Driss Lachguar présidant la conférence nationale sur la représentativité des avocates dans les instances de la profession
Le secteur des avocats ittihadis a organisé vendredi 13 octobre une conférence sur «la représentativité des avocates dans les instances professionnelles», en présence du Premier secrétaire de l'USFP, Driss Lachguar, et du coordinateur du secteur des avocats ittihadis, Allal El Basraoui. «La représentativité des avocates dans les instances de la profession s'inscrit dans le cadre d'une problématique plus large, celle de l'autonomisation des femmes dans la société», a mis en avant le Premier secrétaire de l'USFP dans son allocution d'ouverture de cette conférence, avant d'enchaîner : «Cette question fait partie des préoccupations majeures de l'USFP, car elle est l'un des éléments fondamentaux de la démocratisation de la société, qui ne peut se concevoir sans l'égalité»
Driss Lachguar : Pas de démocratie sans égalité des genres
Pour le dirigeant ittihadi, la question féminine constitue une problématique centrale pour l'USFP qui n'a cessé de la défendre depuis longtemps, tout en la considérant comme un prélude à la démocratisation de la société, étant donné qu'il n'y a pas de démocratie sans égalité des genres.
Il a déploré le faux débat qui considère que la scène politique est un champ où règnent le conservatisme et le machisme, alors que la société civile est un champ où prévalent le progressisme et la modernité.
Or en fait, note le Premier secrétaire, c'est en politique que la femme est la plus représentée, contrairement aux centrales syndicales, aux associations, et même aux syndics d'immeubles où les femmes sont sous-représentées.
«Nous, au sein de l'USFP, nous tenons à souligner que le développement, le progrès et nos valeurs ne peuvent pas se concrétiser sans la justice et l'égalité, une égalité en matière de représentativité, qui signifie l'égalité de participation dans la prise de décision», a assuré Driss Lachguar, en ajoutant: «Il est honteux, compte tenu de l'histoire ancienne de cette profession d'avocat, qu'aucune femme n'ait été élue bâtonnière au sein des instances représentatives de la profession».
Le responsable ittihadis a estimé que la loi réglementant la profession d'avocat est devenue anachronique après l'adoption de la Constitution de 2011.
Pour rappel, ledit texte a consacré l'égalité homme-femme dans son article 19 qui dispose :
«L'homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental, énoncés dans le présent titre et dans les autres dispositions de la Constitution, ainsi que dans les conventions et pactes internationaux dûment ratifiés par le Royaume et ce, dans le respect des dispositions de la Constitution, des constantes et des lois du Royaume ».
Il est à rappeler que dans la plateforme distribuée au début de la rencontre, cette disposition constitutionnelle « s'est traduite dans de nombreuses institutions, ce qui a permis la présence de femmes au niveau des postes de décision. Son pourcentage et sa force varient d'une institution à l'autre, mais le principe existe».
Cependant, cette situation diffère complètement au niveau de la profession d'avocat, a relevé la même source, en précisant : «En effet, la loi relative à la profession ne prévoyait aucune discrimination positive en faveur des femmes et n'a pas été modifiée après la promulgation de la Constitution de 2011.
Ainsi, la situation des avocates dans leur rapport aux postes de décision devient tout à fait exceptionnelle, à une époque où les avocats auraient dû être les premiers à oeuvrer pour que les femmes soient présentes dans les postes de décision ».
«Aujourd'hui, nous ne disposons pas de baguette magique pour une bonne représentativité des avocates au sein des conseils des barreaux en particulier ou au niveau de la profession en général, mais il est nécessaire de débattre de ce sujet afin de trouver des réponses appropriées à cette problématique et de lever cette injustice à l'égard des femmes », a poursuivi Driss Lachguar, soulignant à cet égard que la profession d'avocat ne peut pas rester à l'écart du dynamisme de la société et appelant toutes les forces vives à soutenir cette cause noble.
Par ailleurs, le Premier secrétaire de l'USFP a exprimé sa fierté du choix de S.M le Roi Mohammed VI, à la lumière de la lutte dans la société contre les forces conservatrices et pour l'égalité et une véritable représentativité des femmes, afin de rendre justice, conformément à son projet moderniste, aux femmes marocaines, ce qui a nécessité la réforme du Code de la famille et la réforme constitutionnelle de 2011.
Il a relevé que l'USFP a mené des luttes acharnées contre les forces conservatrices depuis l'indépendance afin d'établir l'égalité et de construire une société moderniste, démocratique et solidaire, tout en exprimant sa satisfaction des acquis réalisés en faveur de la cause féminine, que ce soit au niveau de la participation ou de la représentativité des femmes dans les institutions élues ou encore au niveau des postes de décision dans l'administration marocaine.
L'orateur a également mis en exergue la nécessité de proposer un programme de lutte commune pour atteindre l'égalité absolue, en particulier dans les professions où les femmes sont majoritaires.
«Nous ne considérons pas cela comme un luxe, mais comme une nécessité absolue, car il est inacceptable d'empêcher la moitié de la société de prendre part au pouvoir de décision», a conclu le dirigeant ittihadi.
