Sénégal: Nomination de Sidiki Kaba au ministère de l'intérieur a quelques mois de la présidentielle - Les experts Ndiaga Sylla et Moundiaye Cissé décortiquent les enjeux

14 Octobre 2023

La nomination de Sidiki Kaba à la tête du ministère de l'Intérieur, à quelques mois de l'élection présidentielle du 25 février, est une preuve que « le président M. Sall est resté dans sa logique ». L'avis est de Ndiaga Sylla, expert électoral et président cabinet CEELECT et Moundiaye Cissé, Directeur exécutif de l'Ong 3D. Réagissant sur le remplacement de Antoine Felix Diome par son camarade de parti à la tête de ce ministère chargé de la prochaine élection présidentielle, nonobstant la demande de l'opposition d'une personnalité neutre, les deux acteurs de la société civile ont toutefois tenu à rassurer qu'il est « quasiment impossible pour un ministre d'influer sur la transparence des élections ».

C'est désormais officiel, le président de la République Macky Sall passe outre la tradition républicaine consistant à nommer une personnalité neutre à la tête de l'organisation de l'élection présidentielle. Instauré depuis 2000 par le président Abdou Diouf et perpétué par son successeur, Me Abdoulaye Wade, en 2012, ce principe qui a valu au Sénégal ses deux alternances démocratiques au pouvoir, a été cependant récusé par l'actuel chef de l'Etat depuis son arrivée au pouvoir en mars 2012. En effet, depuis son élection à la présidence de la République, Macky Sall s'est toujours illustré par son refus catégorique de satisfaire la demande de l'opposition et de la société civile dans ce sens. « Je ne suis pas là pour satisfaire les désirs de quelques personnes. (...). C'est un faux-débat. J'ai toujours combattu ceux qui disent que le ministre de l'Intérieur ne doit pas être politique. Je ne prendrais pas un militaire pour en faire un ministre de l'Intérieur pour la simple raison que le système électoral sénégalais est un système transparent », avait-il martelé lors du Grand Entretien qu'il avait accordé à quelques journalistes en marge de son discours à la Nation du 31 décembre 2018.

Avec la nomination du nouveau gouvernement effectué le mercredi 11 octobre, le chef de l'Etat semble camper sur sa position de ne pas « satisfaire les désirs de quelques personnes ». En effet, avec le remplacement du magistrat Antoine Felix Diome réputé très proche du chef de l'Etat par Me Sidiki Kaba, responsable du parti au pouvoir, l'Alliance pour la République ne fait conforter la démarcation de l'actuel chef de l'Etat par rapport à la tradition républicaine instaurée par ses prédécesseurs à la présidence de la République, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade.

Interpellé par Sud quotidien sur cette situation, Ndiaga Sylla, expert électoral et président cabinet CEELECT estime au sujet de cette nomination de Me Sidiki Kaba que le « président M. Sall est resté dans sa logique ». « La question de l'autorité chargée d'organiser les élections avait déjà fait l'objet de désaccord lors du dialogue politique. Le président M. Sall est resté dans sa logique. A cette étape du processus électoral, il ne serait pas indiqué de créer un nouveau ministère des Élections. Toutefois, une personnalité neutre à la tête du département en charge de l'organisation matérielle des élections aurait pu contribuer à restaurer la confiance et rassurer les acteurs ».

Abondant dans le même sens, Moundiaye Cissé, Directeur exécutif de l'Ong 3D, interrogé par nos confrères de la radio Sudfm tout en jugeant légitime la demande de nomination d'une personne indépendante pour organiser les élections de l'opposition a toutefois tenu à rassurer qu'il est « quasiment impossible pour un ministre d'influer sur la transparence des élections ». « L'opposition est légitimement en droit de réclamer la nomination d'une personne indépendante pour organiser les élections, soit en tant que ministre de l'intérieur ou à la limite, en tant que délégué chargé de l'organisation des élections. Mais, ma conviction est que quel que soit le statut de la personne qui est désignée pour diriger l'organisation des élections, il est quasiment impossible d'influer sur la transparence des élections pour un ministre ».

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