Madagascar: Ambondrombe à travers son lot de légendes

Autour d'Ambondrombe, la colline fianaroise peuplée des esprits des défunts merina, se tissent différentes histoires transmises par la tradition orale, recueillies et publiées par le R.P. Callet dans son Tantara ny Andriana eto Madagascar. Sur cette colline, existe un Rova royal, raconte-t-on. Il est ainsi indiqué que les emplacements géographiques de chaque territoire et de chaque caste tout autour de ce Rova, sont le reflet de ce qui se passe dans le monde des vivants. Il y est aussi question de la joie du défunt roi, Radama Ier, en y accueillant son épouse, Ranavalona Ire.

Mais aussi de la tristesse de celle-ci en voyant son fils, Radama II, prier le Dieu chrétien. Déception si grande qu'elle serait même revenue dans la capitale pour le chercher (c'est-à-dire l'emporter dans la mort). Car, elle lui aurait donné rendez-vous à Mahamasina, pour le tancer, mais comme il refuse de renier la foi chrétienne, elle l'entraine avec elle. D'autres histoires se répandent du vivant de cette souveraine. Par quatre fois, dit-on, son armée campe près d'Ambondrombe.

La première fois, en entendant des coups de canon et de fusils, des bruits de tambour... provenant de la colline, les chefs de l'expédition envoient des émissaires pour scruter la forêt d'où « se fait entendre tout ce tintamarre ». De loin, ils voient des soldats en plein défilé, vêtus tout de rouge. Au centre des personnalités s'abritent sous des parapluies, également de couleur écarlate. Des deux côtés du défilé, tout un peuple les acclame. Mais quand les émissaires se rapprochent du centre de la forêt, tout disparaît.

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Questionnés, les autochtones, informateurs du père Callet, affirment qu'il s'agit « d'un signe annonciateur de nouvelles, bonnes ou mauvaises ». Tel le décès d'un souverain qui, pour les esprits, se traduit par une grande liesse assourdissante, « car ils se languissent de lui ». Poursuivant leur explication, les habitants précisent: « Dans la forêt, il existe de vastes espaces, de grands parcs, mais aucun bûcheron ne se risquera à couper ne serait-ce qu'une simple tige d'arbre de peur de tomber malade. »

Une autre fois, le général Rafarahimanisa, XII honneurs, conduit une expédition armée forte de cinq mille hommes en route pour Vangaindrano. Les troupes s'arrêtent au campement installé près de la colline d'Ambondrombe. Comme à leur habitude dans ces occasions, les esprits sont en liesse pour marquer leur joie de voir l'armée royale. Curieux, Rafaralahimanisa interroge également la population locale sur « ce qui se passe à Ambondrombe ». À quoi les habitants répondent: « Ils agissent ainsi, car ils sont heureux parce que le royaume va s'agrandir. »

Ils demandent au général d'offrir en sacrifice un boeuf rituel volavita avant de poursuivre sa route. Ce qui est fait. Et son expédition est un véritable triomphe: plusieurs régions sont conquises et pacifiées, les butins sont très importants dont seize mille esclaves. Au retour, les troupes de Rafaralahimanisa campent à nouveau près d'Ambondrombe. Elles entendent encore les coups de canon et de fusils, les bruits de fête qui marquent l'immense joie des esprits après la victoire de l'armée royale. La tradition raconte également que les esprits de certaines personnes gravement malades et, sans doute, dans un état comateux, « voyagent » jusqu'à Ambondrombe, tandis que leurs corps gisent inertes sur leurs lits.

Quand ils arrivent devant le grand portail du « village merveilleux », ils demandent au garde où résident leurs proches décédés. « Nobles ou roturiers? » est la question qui leur est posée. Les « voyageurs » répondent tout en précisant le territoire, dont ils sont issus. Dès qu'ils rencontrent leurs proches décédés, ceux-ci les renvoient immédiatement chez les vivants, « car si les autres vous voient, ils vous retiendront ». C'est-à-dire qu'ils mourront prématurément, « avant leur jour ». En attendant leur départ, leurs parents décédés les cachent « sur le feu » pour que leurs corps ne refroidissent pas.

Cependant, comme leur arrivée n'est pas passée inaperçue, les « voisins » arrivent un par un s'enquérir de leurs nouvelles. Mais leurs proches affirment qu'ils sont déjà repartis. Pour les renvoyer- parce que les malades s'entêtent à rester-, leurs proches doivent les traîner « sur la voie qui mène au sud du Rova ». De là, ils traversent « l'eau froide » avant de pouvoir, de leur propre gré, réintégrer leurs corps. Ils reprennent conscience et racontent leur pérégrination au pays des esprits, dans le monde d'Ambondrombe.

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