Allal El Basraoui : Il faut mettre fin à l'injustice dont souffrent les avocates au sein de la profession
Pour sa part, le bâtonnier Allal El Basroui, coordonnateur du secteur des avocats ittihadis, a mis l'accent sur l'importance de la thématique de la rencontre, notant que l'organisation de celle-ci s'inscrit dans un contexte national marqué notamment par le débat public autour du Code de la famille, l'élaboration d'un projet de loi sur la profession d'avocat, ainsi que l'injustice que subissent les avocates.
Allal El Basraoui a déclaré que le nombre des avocats marocains s'élève à 15.000 personnes et que le nombre des membres des conseils de barreaux est de 255 dont seulement 23 femmes.
Et qu'aucune femme n'a été élue à la tête d'un barreau au Maroc, ce qui constitue, d'après lui, une injustice qu'il faut absolument lever par la modification de la loi régissant la profession.
«Nous avons besoin de mener de nombreuses actions et discussions pour que la présence des femmes avocates soit plus importante et équilibrée», a-t-il mis en avant en ajoutant que cette conférence s'inscrit dans le cadre des préparatifs pour la tenue du congrès national du secteur des avocats ittihadis prévu à la fin du mois courant à Marrakech.
Nezha Alaoui : Il est impossible de bâtir une société forte sans la participation d es femmes au développement sociétal, économique et culturel
L'avocate Nezha Alaoui a affirmé, pour sa part, que depuis les années 80, le Maroc a connu un fort mouvement en faveur des droits de l'Homme et que l'Etat a mis en place des politiques visant à améliorer le statut de la femme et à établir les bases d'une société solidaire et égalitaire.
Elle a relevé que la Constitution a consacré l'égalité des droits entre hommes et femmes et que la société marocaine a connu des mutations et un dynamisme ayant permis l'amélioration des conditions des femmes marocaines.
L'intervenante a estimé qu'il est devenu nécessaire d'harmoniser la loi de la profession d'avocat avec les conventions internationales, en tenant compte de la forte présence des femmes dans la profession, évoquant les obstacles qui empêchent les avocates d'occuper des postes de décision dans les instances de la profession, à côté notamment des responsabilités familiales qui pèsent lourdement sur les charges des femmes.
Elle a proposé de mettre en place une approche de genre au sein des instances de la profession, en attribuant un quota pour les femmes, en adaptant la loi de la profession à la réalité, et en augmentant les capacités des femmes dans les affaires professionnelles.
Et de conclure qu'il est impossible de bâtir une société forte sans la participation des femmes au développement sociétal, économique et culturel.
Bouchra El Assimi : Il est temps de joindre le geste à la parole
De son côté, l'avocate Bouchra El Assimi a fait savoir dans son intervention lors de cette conférence modérée par l'avocat et membre dirigeant de l'USFP, Mustapha Ajjab, que le taux de représentativité des femmes au sein des instances de la profession ne dépasse pas 9%, qu'il y a 6 instances qui n'ont aucune représentativité des femmes, et que celles-ci n'ont jamais occupé le poste de bâtonnier, ajoutant que l'un des obstacles expliquant cette amère réalité réside dans la présence de pratiques électorales contraires à l'éthique au sein de ces instances. Bouchra El Assimi a affirmé qu'il est temps de joindre le geste à la parole en mettant en oeuvre un programme précis déterminant les étapes nécessaires pour améliorer la présence des femmes au sein de la profession.
L'intervenante a également souligné la nécessité d'appliquer le principe d'alternance au poste de bâtonnier pour atteindre le principe de la parité consacré par la Constitution de 2011.
Karima Salama : Il est nécessaire d e respecter les règles éthiques pour améliorer la position des avocates
L'avocate Karima Salama a, quant à elle, déploré le faible taux de représentativité des femmes au sein des instances de la profession, mettant l'accent sur la nécessité de promouvoir cette représentativité.
L'intervenante a noté qu'aucune femme n'a occupé le poste de bâtonnier, pour plusieurs raisons et obstacles l'empêchant d'y accéder, appelant à plus de lutte pour défendre les acquis et les droits des avocates, à améliorer leur statut professionnel, à mettre un terme à la mentalité machiste, et à exiger le respect des règles éthiques pour promouvoir la position des avocates au sein des organes représentatifs de la profession.
Atika El Waziri propose le principe de proportionnalité et de quotas comme option pour renforcer la re présentativité d es a vocates
Atika El Waziri a, quant à elle, mis l'accent sur les principes constitutionnels, à savoir l'égalité, la parité et la suprématie des conventions internationales.
Elle a plaidé pour l'amélioration de la représentativité des femmes au sein des instances de la profession, tout en présentant quelques chiffres et statistiques illustrant cet état de fait .
Elle a aussi mis en avant que des mécanismes et des outils doivent être créés pour améliorer cette représentativité et surmonter les contraintes et les obstacles empêchant les femmes d'accéder aux postes de responsabilité.
A cet effet, elle a proposé le principe de proportionnalité et de quotas comme option à même de renforcer la représentativité des avocates.
Pour sa part, Hatim Bakkar a fait part de l'impératif de défendre les droits des femmes et leur statut au sein des instances professionnelles, soulignant la nécessité de créer des outils et des mécanismes afin d'atteindre la parité et l'égalité entre les genres dans divers domaines et secteurs, y compris au sein de la profession d'avocat.
Et de conclure que cette conférence constitue une opportunité d'ouvrir la discussion et le dialogue sur la réalité de l'amélioration de la représentativité des femmes avocates et d'échanger sur les perspectives d'amélioration de leur statut.