Marrakech — À l'occasion des assemblées annuelles de la Banque mondiale (BM) et du Fonds monétaire international (FMI), Kevin Chika Urama, économiste en chef et vice-président de la Banque Africaine de Développement (BAD), a accordé une interview exclusive à la MAP.
Revenant sur les défis du continent et sur l'importance de repenser l'architecture de financement internationale, M. Urama a mis l'accent sur les avancées réalisées par le Maroc, devenu leader en Afrique dans plusieurs domaines.
- La BAD a déployé des efforts pour la refonte de l'architecture de financement internationale. Pouvez-vous expliquer comment ?
Les flux de financement vers l'Afrique restent insuffisants pour réaliser les Objectifs de développement durable (ODD) et faire face aux effets du changement climatique, en matière d'adaptation.
Sur la décennie en cours, le continent africain a besoin de 1.300 à 1.600 milliards de dollars pour répondre efficacement aux défis émanant des changements climatiques, selon les évaluations de la BAD.
Dans ce sens, la Banque plaide de nouveau pour une architecture financière internationale plus équitable et propice au développement de l'Afrique.
Le système financier international doit prévoir des mécanismes susceptibles de favoriser l'inclusion et la participation des pays africains.
Le changement vers plus "d'inclusivité" s'impose pour introduire de nouvelles réformes qui luttent contre les inégalités genre et qui prennent en considération les jeunes.
- Parlons du changement climatique. Comment la BAD se prépare, avec les banques multilatérales, à la COP28 pour faire face à ce défi et garantir la sécurité alimentaire ?
La 27ème conférence annuelle de l'ONU sur le climat (COP27), qui s'est tenue en Egypte, marque le début du changement. Nous espérons que la COP28 sera celle de l'action, pour implémenter les décisions déjà prises.
Le changement climatique devient un défi quotidien pour le continent africain.
Bien que l'Afrique ne contribue qu'à 2% à 3% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, elle souffre de manière disproportionnée des effets du changement climatique.
Les gouvernements sont appelés à mettre en place des stratégies d'adaptation et d'atténuation, mais ils n'ont pas les moyens financiers nécessaires.
- Le Maroc a réalisé un saut qualitatif dans divers domaines, grâce au leadership de SM le Roi Mohammed VI. Quelle est votre lecture ?
Le Maroc a toujours été un "exemple brillant" de l'Afrique en termes notamment de programmes de développement et de sauts qualitatifs réalisés sous le leadership de SM le Roi Mohammed VI.
Par exemple, en matière d'énergies renouvelables, le complexe Noor Ouarzazate est pionnier en Afrique. Il démontre la vision stratégique du Royaume et sa vocation tournée vers l'avenir.
Le Maroc est leader du continent dans différents domaines, notamment la gouvernance, l'infrastructure, la gestion de la dette publique, avec des fondamentaux macroéconomiques solides et une économie résiliente.
En matière d'investissement, le Maroc fait de belles choses dans plusieurs secteurs, notamment l'eau, l'irrigation, les routes et les infrastructures. Une expérience à partager avec les autres pays du continent.
L'avenir de l'Afrique est dans cette intégration profonde. En travaillant ensemble, nous irons loin et rien ne peut nous arrêter.
- Quelle est la portée de l'organisation des assemblées annuelles en terre africaine, 50 ans après ?
Les assemblées annuelles BM-FMI doivent s'organiser de plus en plus en Afrique, vu que les discussions portent de plus en plus sur l'Afrique, son potentiel et ses défis.
Nous sommes fiers de l'excellente organisation du Maroc. Une occasion pour démontrer ce que nous pouvons faire et dont nous sommes capables.
Je félicite à cette occasion le Maroc et les Marocains pour cette expérience réussie.