mon ami sommes rentrés vers 2 heures du matin, après avoir assisté à une soirée arrosée à Faravohitra. À Ambanidia, trois policiers ont arrêté notre voiture. Mon ami était au volant, et moi, j'étais assis sur le côté passager.

Le policier a demandé les papiers de la voiture ainsi que ma carte d'identité. Ensuite, l'agent a projeté la lumière de sa torche sur mon visage en me demandant si j'étais un étranger. Je lui ai répondu que j'étais Malgache.

Ton nom n'est pas malgache me dit-il... Alors que ma carte d'identité a été délivrée à Antsiranana », raconte Salif Abdallah. Même cas pour Alia Rémi Corneille.

Une fille au teint clair. « Depuis mon jeune âge, les gens de mon quartier me surnomment Vazahavavy.

Cela ne me dérangeait pas... Un jour, notre prof de SVT nous a donné un devoir d'exposé à faire, avec comme thème la faune et la flore. J'ai choisi le parc Tsimbazaza comme sujet. Un samedi, je m'y suis rendue. Au guichet, un monsieur m'a parlé en français. J'étais très étonnée. Votre passeport mademoiselle, a-t-il dit. J'ai présenté ma carte d'étudiant... J'avais 15 ans à l'époque. Il m'a demandé si j'étais une vazaha ? Là je me suis rendue compte que le ticket d'entrée était différent. Le prix est assez élevé pour les étrangers. Il voulait que je paie plus. Et comme je parlais correctement la langue de mon pays, il a souri en me laissant entrer ! ». Anne Marie Longchamp, Miss de l'île de Madagascar a également été victime de la discrimination raciale dès la phase éliminatoire.

Diegolaise de souche, elle incarne le cosmopolitisme de sa région.

Couronnée princesse de la DIANA, ensuite élue comme étant la plus belle jeune femme de la compétition nationale, Anne Marie n'a pas non plus été à l'abri des injures, jugée trop blanche pour être Malgache.

En revanche, les choses étaient différentes lors de la Coupe d'Afrique des Nations en 2019. Le pays était en euphorie. Thomas Fontaine, Dimitri Caloin, Melvin Adrien, et leurs coéquipiers ont cassé le schéma. Malheureusement, «les choses ne se répètent pas de la même manière», disait l'autre.

Une fois qu'ils n'ont pas pu reproduire la même performance, bienvenue les insultes !

Alex Randriamahefa, doctorant en histoire à l'Université d'Ambohitsaina, avance également son point de vue, « en fait, c'est ce mythe du malagasy tsy vaky volo, qui nous pousse à fausser tous les récits ». Oui, non seulement cela a faussé l'histoire mais il creuse également un grand fossé qui sépare le Malgache et ses compatriotes.

L'amnésie ronge les mémoires, crée un mur et coupe les ponts. Par conséquent, le communautarisme, l'ethnicisme ainsi que le sécessionnisme gagnent de plus en plus de terrain. Le fihavanana n'est qu'une illusion.

Un mot qui ne quitte pas les lèvres quand on ne veut pas déclencher une querelle.

En réalité, les Malgaches assistent à une guerre tiède dans la vie de tous les jours.

Le fihavanana, cette devise criée dans les quatre coins de l'île.

Il n'est prononcé que quand une région est victime d'inondation ou de famine.

Sans équivoque, ce mot est synonyme de népotisme, de clientélisme.

Un idéal que les Malgaches n'atteindront pas.

Le fihavanana ne s'applique qu'au plus offrant.

À vrai dire, les Malgaches n'ont jamais reconnu qu'ils sont le fruit d'un mélange de différentes nationalités.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.