Une occasion unique de protéger les personnes et la planète contre les crises du climat et du plastique
Les données sont claires. La production mondiale de plastique a doublé entre 2000 et 2019, atteignant 460 millions de tonnes (Mt) par an. Si aucune mesure n'est prise, elle devrait presque tripler d'ici 2050 et absorber 13 % ou plus du budget carbone restant sur Terre pour maintenir le réchauffement inférieur à 1,5 °C.
Cette production incontrôlée de matières plastiques accélère la triple crise planétaire - changement climatique, pollution et perte de biodiversité -, menace la santé humaine à une échelle inimaginable et exacerbe les inégalités raciales, sexuelles et économiques dans le monde entier.
Alors que nous nous dirigeons vers le troisième cycle de négociations internationales pour un traité mondial sur les plastiques au Kenya, les dirigeants mondiaux doivent se rendre à l'évidence : la seule façon de résoudre la crise des plastiques et d'éviter les pires effets de l'urgence climatique est de fixer des règles ambitieuses qui réduisent de manière significative la quantité de plastique produite. Les dirigeants mondiaux ont l'occasion d'être ambitieux et s'ils échouent, nous serons tous perdants.
Réduire la production de plastique d'au moins 75 % pour éviter le pire de la crise climatique
Si nous ne considérons la crise du plastique que sous l'angle du climat, les meilleures modélisations disponibles (Eunomia et Pacific Environment) nous indiquent qu'il faudra réduire la production de plastique de 75 % d'ici à 2050 pour limiter le réchauffement à 1,5 °C et prévenir les conséquences les plus désastreuses d'une planète qui se réchauffe rapidement. Le bilan mondial sur le changement climatique, publié plus récemment, indique que la fenêtre permettant de limiter le réchauffement à 1,5 °C se referme rapidement et constitue un nouveau signal d'alarme brutal : le monde doit faire beaucoup plus, beaucoup plus vite, pour protéger la vie sur terre.
La fixation d'un objectif mondial de réduction de la production de plastique d'au moins 75 % d'ici à 2040 répond à cet appel à une action internationale audacieuse et ambitieuse. Non seulement cela aidera les pays à atteindre leurs objectifs climatiques, mais cela créera des emplois, débloquera de nouveaux niveaux d'innovation et fera progresser les solutions réelles vers des économies à faible émission de carbone, sans produits toxiques et basées sur la réutilisation.
Un traité pour défendre les intérêts des communautés et des travailleurs concernés, et non ceux de l'industrie des combustibles fossiles
Sans surprise, les entreprises du secteur des combustibles fossiles utilisent les règles du jeu climatique pour étouffer l'ambition et convaincre les gouvernements de définir ce qui est possible en fonction de ce qui leur rapporte des bénéfices à court terme. Plusieurs des rapports très médiatisés destinés à éclairer les négociations sur les traités ont été rédigés par un consultant ayant des liens avec l'industrie pétrolière et gazière. Ils préparent le monde à l'échec en protégeant le statu quo et en minimisant la nécessité de s'attaquer directement à la production de plastique. Les dirigeants mondiaux doivent rejeter cette approche fondamentalement défaitiste.
Forts de décennies d'expérience dans les négociations sur le climat, nous savons que nous avons besoin de règles ambitieuses, convenues au niveau mondial, qui réduisent la production de plastique et accélèrent une transition juste, en donnant la priorité aux intérêts de ceux qui ont le moins contribué à cette crise, mais qui en paient le prix le plus élevé.
La table est mise. Il faut maintenant commencer le vrai travail
Le "Zero Draft" du traité, récemment publié, comprend l'architecture juridique de base nécessaire pour fixer un objectif ambitieux de réduction de la production de plastique à l'échelle mondiale. La table est mise et ce qu'il faut avant tout, c'est avoir le courage d'être ambitieux.
Le Traité mondial sur les plastiques est une occasion unique de résoudre la crise du plastique. Avec nos alliés du mouvement Break Free from Plastic et les millions de personnes qui agissent, nous pouvons parvenir à un traité mondial sur les plastiques ambitieux qui fermera le robinet des plastiques et mettra enfin un terme à l'ère du plastique.
Graham Forbes est chef de la délégation de Greenpeace aux Négociations du Traité Mondial sur les Plastiques et responsable de la Campagne Mondiale sur les Plastiques pour Greenpeace USA.