Les autorités refusent toujours de lever l'interdiction de l'application. Elles exigent que l'entreprise signe un accord et livre davantage d'informations sur son fonctionnement.
Un bras de fer oppose le Sénégal et le géant chinois des réseaux sociaux TikTok. Les autorités sénégalaises ont refusé, jeudi dernier, le 5 octobre, de lever l'interdiction de l'application après des pourparlers avec une délégation de la plateforme chinoise, exigeant de l'entreprise qu'elle signe un accord qui permettrait de mettre en place un mécanisme de suppression des comptes. Lors de ses entretiens avec TikTok, le gouvernement a aussi demandé une meilleure réglementation de la plateforme et a questionné le fonctionnement de l'algorithme et la protection des données personnelles.
Les autorités avaient bloqué l'accès à TikTok en août dernier après l'arrestation du leader de l'opposition Ousmane Sonko et la dissolution de son parti, au motif que la plateforme était utilisée pour diffuser des messages "haineux et subversifs" menaçant la stabilité du pays selon Moussa Bocar Thiam, ministre de la Communication, des Télécommunications et de l'Economie numérique.
D'autres pays ont bloqué l'application
Outre le Sénégal, la Somalie a aussi banni TikTok au niveau national pour lutter contre la diffusion de messages de groupes terroristes, notamment al-Shebbab. Le Kenya avait pour sa part interdit TikTok après qu'une pétition civile soit remontée au Parlement. Une entente avait été trouvée en août. Le directeur général du réseau social avait annoncé dans la foulée l'établissement d'un bureau à Nairobi après des discussions avec le président William Ruto. Le gouvernement sénégalais espère réussir à imposer la même chose.
Une application controversée
L'application au milliard d'utilisateurs est régulièrement sous le feu des critiques, en Afrique et ailleurs. "Tik Tok n'est pas exempte de reproches. Au Kenya par exemple des fakes news circulaient lors des dernières élections", rappelle Qemal Affagnon, responsable pour l'Afrique de l'Ouest chez Internet Sans Frontières.Il évoque ensuite la "percée" de l'application auprès des internautes africains et met en garde : "Il est important de dépolitiser la question d'Internet car de nombreux internautes tous les jours se connectent pour communiquer ou accéder aux informations".
D'autres estiment aussi que les interdictions ne sont pas la solution la plus efficace. "Pour moi c'est un aveu d'échec", déclare Cheikh Fall, président de l'association Africtivistes. "Pour la régulation, il y a une responsabilité étatique qui consiste à faire de l'éducation aux médias." Selon-lui, les interdictions peuvent même avoir des effets collatéraux. "Ce que cela a produit c'est de créer une forme de résistance numérique qui pousse les utilisateurs lambda vers des solutions de contournement de la censure, un internet beaucoup plus ouvert et complexe à gérer comme le darkweb. Aujourd'hui tous les utilisateurs sénégalais disposent d'un VPN".
En attendant, au Sénégal, les autorités sont toujours en discussion avec TikTok.