Au Mali, la situation est restée calme mercredi à Tessalit. Un calme « sous haute tension » puisque la Minusma a commencé lundi son désengagement de cette base de la région de Kidal, dont l'armée malienne et les rebelles du CSP se disputent la reprise. L'armée malienne a lancé au début du mois une vaste opération militaire dans le Nord qui n'est pas sans risque pour le Mali et pour tout le Sahel, selon le Timbuktu Institute.
Un « processus d'occupation irréversible des terres maliennes », une opération de « reconquête ». Pour les autorités maliennes de transition, l'offensive militaire dans la région de Kidal est une question de souveraineté et de défense du territoire. Pourtant, les rebelles du CSP demandent l'application de l'accord de paix de 2015 et n'ont pas revendiqué l'indépendance des régions du Nord, comme c'était le cas en 2012 - ce que la reprise des hostilités pourrait d'ailleurs finir par changer.
Pour Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute, un « centre de recherche africain pour la paix » basé à Dakar qui vient de publier un rapport, cette offensive militaire doit surtout permettre aux autorités de transition de justifier leur maintien au pouvoir. « Les autorités ont besoin de galvaniser le sentiment national, le discours militaro-populiste, pour dire à la population malienne que si elles s'engagent dans cette guerre au Nord, c'est bien pour la libération du pays et que cet impératif de sécurité serait prioritaire par rapport au calendrier électoral et au calendrier de la transition négocié avec la Cédéao », indique-t-il.
L'offensive militaire malienne vers Kidal a été lancée le 2 octobre dernier, tout juste une semaine après l'annonce du report sine die de l'élection présidentielle initialement prévue en février prochain.
Mais la stratégie est risquée. Pour le Mali d'abord, où la reprise de la guerre pourrait avoir des conséquences aussi néfastes que longues. Et même pour toute la sous-région. Le Mali ayant créé le mois dernier une nouvelle alliance militaire avec le Burkina et le Niger. La Charte du Liptako-Gourma instituant l'Alliance des États du Sahel (AES) a été signée le 16 septembre dernier.
« Désormais, les pays alliés peuvent intervenir à l'intérieur des autres pays, et la possibilité d'une nouvelle dynamique de conflit dans la région, impliquant une contre-alliance touareg au-delà des frontières nationales, pourrait aggraver les tensions ethniques et la stabilité régionale », selon Bakary Sambe.
Dans son rapport, le Timbuktu Institute estime que les autorités maliennes de transition accordent la « priorité à la consolidation du pouvoir plutôt qu'à la résolution des crises ».