Burkina Faso: Elévation de Thomas Sankara au rang de héros de la nation - C'est surtout le contenu qui compte !

Le gouvernement de la Transition a élevé, à l'occasion du dernier conseil des ministres, le père de la Révolution Démocratique et Populaire (RDP), le capitaine Thomas Sankara, à la dignité de héros de la Nation. 36 ans après sa disparition tragique, Thom Sank, comme l'appellent affectueusement les Burkinabè, entre dans le panthéon national. Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette immortalisation du président du Conseil National de la Révolution (CNR), est tout à fait méritée. En effet, de mémoire de Burkinabè, personne n'a autant incarné les aspirations et les valeurs profondes de la Nation que Thomas Sankara.

Et c'est ce qui explique sa popularité auprès de la jeunesse burkinabè qui lui voue une admiration sans faille. La question que tous les Burkinabè se posent à présent, est la suivante : quel contenu va-t-on donner à cette élévation du capitaine Thomas Sankara au rang de héros de la Nation ? La question n'est pas saugrenue parce que le régime de Blaise Compaoré avait déjà élevé Thomas Sankara au rang de héros national mais la suite a montré qu'il s'agissait plutôt d'une coquille vide. Non seulement le régime Compaoré n'a jamais accepté de juger le dossier Thomas Sankara, mais l'on a aussi pris un texte interdisant aux partis politiques, l'utilisation des effigies des héros nationaux dont celle de Thomas Sankara pour séduire l'électorat. Finalement donc, cette distinction faite sous le régime du Congrès pour Démocratie et le Progrès (CDP), était devenue un instrument de répression. C'est pourquoi il importe de décliner les privilèges liés à ce statut de héros national.

L'élévation de Thomas Sankara, sonne comme une catharsis sociale

En attendant que tout cela soit clarifié, l'on peut déjà se réjouir que suite à cette élévation de Thomas Sankara au rang de héros national, il est prévu pour la journée du 15 Octobre prochain, marquant l'anniversaire de l'assassinat du leader charismatique de la révolution d'Août 1983, « une cérémonie nationale et internationale d'hommage » au défunt président et à ses compagnons d'infortune. On peut déjà le dire, cela constitue en soi une revanche d'outre-tombe de Thomas Sankara sur ses assassins qui n'ont jamais réussi, malgré sa liquidation physique, à éteindre sa mémoire. Mais au-delà des manifestations officielles qui peuvent apparaitre comme cosmétiques, il faut surtout traduire dans les faits et gestes, les idéaux de Thomas Sankara dans le contexte particulier de crise que traverse notre pays. Il nous faut, en effet, revenir aux valeurs fondatrices de notre nation pour sortir de l'épisode de violences que connaît le Burkina Faso.

Quand on est égaré, il faut revenir aux sources comme le dit l'historien Joseph Ki-Zerbo. C'est en ce sens qu'il appartient plus aux Burkinabè d'immortaliser Thomas Sankara que tout autre régime politique qui pourrait plutôt en user comme d'un fonds de commerce. Mais dans l'attente de voir ce que les Burkinabè feront de leur héros national, l'on peut dire qu'après le procès Thomas Sankara qui a permis de confondre les assassins et cette nouvelle distinction honorifique, les Burkinabè sont en train de solder leurs comptes avec l'histoire mais se sont installés dans une dynamique de réparation de la relation sociale brisée avec les nombreuses victimes des violences politiques. C'est en cela aussi que l'élévation de Thomas Sankara, sonne comme une catharsis sociale qui permet d'exorciser la société burkinabè du mal des violences politiques.

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